L’Autriche compte investir plus, dans les années à venir, dans l’agriculture, l’automobile et les énergies renouvelables et ce, afin d’assurer une meilleure notation pour le marché algérien. Dans cet entretien, paru dans les colonnes de L’Eco (N°113 / du 1er au 15 juin 2015), le conseiller commercial de l’ambassade d’Autriche à Alger, Markus Haas, étale les différents projets de partenariat inscrits dans leur programme de l’année 2015, ainsi que ceux qui sont en cours de réalisation comme celui de la ferme-pilote de Khenchela.
L’Eco : La crise ukrainienne a affecté l’économie de tous les pays européens, y compris l’Autriche. Est-ce l’un des motifs qui vous incite à engager des investissements en Algérie ? Lesquels ?
Markus Haas : Avant d’aborder les autres questions ainsi que l’évaluation de certains de nos projets lancés en Algérie, je souhaiterais vous donner un petit résumé de nos actions. Depuis plusieurs années, les relations bilatérales entre nos deux pays respectifs ont évolué de manière extraordinaire. Le volume des échanges commerciaux, d’ailleurs, s’est multiplié par cinq durant les dix dernières années d’activité en Algérie. Aujourd’hui, nous estimons le taux des échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Autriche à près 600 millions d’euros dont 300 millions d’euros d’exportations et près de 300 millions d’euros d’importations. C’est un volume assez conséquent pour nous et qui nous encourage à aller de l’avant dans nos relations d’échanges économiques. En tant que partenaire commercial, l’Autriche a bien préservé sa position sur le marché algérien et compte la soutenir à travers la mise en œuvre de plusieurs autres projets de partenariats, tous domaines confondus. Récemment, nous avons paraphé plusieurs contrats de partenariats avec des entreprises publiques algériennes, à l’instar de celui qui a été conclu entre la société autrichienne Kapsch CarreerCom et la société algérienne des transports ferroviaires (SNTF).
Plusieurs autres projets de création de joint-venture entre des entreprises algériennes et autrichiennes sont au programme de cette année, notamment dans l’industrie de l’automobile, dans le bâtiment où nous proposons des procédés de préfabrication qui vont être réalisés en Algérie avec des partenaires locaux. Nous portons un grand intérêt au développement de ce secteur qui fournit plus de matériaux de construction vers l’Algérie. L’Autriche fournit à l’Algérie presque 100% du bois destiné au bâtiment, estimé à un montant d’environ 100 millions d’euros, suivi des machines qui s’adresse à toute l’industrie algérienne et en dernier, le ferroviaire, ainsi que la plasturgie. Nous avons été parmi les premiers pays à collaborer à la réalisation du rail algérien, durant les années 80. Concernant les exportations, elle se résume beaucoup plus en pétrole. D’ailleurs, le taux des exportations a augmenté de 43% durant l’année dernière, en dépit de la chute des prix du pétrole.
Dans le mémorandum d’entente signé entre l’Algérie et l’Autriche, en 2013, figurent plusieurs projets de partenariats. Combien de projets ont été réalisés depuis cette signature ?
En effet, nous avons au programme plusieurs projets de partenariats dans divers secteurs et domaines. Nous souhaitons, prochainement, réaliser un projet de jumelage avec l’Agence Nationale de Promotion du Commerce Extérieur (Algex), dans l’objectif d’inciter les exportateurs algériens à explorer le marché autrichien. Pour faire connaître ce marché aux investisseurs algériens et accélérer les démarches d’échanges, nous avons invité le FCE et Algex à participer au premier séminaire qui se déroulera à Vienne, en Autriche, pour la promotion des relations économiques entre nos deux pays. Cette délégation assistera, entre autres, à des séances de BtoB pour mieux se rapprocher des investisseurs autrichiens et inversement. Cette action consiste à inciter les entrepreneurs des deux pays à investir et profiter du potentiel existant.
