Fin 2009, HSBC , Google et Liberty Media ont accepté de mettre 50 millions de dollars dans ce projet.
SES est devenu le partenaire industriel.
Pour le projet O3b, tout démarre en 2007 dans la tête d’un homme, Greg Wyler, un Américain de quarante-trois ans à l’enthousiasme débordant. Cette année-là, raconte-t-il aux « Echos », il vient de vendre une « affaire » dans les semi-conducteurs et se trouve au Rwanda, où il a rejoint des amis. L’envie lui prend de développer un service Internet par câble pour les populations locales, mais il se heurte vite aux réalités politiques en vigueur à Kigali…Qu’à cela ne tienne : si ce n’est pas possible dans ce pays, alors faisons-le à l’échelle de la planète pour que ceux qui en sont démunis puissent avoir accès à l’Internet haut débit de manière abordable. Mais, pour cela, la seule solution, ce sont les satellites.
Recours aux ingénieurs de Thales Alenia Space
« Les télécoms, je m’y connaissais, mais les satellites, non », poursuit Greg Wyler. De retour aux Etats-Unis, il se plonge dans le sujet et entre en relation avec John Malone, de Liberty Media, et Larry Page, de Google, excusez du peu. O3b est lancé, même si cela n’a pas été simple de convaincre du bien-fondé d’une constellation en orbite moyenne (à un peu plus de 8.000 kilomètres) à 45 degrés de latitude de part et d’autre de l’équateur pour couvrir les pays émergents. Approchés, les ingénieurs de Thales Alenia Space de Cannes vont mettre un peu de temps pour garantir la faisabilité technique de tout cela, avant d’y plonger à fond. « Pour arriver à mener à bien un tel projet, vous devez être fou dès le premier jour car ce qui est fou au premier jour devient évident après », s’exclame Greg Wyler, venu à Kourou avec sa femme et ses deux jeunes filles.
Fin 2009, HSBC, Google et Liberty Media ont accepté de mettre 50 millions de dollars dans l’affaire. Trop peu pour continuer. Il faut un partenaire industriel. Ce sera SES, l’un des principaux opérateurs de satellites dans le monde, pour qui O3b présente l’avantage de se développer dans les pays émergents, face à son rival Intelsat. La garantie de la Coface sera la clef pour boucler le tour de table final. Un an plus tard, O3b a pu réunir 400 millions en capital (SES en détient 42 %) et lever 800 millions de dette.
Business et philanthropie
Entre temps, Greg Wyler a cédé la place à Steve Collar, un ancien de SES que l’opérateur luxembourgeois a jugé plus expérimenté pour s’assurer de la bonne gestion de son investissement. Le fondateur s’efface devant le gestionnaire : classique. Les négociations avec Thales Alenia Space ont connu quelques bas, sans dommage irréversible. Avant même le lancement, 17 clients ont déjà signé avec O3b. Des fournisseurs d’accès pour la plupart, comme Maju Nusa, de Malaisie, ou Telecom Cook Islands, des îles éponymes, mais aussi la compagnie Royal Caribbean Cruises.« Environ 40 % de la capacité des huit premiers satellites sont vendus », affirme Steve Collar.
A raison de 30 à 40 millions de dollars de revenus par satellite et par an, la constellation a de beaux jours devant elle, même s’il faudra encore attendre quelques mois pour s’assurer que le pari est gagné. Drôle de pari d’ailleurs, puisque la philanthropie ne va pas sans sa dose de « business ». C’est peut-être pour cela que Greg Wyler hésite quand on lui demande comment il se définit. Un homme d’affaires ? « Oui, quand même », répond-t-il, même si O3b sert une « mission ». Après tout, résume-t-il, réduction de la pauvreté et affaires ont toujours partagé un point commun : la communication entre les hommes.