L’Algérie devra être attentive à toutes ces stratégies gazières où sa part de marché vers l’Europe étant passé de 13% en 2007/2008 à 8% en 2017, avec la concurrence également de la Russie, de la Norvège et du Qatar dont la part de marché est passée de 2% vers les années 2000 à plus de 7% en 2017, concurrençant le GNL algérien proche également de l’Asie ayant massivement investi dans les GNL de grandes capacités étant le premier producteur-exportateur mondial de GNL. Des actions coordonnées doivent être mises en place dans le cadre d’une vision stratégique de développement tenant compte des nouvelles mutations mondiales.
Par Dr Abderrahmane MEBTOUL.
Il faut relever que la consommation d’énergie a été pour 2017 : ménages, 44%, transport 33% et Industrie BTP 22% contrairement aux pays développés. Se pose cette question centrale, quel sera le prix de cession du gaz des unités mises installées notamment engrais phosphate, sidérurgie fortes consommatrices d’énergie ? D’où l’importance dès maintenant de prévoir un nouveau modèle de consommation énergétique axée sur un Mix énergétique et la transition énergétique .
Premier axe, améliorer l’efficacité énergétique par une nouvelle politique des prix occasionnant un gaspillage des ressources renvoyant au dossier que j’ai dirigé sur le dossier carburant , avec le bureau d’études américain Ernest Young et avec les cadres du Ministère de l’Energie et de Sonatrach que j’ai présenté personnellement à la commission économique de l’APN en 2008, renvoyant à une nouvelle politique des prix ( prix de cession du gaz sur le marché intérieur environ un dixième du prix international occasionnant un gaspille des ressources qui sont gelées transitoirement pour des raisons sociales.
C’est la plus grande réserve pour l’Algérie, ce qui implique une révision des politiques de l’habitat, du transport et une sensibilisation de la population. L’on doit durant une période transitoire ne pas pénaliser les couches les plus défavorisées. A cet effet, une réflexion doit être engagée pour la création d’une chambre nationale de compensation, que toute subvention devra avoir l’aval du parlement pour plus de transparence. Une chambre devant réaliser un système de péréquation, tant interrégionale que socioprofessionnelle, segmentant les activités afin d’encourager les secteurs structurants et tenant compte du revenu par couches sociales, donc une nouvelle politique salariale.
Deuxième axe, ne devant pas être utopique , continuer à investir dans l’amont afin d’éviter le déclin de la production , supposant pour attirer les investisseurs étrangers, étant dans un système concurrentiel mondial, une révision de la loi des hydrocarbures de 2013, inadapté à la conjoncture actuelle, notamment en volet fiscal, pour de nouvelles découvertes. Mais pour la rentabilité de ces gisements tout dépendra du vecteur prix au niveau international et du coût, pouvant découvrir des milliers de gisements non rentables.
L’Algérie comme montré précédemment, pour voir une valeur ajoutée importante doit s’orienter vers la transformation de son pétrole et du gaz naturel mais dans le cadre d’un partenariat gagnant- gagnant, la pétrochimie à l’instar d’autres filières, les circuits de commercialisation étant contrôlées par quelques firmes multinationales.
Troisième axe, développer les énergies renouvelables combinant le thermique et le photovoltaïque avec pour objectif d’ici 2030, produire, 30 à 40% de ses besoins en électricité à partir des énergies renouvelables où selon des études de l’Université des Sciences et Technologies d’Alger (USTHB), le potentiel photovoltaïque de l’Algérie est estimé à près de 2,6 millions de térawatt heures (TW/h) par an, soit 107 fois la consommation mondiale d’électricité et en énergie éolienne, l’Algérie bénéficie aussi d’un potentiel énergétique important, estimé à près de 12 000 térawatts/heure (TWh) par an. Cette même étude estime qu’avec un taux moyen de consommation de 260 m3 /MWh, le potentiel algérien en énergies renouvelables serait équivalent à une réserve annuellement renouvelable de gaz naturel de l’ordre de 700 000 Milliards de m3.
Avec plus de 3 000 heures d’ensoleillement par an, l’Algérie a tout ce qu’il faut pour développer l’utilisation de l’énergie solaire, ou presque. Le soleil tout seul ne suffit pas. Il faut la technologie et les équipements pour transformer ce don du ciel en énergie électrique. Aussi le défi algérien est-il d’avoir le budget et les technologies nécessaires pour, d’abord, financer la fabrication de panneaux solaires et, ensuite, subventionner, du moins en partie, leur installation à grande échelle. Car les panneaux solaires ne sont pas disponibles sur le marché, et quand bien même ils le seraient, il est quasi impossible pour un particulier d’assumer les charges d’une installation solaire.
Le retard dans l’exploitation de l’énergie solaire est indéniable Adopté en février 2011 par le Conseil des ministres, le programme national des énergies renouvelables algérien prévoit une introduction progressive des sources alternatives, notamment le solaire avec ses deux branches (thermique et photovoltaïque), dans la production d’électricité sur les 20 prochaines années Dans cette perspective, la production d’électricité à partir des différentes sources d’énergies renouvelables dont l’Algérie compte développer serait de 22.000 mégawatts à l’horizon 2030, soit 40% de la production globale d’électricité.
Sur les 22.000 MW programmés pour les deux prochaines décennies, l’Algérie ambitionne d’exporter 10.000 MW, alors que les 12.000 MW restants seraient destinés pour couvrir la demande nationale. Une fois réalisé, ce programme permettra d’économiser près de 600 milliards de mètres cubes de gaz sur une période de 25 années.
