“La transmission génétique y est pour quelque chose”, relèvera le Pr Majid Tabti, qui a insisté sur l’amélioration du dépistage précoce et la pertinence du diagnostic pour lutter contre cette maladie.
L’autisme est un phénomène pathologique en nette croissance en Algérie. Les statistiques disponibles font ressortir une prévalence de croissance aussi bien exponentielle qu’inquiétante. La moyenne d’enregistrement de nouveaux cas s’est vertigineusement démultipliée ces dernières années, à telle enseigne que le président de la République a décidé la mise en place, dans les meilleurs délais, d’un plan national de l’autisme devant prendre en charge cette maladie lourde socialement. L’autisme sera ainsi la deuxième pathologie, en Algérie, qui bénéficie d’un plan national de prise en charge après le cancer. Une telle décision politique renseigne bien sur l’ampleur du phénomène qui menace directement la société.
Les experts et spécialistes présents, hier, à la rencontre organisée par le ministère de la Santé, à l’INSP, à l’occasion de la Journée mondiale de l’autisme, ont été unanimes à conclure que l’évolution de ce phénomène pathologique est effectivement inquiétante. À en croire le professeur Tabti, chef de service de pédopsychiatrie à l’EHS de Chéraga, le nombre de cas enregistrés en Algérie oscille entre 400 000 et 500 000. Ce chiffre effarant est calculé, dira-t-il, sur la base de la prévalence de croissance qui est en permanente augmentation. La prévalence, qui était, il y a une dizaine d’années, de 1 cas pour 10 000 habitants, est passée à présent à 1 cas pour 100 habitants. La situation est véritablement grave, dit-on. L’heure de la mutualisation des moyens et des actions pour juguler cette maladie a sonné, pour paraphraser le ministre de la Santé.
Lors de son intervention inaugurale, le Pr Mokhtar Hasbellaoui a rappelé que le chemin du traitement de la problématique des troubles autistiques est désormais balisé à la faveur de la mise en place du Comité national intersectoriel de l’autisme (Cnia) qui a été créé, en juillet 2016, pour répondre aux besoins des personnes souffrant d’autisme dans la société et de ceux de leurs familles respectives.
Le Cnia constitue, en fait, l’antichambre du plan national de l’autisme décidé par le premier magistrat du pays. Au passage, le ministre ne manquera pas de relever que les résultats de l’enquête épidémiologique lancée pour évaluer les conditions de prise en charge des autistes sont attendus pour bientôt. La prise en charge de cette communauté, qui s’agrandit malheureusement d’année en année, se résume principalement en l’inclusion scolaire et en les méthodes nécessaires à la prise en charge thérapeutique des cas d’autisme selon les différentes formes repérées. “La meilleure méthode à adopter est de s’occuper de ces cas à tous les niveaux”, devisera encore le ministre. En fait, les experts rencontrés hier à l’INSP s’accordent à dire qu’il n’existe point de méthodes clés en main pour tous les domaines de l’autisme.
Amélioration du dépistage précoce
Les techniques initiées jusque-là, notamment celles traitant du comportemental, ont néanmoins changé le visage de l’autisme qui fait “exploser” des couples, en franchissant la ligne de la séparation. “C’est toi l’épouse qui est à l’origine de notre malheur parce que tu as enfanté un autiste”, accusera, à tort, le papa-époux. Ce constat affligeant est une réalité dans notre société où des cas de divorce se sont multipliés ces dernières années.
Alors que les recherches scientifiques lancées pour diagnostiquer les causes exactes de l’autisme démontrent l’opposé des “conclusions” imprudentes des conjoints irresponsables. Plusieurs pistes traitant des raisons de la “généralisation” de cette pathologie sont ouvertes. Il est des chercheurs qui incriminent carrément la qualité des vaccins utilisés ces dernières années pour immuniser les enfants de 0 à 18 mois contre des maladies virales. D’autres experts imputent cet état de fait à la qualité de l’alimentation (la malbouffe).
D’autres études ont relevé le mariage tardif qui serait à l’origine de la constante croissance. Le facteur héréditaire est fortement incriminé à ce titre. D’ailleurs, on ne doit pas perdre de vue que l’âge du mariage a brutalement reculé, ces dernières années, en Algérie. “Ce constat est valable aussi bien pour la femme que pour l’homme puisque cette maladie se développe par les chromosomes issus de l’homme et de la femme. La transmission génétique y est pour quelque chose”, relèvera le Pr Majid Tabti, qui a d’ailleurs insisté sur l’amélioration du dépistage précoce et la pertinence du diagnostic. “Il faut savoir qu’on ne devient pas autiste, mais qu’on naît autiste. On doit axer nos efforts sur le repérage précoce des éventuels cas, pour assurer une prise en charge et accompagner les nouveaux cas dans leur vie sociale. Il existe trois formes d’autisme : légère, moyenne et sévère. C’est dans ce troisième cas de figure que les choses se compliquent puisqu’on aura affaire à des cas de surdité, de troubles ophtalmologiques ou encore des cas d’attardés mentaux.”
Au vu de la complexité de l’autisme qui est composite et non monolithe, la formation d’un personnel qualifié s’impose aujourd’hui et plus que jamais pour mener à bien les actions du repérage précoce des enfants qui présentent des signes cliniques d’autisme, entre l’âge de 24 à 30 mois. Les signes cliniques rappelés par les pédopsychiatres sont liés, notamment, aux troubles du langage et à l’isolement de l’enfant.
Hanafi H.