Un triple attentat-suicide a fait au moins 15 morts lundi lors d’une distribution alimentaire dans un camp de déplacés du nord-est du Nigeria, épicentre des activités du groupe djihadiste nigérian Boko Haram, a-t-on appris de sources concordantes.
«Il y a eu deux premières explosions à 11h10 (1010 GMT) ce matin dans le village de Mashalari (Etat du Borno), qui ont fait 15 morts et 43 blessés», a rapporté un employé d’une organisation humanitaire sous couvert d’anonymat, ajoutant qu’un autre kamikaze s’est fait exploser quelques minutes plus tard à proximité, sans faire de victime. Les trois kamikazes étaient des femmes selon lui. Babakura Kolo, un membre des milices civiles qui luttent contre Boko Haram a confirmé que «selon nos premières informations, au moins 15 personnes ont été tuées et beaucoup d’autres ont été blessées».
«Nous avons envoyé des équipes sur place», a-t-il assuré à l’AFP. Le village de Mashalari se situe dans le district de Konduga, à une vingtaine de kilomètres de la capitale du Borno, Maiduguri, district qui a été la cible de nombreuses attaques de Boko Haram depuis début août. Mi-août, un triple attentat-suicide, également perpétré par des femmes kamikazes, avait fait 28 morts et plus de 80 blessés dans la même zone, également à la sortie d’un camp de déplacés.
Ces dernières semaines, Konduga a connu de nombreuses attaques sporadiques, visant des agriculteurs ou des villageois, accusés par le groupe djihadiste d’être des informateurs pour l’armée nigériane. Le conflit de Boko Haram, particulièrement meurtrier dans la région du lac Tchad, a fait plus de 20.000 morts et 2,6 millions de déplacés depuis que le groupe extrémiste a pris les armes en 2009.
Prix du HCR pour le négociateur de la libération des filles de Chibok
Un avocat nigérian a reçu lundi la distinction Nansen du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) pour sa participation aux négociations de la libération d’une centaine de lycéennes de Chibok, enlevées en 2014 par le groupe djihadiste nigérian Boko Haram. Zannah Mustapha a reçu la prestigieuse distinction onusienne après avoir joué «un rôle crucial de médiation» dans les pourparlers entre le gouvernement nigérian et Boko Haram, ainsi que pour son travail en général avec les enfants victimes du conflit dans le nord-est du Nigeria. M. Mustapha, 57 ans, s’est dit «extrêmement heureux» d’avoir été choisi.
«Je me réjouis d’être un ambassadeur digne de cette distinction si noble», a-t-il confié à l’AFP, depuis la capitale fédérale d’Abuja. L’avocat est une figure importante dans le nord-est du Nigeria, région dévastée par près de 10 ans de conflit. Il a notamment fondé l’école The Future Prowess Islamic Foundation School, qui vient en aide aux enfants victimes de l’extrême pauvreté ou rendus orphelins à cause de la guerre. L’école, qui ne comptait que 36 enfants lors de son ouverture il y a dix ans, accueille désormais 540 élèves, dont la moitié sont des filles.
L’année dernière, une seconde école a été construite dans la capitale de l’Etat du Borno, Maiduguri, où 88 enfants, à la fois des enfants de combattants de Boko Haram, des déplacés civils du conflit et les enfants de soldats de l’armée nigériane, étudient côte à côte. «C’est un endroit, où ce qui importe, c’est l’enfant. Peu importe sa religion, sa famille ou sa communauté. Notre rôle est d’avoir un impact positif dans leur vie», a expliqué son fondateur au HCR de Genève. M. Mustapha a également été rendu célèbre dans le Borno, pour avoir représenté, en tant qu’avocat, la famille de Mohammed Yusuf, le fondateur de la secte rigoriste islamiste Boko Haram, après qu’il ait été tué en garde à vue en 2009.
Cette position lui a valu d’être impliqué dans de nombreuses négociations avec le groupe, particulièrement meurtrier depuis qu’Abubakar Shekau en a repris le commandement en 2009. M. Mustapha a participé à celle qui fut sans doute la plus médiatisée, la libération de quelque 100 jeunes filles de Chibok, kidnappées par les insurgés en avril 2014. Une autre centaine d’entre elles restent toujours entre leurs mains, et selon l’avocat, des pourparlers sont actuellement en cours. Il se dit «confiant à 100%» qu’elles puissent bientôt être libres.
«Après 8 ans de violence, tout le monde dans le Borno ne veut qu’une chose: la paix», explique l’avocat. «Et nous y travaillons.» L’année dernière, 2.000 bénévoles venant en aide aux migrants qui traversent la mer Méditerranée pour venir en Europe avaient reçu la distinction Nansen du HCR.