L’Algérie a réceptionné en mi-juillet 2011 la première centrale électrique hybride. D’une capacité globale de 150 MW, dont 30 MW provenant du solaire, cette centrale, a ainsi ouvert le chapitre des projets en cours ou en maturation pour le passage de l’Algérie à des sources d’énergies alternatives. Au moins, six centrales du même principe, mais dont la part du solaire serait de plus en plus importante, sont programmées juste pour les neuf prochaines années, ce qui permettra de lever progressivement la contribution des énergies renouvelables dans la satisfaction des besoins internes en électricité.
Outre une nouvelle politique des prix, Sonatrach ne pouvant assurer à elle seule cet important investissement, (environ 100 milliards de dollars entre 2018/2030), il y a lieu de mettre en place une industrie nationale dans le cadre d’un partenariat public-privé national/international, supposant d’importantes compétences. Celle-ci doit comprendre tous les éléments de la chaîne de valeur renouvelable, dont l’ingénierie, l’équipement et la construction afin d’accroître le rythme de mise en œuvre, des études sur la connexion de ces sites aux réseaux électriques.
Quatrième axe, l’Algérie compte construire sa première centrale nucléaire en 2025 pour faire face à une demande d’électricité galopante, où selon le 19 mai 2013 du ministre de l’Energie et des Mines, l’Institut de génie nucléaire, créé récemment, devant former les ingénieurs et les techniciens en partenariat, qui seront chargés de faire fonctionner cette centrale. Les réserves prouvées de l’Algérie en uranium avoisinent les 29 000 tonnes, de quoi faire fonctionner deux centrales nucléaires d’une capacité de 1000 Mégawatts chacune pour une durée de 60 ans, selon les données du Ministère de l’Energie.
La ressource humaine étant la clef à l’instar de la production de toutes les formes d’énergie et afin d’éviter cet exode de cerveaux massif que connait l’Algérie.
Cinquième axe, est l’option du pétrole/gaz de schiste horizon 2022/2025. Selon une nouvelle étude de l’Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures selon l’agence des hydrocarbures Alnaft, l’Algérie passe de la 11e à la 7e place dans le classement mondial des réserves de pétrole de schiste. L’étude classe ainsi l’Algérie après la Russie, les Etats-Unis, la Chine, l’Argentine, la Libye et l’Australie, avec des réserves estimées actuellement à 1 194 milliards de barils de pétrole, contre 176 milliards dans les anciennes études réalisées dans la période 2012-2013.
Pour ce qui est des réserves en gaz de schiste, la même étude reclasse l’Algérie à la troisième position après les Etats-Unis et la Chine, avec une réserve estimée à 9 818 TCF (Trillion cubic feet), contre 6 025 TCF dans les anciennes études. Dossier que j’ai l’honneur de diriger pour le compte du gouvernement où nous avons posé la nécessité de la révision de la loi des hydrocarbures de 2013, et remis en janvier 2015. En Algérie, devant éviter des positions tranchées pour ou contre, l’adhésion des populations locales par un dialogue productif est nécessaire car on ne saurait minimiser les risques de pollution des nappes phréatiques au Sud du pays. L’Algérie étant un pays semi-aride, le problème de l’eau étant un enjeu stratégique au niveau méditerranéen et africain, doit être opéré un arbitrage pour la consommation d’eau douce des populations et celle utilisée pour cette production.
Selon l’étude réalisée sous ma direction, les nouvelles techniques peu consommatrices d’eau et évitant l’injection de produits chimiques dans les puits devraient être mises au point opérationnelle horizon 2022/2025 car actuellement avec la fracturation hydraulique classique il faudrait environ un milliard de mètres cubes gazeux environ 1 million de mètres cubes d’eau douce, devant tenir compte de la durée courte vie des puits (cinq ans maximum) et devant perforer des centaines pour avoir un milliard de mètres cubes gazeux
En résumé, l’énergie apparaît donc aujourd’hui comme un puissant facteur de coopération et d’intégration entre les deux rives de la Méditerranée. .L’énergie autant que l’eau est cœur de la sécurité des Nations. Le monde s’oriente 2020/2030, inéluctablement vers un nouveau modèle de consommation énergétique fondé sur la transition énergétique.
La transition énergétique en Algérie est un choix stratégique politique, militaire, et économique pour assurer la sécurité énergétique du pays qui se fera progressivement, car il est incontestable que les gisements fossilifères du pays commencent à se tarir alors que la consommation énergétique nationale est en croissance importante et va continuer de l’être. C’est dans ce cadre que l’Algérie qui a un rôle stratégique à jouer , participera à la réunion des 5+5 au sommet de la société civile des deux rives de la Méditerranée qui se tiendra à Marseille le 24 juin 2019 où j’ai été désigné par son Excellence le Président de la République, Monsieur Abdelaziz BOUTEFLIKA pour diriger la délégation des 10 ONG algériennes, tenant à le remercier pour la confiance témoignée, où je présiderai la commission , la plus importante dévolue à l’Algérie, «la transition énergétique au sein de l’espace des 5+5 ». .
Comme j’ai eu à l’affirmer au cours de différentes conférences internationales, contrairement à ce qui a été rapporté l’Algérie honorera ses engagements internationaux jusqu’à 2030 sous réserve de la mise en place d‘une véritable transition énergétique. Le co-développement, les co-localisations, qui ne sauraient se limiter à l’économique, incluant la diversité culturelle, peuvent être le champ de mise en œuvre de toutes les idées innovantes au niveau de l’espace méditerranéen, pont entre l’Europe et l’Afrique.
L’Algérie, pays à fortes potentialités énergétiques, au niveau de l’espace méditerranéen et africain possède toutes les potentialités pour être un vecteur actif sur la base d’un contrat gagnant/gagnant afin de faire de cet espace un lac de paix et de prospérité partagé.