Les responsables de l’Agence nationale des autoroutes avaient annoncé en grande pompe la “modernisation prochaine” de ce tunnel, afin qu’il soit au diapason du système Eurocodes
Mis en service en 2009 avec plusieurs mois de retard et livré avec des équipements de sécurité et de trafic relativement désuets, le tunnel de Djebahia, situé sur l’axe autoroutier reliant Bouira à Lakhdaria, est devenu impraticable. Tout au long de ses 1 300 mètres linéaires et dans les deux sens (Bouira-Alger et Alger-Bouira), les deux tubes sont complètement dégradés. En effet, la chaussée est entièrement bosselée et craquelée, l’éclairage réduit à son strict minimum, le système de ventilation est quelquefois défaillant, etc. Une multitude de carences qui constituent un réel danger pour les milliers d’automobilistes qui l’empruntent quotidiennement. D’ailleurs, nombre d’accidents ont lieu au niveau de ce tunnel et qui auraient pu provoquer de véritables drames.
Un tunnel à haut risque
Le dernier en date remonte au 10 mai dernier, lorsqu’un immense carambolage impliquant une dizaine de véhicules s’est produit à l’intérieur de ce tunnel. Deux mois avant, le 17 février, un autre carambolage impliquant un camion et quatre véhicules a causé la mort d’une personne et des blessures à sept autres. En 2012, un bus de transport de voyageurs a littéralement pris feu dans le tunnel et si ce n’était l’intervention rapide de la Protection civile, les 52 passagers auraient pu mourir d’asphyxie, tant le système de ventilation était en panne ce jour-là. Sous d’autres cieux, un tel sinistre aurait conduit la fermeture du tunnel et l’ouverture d’une enquête, comme ce fut le cas en France dans les années 2000, où un gigantesque incendie s’est déclaré au niveau du tunnel de Fréjus (reliant la France à l’Italie) et qui avait fait 39 morts. Les autorités des deux pays avaient pris la décision immédiate de fermer le tunnel et d’ouvrir une enquête pour homicide involontaire et mise en danger de la vie d’autrui. En Algérie, on a généralement tendance à attendre le pire avant d’agir.
Onze millions d’euros et silence radio de l’ANA
Quoi qu’il en soit, le 3 septembre 2015, les responsables de l’Agence nationale des autoroutes (ANA) avaient annoncé en grande pompe la “modernisation prochaine” de ce tunnel, afin qu’il soit au diapason du système Eurocodes. Pour ce faire, l’ANA avait conclu un contrat de 11 millions d’euros avec un consortium algéro-espagnol (Cosider-Indra).
Cette modernisation devait inclure l’installation d’un système de gestion centralisé, un système de détection automatique d’incidents, une surveillance par CCTV, des systèmes de signalisation et la réfection de la chaussée. Le tout pour un délai qui ne devait pas excéder les 15 mois. Nous sommes en septembre 2016 et rien de tout cela n’a été mis en œuvre. Pas l’ombre d’un ouvrier ou d’engin. Seuls quelques agents de la DTP de Bouira, qui effectuent quelques menus travaux de rafistolage.
Dans le but d’en savoir plus sur ce dossier et les raisons de ce retard, attache a été prise avec Cosider. Les responsables de cette entreprise nous ont indiqué que seule l’ANA est habilitée à communiquer à ce sujet. Soit, mais à cette agence et lors de nos multiples tentatives de joindre son chargé de communication ou encore son directeur, personne n’a daigné répondre à nos questions.
Congestion de projets en latence
Selon des informations provenant de la DTP de Bouira, le consortium algéro-espagnol est gêné, voire paralysé par les travaux de réhabilitation des fameux cinq kilomètres de Djebahia. Un chantier qui traîne depuis deux ans. “Il faudrait que l’ETRHB livre au moins 80% de son chantier pour que les espagnols puissent entamer le leur. De plus, la mise à niveau du tunnel de Djebahia va impliquer sa fermeture et la déviation du trafic vers la RN5.
Or, cette déviation est bloquée par les travaux de la pénétrante de Tizi Ouzou”, explique une source de la DTP de Bouira. Et d’ajouter : “Déjà avec deux chantiers sur un si petit tronçon, ce n’est pas évident, alors qu’est-ce que cela va être avec la fermeture du tunnel de Djebahia ?”, s’est-elle interrogée. À en croire cette source, Cosider et les Espagnols d’Indra trépigneraient d’impatience et n’attendraient qu’une seule chose, que l’ETRHB-Haddad livre enfin son projet.