Par Nazim BRAHIMI
Il aura fallu vingt jours pour le chef de l’Etat sortant pour parvenir à nommer une nouvelle équipe exécutive. En effet, c’est le 11 mars qu’il a désigné Noureddine Bedoui et Ramtane Lamamra aux postes respectifs de Premier ministre et vice-Premier ministre. Ainsi, les noms des ministres devant conduire les affaires du pays jusqu’à la fin du mandat de
M. Bouteflika à la fin du mois d’avril ont été dévoilés.
Ce nouveau gouvernement appelle l’observation importante selon laquelle il a pris beaucoup de temps à voir le jour, signe de difficulté extrême expliquée sans doute par le contexte que vit le pays. Cette difficulté a été d’autant plus manifeste que le Premier ministre, M. Bedoui, s’est muré pendant ces vingt jours dans un silence dont le moins qu’on puisse dire est qu’il a été d’un effet anxiogène supplémentaire. Cela au moment où l’opinion nationale attendait sinon des explications ou alors des indications sur la manière de conduire les affaires courantes du pays.
Pour autant, l’arrivée de ce gouvernement n’est pas garantie d’un bon accueil quant à sa capacité de créer un nouveau climat susceptible de gérer correctement les dossiers et de susciter dans le champ politique actuel crisogène un appel d’air : une priorité actuellement, d’autant que ce qui a fait défaut depuis que le chef de l’Etat a installé M. Bedoui dans ses fonctions de Premiers ministre, c’est la confiance et l’absence d’adhésion à toute initiative venant du sommet.
En effet, beaucoup de noms du nouvel Exécutif sont des quasi anonymes aux yeux des Algériens, à l’exemple de Sabri Boukadoum, qui porte le lourd portefeuille des Affaires étrangères. Les initiés savent que ce diplomate de carrière a travaillé pendant longtemps dans le protocole du ministère avant d’être désigné ambassadeur d’Algérie à Lisbonne avant d’être représentant permanent de l’Algérie à l’ONU, son dernier poste. M. Boukadoum qui a travaillé avec Ramtane Lamamra et Abdelkader Messahel est pourtant le moins des inconnus dans le nouveau gouvernement. Certains font effet de surprise à l’image de Slimane Brahimi, ministre de la Justice, garde des Sceaux, et Raouf Bernaoui, ministre de la Jeunesse et des Sports ou encore Djamila Tamazirt, ministre de l’Industrie et des Mines, et Cherif Omari, ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche. Idem pour Kamel Beldjoud qui a hérité du ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville.
Ces nouveaux responsables, qui ne sont pas du tout connus du public, vont devoir faire preuve d’efficacité dans une conjoncture des plus délicates. D’autres patronymes dans cette nouvelle équipe sont, eux aussi, peu ou pas du tout connus et leurs profils ne manqueront pas de faire débat dès aujourd’hui.
En attendant, on retiendra du nouveau gouvernement, plusieurs enseignements.
Le premier et le plus important politiquement sans doute, c’est le maintien du chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, au poste de vice-ministre de la Défense. Une reconduction qui intervient au lendemain de son appel au Conseil constitutionnel d’étudier la possibilité de faire valoir les dispositions de la Loi fondamentale relative à l’empêchement du chef de l’Etat.
Le second enseignement, c’est le départ de Ramtane Lamamra, qui, au vu du communiqué publié hier, n’est plus vice-Premier ministre ni chef de la diplomatie par ailleurs, puisqu’il vient d’être remplacé par M. Boukadoum.
Le troisième enseignement concerne le départ certainement problématique de la ministre de l’Education nationale. Nouria Benghebrit quitte son département sans avoir achevé son programme de réforme. Elle s’en va à la veille de la préparation des examens de fin d’année scolaire. Son remplaçant est certes un de ses proches collaborateurs, cependant, on ne connaît pas encore ses aptitudes à gérer un ministère connu pour ses difficultés manifestées notamment par l’effervescence des syndicats autonomes.
Troisième enseignement, le départ de Youcef Yousfi, un fidèle parmi les fidèles de Bouteflika, et son remplacement par Djamila Tamazirt.
Autre nouveauté : la nomination de Hassane Rabhi au poste de ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, une double fonction qui s’avère, d’ores et déjà, très lourde pour son titulaire dès lors que c’est à lui que reviendra la charge de communiquer sur l’action de l’Exécutif dans un moment de crise aigüe et de marges très étroites.
Ce nouveau gouvernement ne manquera pas de susciter lectures et analyses qui seront certainement nombreuses d’ici à vendredi prochain, jour décisif du mouvement populaire de contestation du régime. D’ici là, on retiendra qu’il est composé de 27 ministres dont six reconduits. (lire ci-dessous la liste complète du nouveau gouvernement).
Liste des membres du nouveau gouvernement conduit par M. Bedoui
Noureddine Bedoui: Premier ministre.
Le général de Corps d’Armée Ahmed Gaïd Salah: vice-ministre de la Défense nationale, chef d’état-major de l’Armée nationale populaire.
Sabri Boukadoum: Ministre des Affaires étrangères.
Salaheddine Dahmoune: Ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du Territoire.
Slimane Brahmi: ministre de la Justice, garde des Sceaux.
Mohamed Loukal: ministre des Finances.
Mohamed Arkab: ministre de l’Energie.
Tayeb Zitouni: ministre des Moudjahidine.
Youcef Belmehdi: ministre des Affaires religieuses et des Wakfs.
Abdelhakim Belabed: ministre de l’Education nationale.
Bouzid Tayeb: ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.
Moussa Dada: ministre de la Formation et de l’Enseignement professionnels.
Meriem Merdaci: ministre de la Culture.
Houda Imane Feraoun: ministre de la Poste, des Télécommunications, des Technologies et du Numérique.
Raouf Bernaoui: ministre de la Jeunesse et des Sports.
Ghania Eddalia : ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la femme
Djamila Tamazirt : ministre de l’Industrie et des Mines
Cherif Omari: ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche
Kamel Beldjoud : ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville
Saïd Djellab : ministre du Commerce
Hassane Rabhi: ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement
Mustapaha Kouraba : ministre des Travaux publics et des Transports
Ali Hamam : ministre des Ressources en eau
Abdelkader Benmessaoud : ministre du Tourisme et de l’Artisanat
Mohamed Miraoui : ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière
Hassan Tidjani Haddam : ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale
Fethi Khouil: ministre des Relations avec le Parlement
Fatma Zohra Zerouati : ministre de l’Environnement et des Energies renouvelables.
En outre, conformément à l’article 92 alinéa 6 de la Constitution, Monsieur le Président de la République a également nommé ce jour, M. Ahmed Noui, ministre, secrétaire général du gouvernement.