Non, ce n’est pas une crise parlementaire mais une crise de régime

Non, ce n’est pas une crise parlementaire mais une crise de régime

Kharroubi Habib

Non, ce n’est pas une crise parlementaire mais une crise de régime
Pour une raison et un but sur lesquels il a évidemment fait silence, un cercle du pouvoir a instigué une révolte parlementaire visant à la destitution du président de l’Assemblée nationale. Mais alors qu’il s’attendait probablement à son issue rapide en tablant sur le fait que Saïd Bouhadja ne ferait pas résistance et s’inclinerait sans façon en donnant sa démission dont on lui a fait comprendre par allusion qu’elle est voulue par le chef de l’Etat lui-même, le cercle en question se retrouve confronté à un personnage moins malléable qu’il l’a cru et qui bénéficie à l’évidence du soutien d’un autre cercle du pouvoir prétendant lui aussi agir sous l’autorité de ce même chef de l’Etat.

De ce jeu de poker menteur auquel se livrent les deux camps, il en a résulte une paralysie de la chambre basse du Parlement qui dure depuis une quinzaine de jours dont l’interprétation par l’opinion publique est qu’elle ne perdure que parce qu’il y a vacance du pouvoir au sommet de l’Etat. Par la manière quasi souterraine dont les cercles de ce pouvoir qui se livrent bataille sur l’occupation du perchoir agissent pour se neutraliser, il ne fait plus de doute dans cette opinion publique que cette vacance est bel et bien actée et a donné lieu à une confiscation de l’autorité présidentielle dont chacun des cercles en compétition tente d’user au profit de ses objectifs. Ce qu’il lui fait par conséquent déduire que la crise qui a éclaté au sein de l’APN n’est que la séquence visible de celle qui doit faire rage dans les hautes sphères d’un pouvoir en déshérence et dont il faut attendre qu’elle produise un « clash » aux conséquences fatalement gravissimes pour le pays.

Lors de son intronisation pour un quatrième mandat, Bouteflika avait promis qu’il ferait tout pour que cette mandature se déroule dans un climat politique apaisé auquel il permettra de s’instaurer en faisant droit aux attentes populaires et à certaines revendications en la matière de l’opposition. En lieu et place de ce climat apaisé promis par lui, celui qu’a installé son quatrième mandat a été tout au long délétère, confiné à cela par la lancinante et inquiétante question du qui gouverne réellement le pays, soulevée par la certitude que s’est forgée la majorité des Algériens que son président n’est pas en capacité physique d’exercer les obligations de sa charge voire même d’avoir conscience de ce qui se décide en son nom. Ce n’est pas la cacophonie qui se fait entendre dans les hautes sphères qui prétendent parler en son nom, ni les cafouillages auxquelles donnent lieu les prises de mesures qui en émanent et encore moins le bidouillage de certaines de leurs initiatives qui pouvaient donner au quatrième mandat le climat apaisé peut-être sincèrement voulu par Bouteflika.

Ils confirment hélas les augures des cassandres qui lui ont prédit un déroulé mouvementé et une fin chaotique qui a le risque de plonger le pays dans une situation qui échappe à toute gestion et à tout contrôle. L’on aura beau minimiser la crise parlementaire qui a cours, elle n’en constitue pas moins l’indice qu’en cette fin de quatrième mandat l’Algérie couve une crise multidimensionnelle dont la gravité est d’autant ressentie et crainte qu’elle a pour protagonistes des cercles qui ont manifestement confisqué de façon anticonstitutionnelle le pouvoir et asservi à leurs troubles desseins les institutions de la République sans pour autant avoir construit entre eux un consensus sur eux.