En Algérie, nous avons relevé l’existence d’un potentiel important dans le domaine de l’industrie légère, à savoir le métal, l’électronique ainsi que l’agroalimentaire. L’objectif sera d’encourager la production des produits finis afin de les exporter. Pour mieux réussir ce défi, le producteur algérien doit valoriser sa production au niveau national d’abord car la mise en valeur du produit local fait défaut sur le marché algérien. Pour corriger les idées reçues sur le produit algérien, il faut éduquer le consommateur algérien sur l’importance de consommer le produit national afin de lui donner de la valeur ajoutée. Pour booster nos relations de coopération, nous procédons par l’organisation de visites d’affaires au profit de nos investisseurs. Depuis la signature de cette convention, nous avons organisé plusieurs visites, notamment, dans les structures agricoles pour initier les hommes d’affaires algériens aussi aux différents projets éventuels, dans le secteur de l’agriculture. Nous proposons à travers ces programmes notre savoir-faire technique. Nous sommes dans la bonne voie.
Aujourd’hui, nous comptons, en Algérie, 16 entreprises autrichiennes dont deux nouvelles installées récemment, comme la société Kapsch et un bureau d’étude. Prochainement, nous signerons deux joint-ventures dans le secteur automobile et l’énergie renouvelable. Nous sommes à jour avec nos clients et partenaires, nous comptons près de 600 clients autrichiens que nous informons régulièrement sur le climat des affaires en Algérie. Le nombre de nos clients a augmenté de 5%, en 2014. Cela témoigne de l’intérêt que portent les investisseurs autrichiens au marché algérien, qui pourrait devenir d’ici quelques années la porte d’accès au marché africain.
Qu’est-ce qui retarde la concrétisation du projet d’investissement de la ferme-pilote qui devrait se situer dans la wilaya de Khenchela ?
Le projet est toujours en cours, mais nous n’avons pas encore établi la date de son lancement. Nous essayons, actuellement, d’obtenir les données de précipitations auprès de la Société de Gestion des Participations Production Animale (Proda), dans l’objectif d’analyser le sol pour définir le type de produit que nous allons utiliser. C’est une étape primordiale pour établir la base de l’investissement. Depuis la formulation de la demande, il y a un an, nous n’avons toujours pas eu de suite. Sans ces analyses et résultats, nous ne pouvons pas entamer notre projet de ferme-pilote qui vise à encourager l’élevage bovin qui sera destiné à la consommation. Cependant, pour réussir notre projet d’élevage il faut leur assurer une alimentation appropriée, raison pour laquelle nous insistons sur l’étude du sol pour définir le type de plantation. Nous souhaitons réaliser cette ferme-pilote car elle nous permettra de séduire les agriculteurs algériens et nous offrira d’autres opportunités. Notre souci est d’aider l’Algérie à devenir auto-suffisante. Le projet sera accompagné de plusieurs programmes de formation techniques visant à initier les éleveurs algériens au projet et les aider à investir plus et sur le long terme, dans l’avenir.
Etes-vous intéressés par la création d’une chambre de commerce mixte afin d’accompagner votre représentation commerciale Advantage Austria, installée en Algérie, depuis 1962 ?
Le bureau a été installé en Algérie depuis 1962, pour des raisons sécuritaires de la décennie noire, il a été délocalisé à Tunis, mais a rouvert à Alger, en 2001. Notre bureau est le représentant officiel de l’économie et le commerce extérieur de l’Autriche en Algérie. Nous fournissons des services d’information, d’orientation et de conseil général et sectoriel pour les entreprises autrichiennes et algériennes pour promouvoir les relations économiques et commerciales bilatérales et renforcer celles déjà existantes. Notre équipe est constituée de 10 personnes, mais arrive à collecter et répondre aux besoins de nos entreprises, en Autriche même en Algérie. Concernant la création d’une chambre de commerce mixte comme l’ont fait la France et l’Allemagne, nous ne sommes pas intéressés, pour l’instant par ce projet. Advantage Austria effectue les mêmes tâches qu’une chambre du commerce.
Samira Bourbia