C’est un ton particulièrement sévère qu’utilise le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique vis-à-vis des enseignants universitaires et des chercheurs.
Dans une note du secrétariat général aux établissements d’Enseignement Supérieur et de Recherche, ils sont très fermement rappelés à l’ordre sur un aspect: les relations avec les partenaires étrangers, dont implicitement les voyages d’études et autres contacts à caractère professionnel.
Ce sont les conditions dans lesquelles se déroule la participation de chercheurs algériens à des colloques à l’étranger qui mécontente le ministère de tutelle. La note «G28/SG» datée du 18 mai dernier, dont nous avons eu une copie, reproche aux enseignants universitaires et aux chercheurs leur liberté d’initiative ou du moins les excès qui auraient été constatés dans l’exercice de cette liberté.
Ses rédacteurs font comprendre que celle-ci s’arrête là où commencent «les intérêts nationaux» et la «cohérence de l’action internationale de l’Etat et de ses activités diplomatiques». Le ton est radical : «La liberté d’initiative ne saurait être tolérée lorsque les intérêts ou la politique étrangère du pays sont concernés». Elle ne cite aucun exemple. Des enseignants universitaires en droit ou sciences politiques affirment n’avoir pas été interpellés par leur administration sur ce genre de sujet. Ils sont étonnés du contenu de cette note.
La participation de chercheurs algériens à des forums étrangers «sans avoir pris le soin et la précaution de recueillir l’accord préalable du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique» n’est plus tolérée. Cette note de cinq pages annonce que cette «pratique» doit être «annihilée définitivement».
Elle fixe la procédure qui doit être désormais respectée impérativement. Ainsi, «la participation…à des conférences ou colloques organisés à l’étranger, pouvant représenter un caractère sensible pour la politique étrangère du pays ou pour des intérêts nationaux, est subordonnée à l’accord préalable du ministère…qui se prononcera sur l’opportunité de la participation lorsque lesdits évènements revêtent une sensibilité évidente».
DES PROCÉDURES STRICTES À RESPECTER
Dans ce secteur de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, il faudra prendre ses dispositions, six mois à l’avance, pour organiser en Algérie un congrès, un colloque, une conférence ou des journées d’études, en déposant un «dossier technique» et d’attendre la réponse, dans un délai d’un mois.
Dans tous les cas de figure, la note du ministère rend obligatoire le passage par la Direction de la coopération et des échanges interuniversitaires du ministère de tutelle. Elle prévoit, par ailleurs, que cette même direction soit systématiquement informée des personnalités étrangères invitées pour participer à ce type d’activités; cela faciliterait, entre autres, indique cette note, «l’obtention des visas auprès des représentations diplomatiques et consulaires».
Ce document s’attarde sur un point inattendu: «l’invitation aux réceptions organisées au niveau des représentations étrangères en Algérie en qualité de «représentant officiel d’institution». Cela «est dorénavant soumis à l’appréciation du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique».
Sur ce point, de nombreux enseignants universitaires ou des chercheurs estiment ne pas être concernés parce qu’ils ne peuvent pas se prévaloir d’un quelconque mandat officiel. Par contre, on s’interroge sur l’autorisation préalable à laquelle ils sont désormais soumis s’ils veulent aller participer, même à titre personnel, à une rencontre scientifique à l’étranger. En tout cas, le caractère général de cette restriction les inquiète.
Oualid Ammar