Un décret exécutif, a été publié au Journal officiel rendant obligatoire, à partir du 1er juillet 2015, le paiement par chèque pour toutes les transactions dépassant le seuil de cinq (5) millions de dinars pour les transactions immobilières et d’un (1) million de DA pour l’achat de véhicules neufs, d’équipements industriels etc…
Le ministre des finances Abderrahmane Benkhalfa, avait justifié cette décision, d’interdire les transactions commerciales en espèces au delà d’un million de dinars, par le souci de diminuer l’utilisation du cash, donner du confort et de la sécurité à une clientèle qui travaille avec de gros montants et permettre de recycler progressivement les transactions qui se font en dehors des banques ».
Le député et membre de la commission des finances et du budget de l’APN, et membre du comité central du FLN, Bahaeddine Tliba, interrogé par notre rédaction, regrette que cette décision, a été « prise dans la précipitation sans concertation avec les opérateurs économiques ni les instances économiques et industrielles concernées. Nous ne sommes pas contre mais nous estimons qu’il aurait fallu adopter une approche progressive, pour ne pas réitérer les erreurs du passé » affirme t-il.
Et le député de rappeler « On se souvient qu’en 2005, le gouvernement de Abdelaziz Belkhadem avec Mourad Medelci aux finances, avait décidé de recourir au chèque avec entrée en vigueur en septembre 2006, pour les transactions de plus 50.000 dinars et devant son incapacité à mettre en pratique cette mesure, le décret a été abrogé ».
« Après Belkhadem c’est le chef du gouvernement Ahmed Ouyahia, qui décide de l’introduction du chèque faisant passer le seuil de 50.000 dinars à 500.000 dinars avec entrée en vigueur en mars 2011. En février, soit un mois avant cette obligation, le président Bouteflika, avait sagement différé cette décision » souligne Tliba.
« C’est pour cela que l’introduction du chèque doit passer, comme je l’ai dit plus haut, par une approche progressive conformément à un calendrier préalablement défini et que cette mesure doit concerner, dans une première étape, les transactions commerciales entre les entreprises publiques, ensuite les entreprises privées, les plus grosses dans un premier temps, après ce sera au tour des grossistes qui ont l’habitude d’utiliser les espèces dans leur transactions ».
Le député, tout en rappelant que « le circuit informel possède environ 60 % de la masse monétaire en circulation dans le pays », considère qu’ « il faut une stratégie à long terme pour pouvoir maitriser tous les circuits. D’autant que la plupart des ménages n’ont pas de compte bancaire mais plutôt des comptes CCP non adaptés à ce genre de transactions ».
Tliba souligne ensuite que « Les grossistes qui ont l’habitude d’utiliser les espèces dans leur transactions qui se chiffrent en dizaines de milliards de dinars ne seront jamais prêts à utiliser ce moyen de payement du jour au lendemain quand on sait que la date butoir est fixée au 1er juillet 2015. Méconnaît-on à ce point la situation de l’informel et son poids dans la société algérienne, qui n’est pas la seule d’ailleurs dans cette posture, puisque la plupart des pays méditerranéens utilisent en grande partie le cash dans les transactions commerciales. Il ne faut pas oublier que des dizaines de milliers de familles vivent en Algérie, précisément grâce à ce cash » argumente le député.
« Il faut avoir également à l’esprit que la plupart des agriculteurs, des chevillards, des maquignons etc… ne sont jamais rentrés dans une banque » insiste t-il comme pour démontrer l’inanité de cette mesure. « Obtenir un chèque de banque, comme on dit un « chèque visé » peut aller jusqu’à trois mois quand ailleurs ça ne demande que 24 heures » observe t-il. « C’est dire que les banques et autres établissements financiers ne sont pas prêts, et n’ont pas la capacité et l’expertise pour gérer du jour au lendemain toute la masse monétaire en circulation en Algérie.
» Il est clair que cette opération a plus d’inconvénients que d’avantages et aller à la hussarde, de manière brutale c’est aller droit au mur » souligne le député.