La crise que vit le pays ne cesse d’alimenter le débat politique et de l’engager sur des voies qu’on ne pensait pas possibles d’emprunter avec la même ampleur, il y a quelques mois seulement.
Un de ses aspects, rafraîchissants et plutôt novateurs, faut-il le signaler, concerne la polémique qui oppose depuis des semaines le chef par intérim de l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM) et des cadres dirigeants du FLN. Entre les deux parties, un conflit verbal a éclaté à la suite des propos que le représentant de l’ONM, Mohand Ouamer Benelhadj a tenus sur le parti, dirigé actuellement par Mohamed Djemaï, menacé par une levée d’immunité parlementaire demandée par la justice et qui est donc susceptible de céder son siège de secrétaire général.
Dans une déclaration qui a fait mouche auprès de l’opinion, M. Benelhadj a estimé, à la veille de l’anniversaire historique du 20-Août, que le FLN devait être restitué à l’histoire en tant que patrimoine commun des Algériens. Il a parlé de la nécessité de lui réserver une place qui le préserve des contingences politiques actuelles et des clivages, dont les conséquences sont de lui porter atteinte en tant que symbole, référent majeur du mouvement national, et de la Guerre de libération en particulier. En guise de réplique, Mohamed Djemaï a adressé de vives critiques au chef de l’ONM par intérim, allant jusqu’à l’accuser d’agir pour des agendas occultes ayant des prolongements à l’étranger, dans l’objectif de réaliser ce que le colonisateur français n’a pas pu faire : dépouiller l’Algérie de sa glorieuse histoire. D’autres cadres du parti, à l’exemple de Mustapha Mazouzi, membre du bureau politique, l’ont attaqué en affirmant qu’à l’ONM il ne représente que sa personne.
La réponse de M. Benelhadj n’a pas tardé et elle a été cinglante. Pour le représentant de l’Organisation des moudjahidine, il est d’abord question de clarifier son discours sur le FLN. Pour lui, il n’est pas question d’interdire aux cadres et dirigeants du FLN de faire de la politique.
Libre à eux de se constituer en formation politique comme les autres et défendre leurs idées et leurs projets, a-t-il dit. Le plus important à ses yeux, a-t-il encore expliqué, est de rendre le FLN à la place qui lui revient, loin de la conjoncture et loin surtout des scandales dont sont à l’origine ses représentants officiels, dont l’un d’eux, l’ex-secrétaire général Djamel Ould Abbès, est aujourd’hui en détention préventive et attend d’être jugé dans des affaires de malversation et de corruption au détriment de l’intérêt public. Son successeur, présumé impliqué dans un scandale incroyable, où il aurait bénéficié d’un faux témoignage de la part d’une magistrate, est en sérieuse difficulté face à la justice, d’autant que le scandale en question aurait été étouffé par l’ancien garde des Sceaux, Tayeb Louh, lui aussi actuellement pensionnaire à la prison d’El Harrach pour délit d’abus de pouvoir et de corruption. Outre cette clarification, Mohand Ouamer Benelhadj n’hésite pas à qualifier les cadres du parti qui l’ont attaqué de « bande du parti FLN ». Il a affirmé que le communiqué diffusé par l’ONM, où elle demandait la restitution à la nation du sigle (FLN) n’était pas une initiative personnelle, mais a été approuvée « à la quasi unanimité des membres du secrétariat général». « Sur les 17 membres du secrétariat général, 13 parmi eux ont approuvé », a-t-il précisé. Ceux qui « m’ont accusé de travailler avec une puissance étrangère doivent fournir les preuves à ce sujet », soulignant que « c’est le FLN, en tant que parti majoritaire à l’APN, qui a rejeté le projet de loi portant sur la criminalisation du colonialisme». A ceux qui l’accusent de n’avoir jamais fait partie du FLN, il répond qu’il y a exercé de nombreuses fonctions, notamment en tant que député de Tizi Ouzou avant de se retirer « volontairement », en 1987, lorsque les listes des candidatures « ont commencé à se préparer dans des chambres noires, au niveau de la direction à Alger », contrairement au passé où les candidatures étaient examinées au niveau local et de wilaya avant d’être soumises à la direction à Alger. La guerre des mots que se livrent le secrétaire général par intérim de l’ONM et le secrétaire général du FLN – sur une question qui semble du registre de l’histoire – n’en cache pas moins une véritable bataille politique qui a pour enjeu l’appropriation par un parti d’un patrimoine et d’un héritage de lutte qui ne lui appartient plus depuis longtemps déjà. Un aspect qui, dans le contexte actuel, revêt une importance nouvelle d’autant que le parti de
M. Djemaï est devenu l’un des «champions » de l’actualité judiciaire