Le procès en appel de la caisse principale de Khalifa Bank entame aujourd’hui sa troisième semaine avec la poursuite des auditions des prévenus poursuivis pour délits de corruption, trafic d’influence et perception d’avantages indus. Des auditions qui s’achèveront mercredi à raison de huit comparutions par jour. Depuis jeudi, c’est au tour des témoins de défiler à la barre du tribunal criminel près la Cour de Blida.
Le procès a particulièrement été marqué par l’insistance du représentant du Ministère public quant aux raisons qui ont poussé les entreprises publiques à déposer leurs fonds ou du moins une partie à la Khalifa Bank. Mohamezd Zerguerras trouvait anormal que les taux d’intérêt pour les dépôts étaient à 11,5%, tandis que celui pratiqué pour le crédit ne dépassait pas les 5,5%. Il a tarabusté les accusés qui n’ont pas réussi à le convaincre (c’est du moins ce qu’il laissait transparaitre) en lui brandissant les différentes conventions, mais en lui expliquant aussi qu’ils avaient pour la plupart d’entre eux, reçu des directives de leurs hiérarchies respectives de faire fructifier les fonds et prospecter les banques qui offraient les meilleures conditions. A l’image de Ali Aoun qui a exhibé au juge la correspondance du directeur général du Holding public chimie, pharmacie, services en date du 17 décembre 2000 dans laquelle on peut lire : (…) Nous vous demandons de bien vouloir diversifier vos relations tant en matière d’assurances qu’en matière de placement et de dépôts à terme de vos excédents de trésorerie (…) ».
Qu’il s’agisse des responsables des entreprises pétrolières ou celles des médicaments ou encore celles des boissons alcoolisées ont tous affirmé avoir agi dans l’intérêt de l’entreprise. Ils en veulent pour preuve le fait qu’à leur départ le solde était excédentaire.
Les banques publiques remboursées
« Harcelés » par le procureur général qui ne comprenait pas pourquoi ils n’avaient pas demandé ses bilans à Khalifa Bank avant de procéder aux dépôts, les accusés ont répondu que cette banque était agréée et qu’elle était sous le contrôle de la commission bancaire et de la Banque d’Algérie. Excédés par l’insistance du parquetier et sentant comme ils nous l’ont affirmé qu’ils allaient être de nouveau des boucs émissaires, certains ont déclaré au tribunal criminel que même les banques publiques ont déposé toutes réunies l’équivalent de 60 milliards de dinars à Khalifa Bank et qu’elles ont été remboursées par l’administrateur.
Victime de son nom
M. Amarouchene a comparu de nouveau devant le tribunal sans comprendre pourquoi. On lui impute la responsabilité de l’ENAFOR, alors qu’il n’était pas plus qu’un consultant financier pour le compte d’un cabinet privé. Le procureur lui soutient qu’il connait Moumène Khalifa, puisqu’il porte le même nom que son ex-épouse qui s’appelle Amirouchene. Le prévenu est choqué et corrige le tribunal. Comme quoi une simple lettre d’alphabet peut changer le cours de la vie d’une personne pour la transformer en drame.
Il en est de même pour les homonymes. Le cas s’est posé aujourd’hui pour Bourahla Hamid, ex-directeur de GBA El Harrach, dont l’entreprise n’a pas déposé d’argent à Khalifa mais ouvert un compte courant pour faciliter les escomptes. De l’argent récupéré. Mais le PG commence à lui égrener une liste de prénoms avec le patronyme Bourahla. Étonné, le concerné dément. C’est dire que ce n’est pas la première fois que le parquet commet des erreurs même s’en est excusé par la suite. C’est ce qui a fait dire à plusieurs robes noires que le procès a perdu de sa substance.
En parlant de robes noires qui se distinguent particulièrement lors de cette affaire : S’il est des avocats qui même sachant leurs clients coupables s’échinent à leu obtenir des peines légères, ce n’est pas le cas du défenseur de Rafik Abdelmoumène Khalifa. Me Lezzar est le seul à être convaincu que son mandant est innocent et qu’il a fait l’objet d’une cabale. Il va plus loin en affirmant que la banque n’a pas subi de faillite. « En fait nous dit-il, mon client n’est pas l’accusé principal, mais la victime principale et je le prouverai », conclut l’avocat qui ne rate pas l’occasion de saisir la perche tendue indirectement par un prévenu sur les avantages qu’offrait la banque de son client pour rebondir en questions.
Faouzia Ababsa