L’Expression: On entend souvent parler de variétés et des procédés de leur obtention, mais, en réalité, nous ne savons pas exactement comment ils sont élaborés. Comment passe-t-on d’une variété instable à une variété stable génétiquement. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point?
M. Kheddam: Effectivement, pour le grand public, il y a des ambiguïtés. Et sur ce point, permettez-moi de vous informer que le pain issu du grain de consommation passe par près de 15 années d’expérimentation avant de parvenir au consommateur. En fait, il y a toute une procédure et catégorisation dans l’élaboration de la variété. En céréaliculture et en culture de pomme de terre, par exemple, nous prenons pour point de départ, durant la première année, une petite qualité qui est multipliée pour donner la première génération, avec un rendement de 30 à 40 quintaux.
Si après contrôle, elle ne répond pas aux normes requises, cette génération sera encore multipliée pour donner une deuxième et une troisième génération. Après ces trois années de multiplication, nous obtenons un matériel végétal de «pré-base». A ce moment-là, nous avons suffisamment de matériel végétal pour passer aux essais de plein champ pour l’obtention d’un matériel dit «de base». Là, nous sommes à la quatrième génération.
Et c’est là que le flambeau est passé aux multiplicateurs de la certification, donc on va avoir une reproduction: RU. Ensuite la reproduction 2. Et enfin aboutir chez l’agriculteur, qui va encore une fois la multiplier. Toutes les personnes qui interviennent dans le procédé de multiplication d’une variété disposent d’un agrément. Et pour obtenir un élément aussi noble que la semence, la norme doit être relativement précise. C’est pourquoi, nous veillons à ce que cet itinéraire soit suivi et respecté. C’est notre rôle principal.
L’Expression: Justement, vous parlez de multiplication d’une variété donnée, pouvez-vous nous expliquer la provenance des différents types de variétés? Y a -t-il une création variétale en Algérie ou s’agit-il juste d’une multiplication des variétés déjà existantes?
En fait, cela dépend de la variété en question. Pour les semences de céréales, nous disposons d’un institut technique qui produit le matériel de «pré-base» et «de base» en quantité suffisante. Depuis 1994 à ce jour, nous avons instauré une sorte d’autosuffisance. Tout au long de cette période, nous n’avons importé que de faibles quantités de semences de variétés nouvellement homologuées.
Nous pouvons dire que 99.5% de la semence sont issus de la production locale. Aussi et concernant la pomme de terre, nous avons une production à partir de la toute première génération, mais nous avons aussi une importation de 20 à 30% de matériel «de base». Et c’est ce dernier qui est multiplié chez nous deux ou trois fois pour aboutir à 100%. Aussi, nous produisons des plants à des pourcentages allant jusqu’à 90% et nous avons de 10 à 15% d’appoint en fonction du programme.
Pour ce qui est des semences maraîchères, c’est une autre paire de manches. Il s’agit, principalement, de semences hybrides importées à des taux de 80% à 90%. Et actuellement en Algérie, nous ne sommes pas en mesure de produire des hybrides. Car tout d’abord, cela demande une recherche très poussée et nous ne sommes pas à ce niveau-là, en plus les lignées parentales de ces hybrides ne sont connues que de leurs créateurs. C’est pourquoi, nous ne disposons que de variétés classiques, dite «fixées». Dans un sens, le recours à de la semence hybride, nous rend dépendant du marché extérieur.