Alors que le scandale du logiciel espion Pegasus prend une dimension internationale, le royaume marocain, client de l’entreprise israélienne NSO, qui commercialise ce logiciel espion, se retrouve au cœur de cette scandaleuse affaire. Outre des cibles Françaises, le Maroc a étroitement surveillé l’Algérie. Plus de 6 000 numéros de téléphone appartenant à des Algériens ont été ciblés par les services de renseignement marocains.
Le journal Le Monde s’est intéressé de très près à cette affaire qui a fait couler beaucoup d’encre. Le quotidien Français, dans un article qui a été publié aujourd’hui, le 20 juillet 2021, a dévoilé plusieurs noms d’Algériens ciblés par cette opération d’espionnage menée par le Maroc. Parmi les cibles, des hauts responsables politiques, mais aussi des militaires, des diplomates, et même des chefs de partis.
6 000 numéros Algériens ciblés : qui sont-ils ?
Sélectionnés comme cibles potentielles du logiciel espion Pegasus, le Maroc s’est intéressé à plus de 6 000 numéros de personnalités et de responsables Algériens, assure le Monde, qui a pu collecter plus de détails auprès de l’organisation Forbidden Stories et d’Amnesty International. Il s’agit apparemment de numéros appartenant à des diplomates pour la plupart, mais aussi à des responsables politiques, des militaires, des chefs des services de renseignement, des hauts fonctionnaires et même à des militants politiques.
Parmi les noms cités par la même source, figurent ceux de Saïd, Nacer et Zhor Bouteflika, les frères et sœurs du président déchu Abdelaziz Bouteflika. Mais outre le cercle familial de l’ancien chef de l’État, figurent aussi ses plus proches collaborateurs. En effet, parmi les numéros sélectionnés par le Maroc, apparaissent ceux des chefs des services de renseignement de l’époque, ceux des généraux Ali Bendaoud, Wassini Bouazza et Bachir Tartag, mais aussi des numéros attribués à des commandants des forces terrestres et aériennes. Un numéro attribué à Saïd Chengriha, l’actuel chef d’état-major de l’armée, fait également partie du lot, assure Le Monde.
Ahmed Gaid Salah, l’ancien homme fort du pays entre avril et décembre 2019, n’a pas échappé lui aussi à cette vaste opération d’espionnage perpétrée par le Maroc. Si son numéro à lui n’a pas été directement cité, ce n’est pas le cas de celui de son fils Mourad, dont le téléphone se trouvait sous la surveillance des services de renseignement marocains, tout comme celui de Lotfi Nezzar, le fils de Khaled Nezzar. Le monde dévoile aussi l’étonnante histoire de l’adjudant Guermit Bounouira, ancien aide de camp du général Gaïd Salah. Son numéro de téléphone était sous surveillance. Guermit Bounouira avait fui l’Algérie pour la Turquie à la mort de son chef, mais il a été vite livré par Istanbul à Alger, et il se trouve actuellement en détention pour « haute trahison ».
Une frénésie sans limites
Outre les militaires, les Marocains se sont également intéressés à des ministres de premier plan de l’Algérie. Parmi les numéros espionnés figurent certains qui sont attribués à Noureddine Bedoui et à Remtane Lamamra, mais aussi à Sabri Boukadoum et à Noureddine Ayadi, ce dernier a déjà occupé le poste de directeur de cabinet de la présidence de la République. Les numéros de téléphone d’Ali Haddad, et d’autres « oligarques » de l’ère Bouteflika ont également attiré l’attention des espions marocains.
Le Maroc, toujours via le logiciel espion Peagasus, a également ciblé des journalistes, des personnalités de l’opposition et de la société civile, assure le monde qui cite l’exemple de l’ancien ministre et diplomate Abdelaziz Rahabi. Ce dernier a d’ailleurs déclaré que « Cela fait partie de la chaîne des actes d’hostilité du Maroc envers l’Algérie. Cette hostilité permanente vise donc désormais les institutions, mais aussi des personnalités indépendantes ».
Parmi ces « personnalités indépendantes » ciblées par la frénésie paranoïaque du royaume chérifien, figure aussi Zoubida Assoul, affirme encore Le Monde. Présidente de l’Union pour le changement et le progrès (UCP) et membre actif du PAD, Madame Assoul, pourrait faire partie de ceux dont les téléphones ont été mis sur écoute par le Maroc. « Au nom de quel droit un pays étranger se permet-il de venir m’écouter, espionner mon travail ? La communauté internationale doit réagir. Contre l’agresseur, mais aussi contre celui qui conçoit ce matériel pour que d’autres espionnent des sociétés civiles et des opposants », a-t-elle réagi.