Plus de trois semaines après son installation, la commission de médiation et de dialogue, le panel, se cherche. Devant accueillir des “personnalités” de divers horizons, sa composante est restée quasiment à son état initial.
Jusqu’à hier soir, la composante de l’équipe à Karim Younès n’a pas enregistré les “recrues” espérées. De l’appel lancé pour 23 personnalités nationales, seulement cinq ont accepté de se joindre au groupe. Il s’agit d’Abderrazak Guessoum, de Hadda Hazem, d’Ammar Belhimer, de Mohamed Bekkat-Berkani et de Mokhtar Bensaïd. Mais aucune des personnalités qui font l’actualité ces derniers mois n’a accepté de rejoindre le groupe. Ni Ahmed Taleb Ibrahimi, ni Mouloud Hamrouche, ni Ahmed Benbitour, ni Mostefa Bouchachi n’ont répondu favorablement à l’appel du panel. Et selon des sources médiatiques, même Abdelaziz Rahabi, pourtant favorable à un dialogue autour de l’organisation d’une élection présidentielle, a refusé de se joindre au panel à cause, notamment, de la persistance des restrictions imposées aux manifestants et aux médias et à cause du maintien du gouvernement Bedoui. Jusqu’à hier soir, l’ancien diplomate était injoignable.
En plus du refus populaire qui fait fuir beaucoup d’acteurs, l’absence de perspectives politiques pour le pays n’encourage pas beaucoup de personnalités à participer au dialogue. Beaucoup ne veulent pas s’impliquer, en effet, dans un processus dans lequel le pouvoir est impliqué. Pis encore, les différentes intrusions de l’armée dans le débat autour du dialogue et des solutions à la crise ont fini par refroidir les plus enthousiastes. Beaucoup ont conclu que le pouvoir n’a pas une réelle volonté de changer la situation. Cela complique davantage la mission de l’équipe à Karim Younès. Outre le manque d’enthousiasme autour de cette mission de dialogue, le panel fait face à un rejet quasi systématique de la classe politique. Tous les partis de l’opposition, en dehors de certaines formations qui ont participé à la conférence du 6 juillet, ont refusé de parler avec la commission de médiation. Les personnalités politiques les plus en vue ne veulent pas non plus se joindre à cette initiative.
Certaines, à l’image d’Ahmed Benbitour, estiment même que l’heure n’est pas au dialogue, mais plutôt “aux négociations sur les conditions du départ du système”. Des formations, qui ont joint leurs efforts à ceux qui défendent l’option d’une élection présidentielle, ont fini par annoncer publiquement leur renoncement au dialogue après le récent discours d’Ahmed Gaïd Salah. Sur le terrain, l’équipe que coordonne Karim Younès tente, tant bien que mal, de nouer des contacts.
Pour l’heure, il s’agit de rencontres plutôt informelles qui visent beaucoup plus à gagner du temps en attendant probablement la satisfaction des “promesses” formulées par le chef de l’État autour des préalables posés au dialogue. Mais le canevas rendu public cette semaine par le panel montre que Karim Younès et son équipe naviguent plutôt à vue. Car, le but recherché par cette entreprise, à savoir une conférence nationale de dialogue, est difficile à atteindre avec ces éléments. Un dialogue qui ne réunit pas un maximum d’acteurs politiques n’en est pas un.
Ali Boukhlef