Beaucoup estiment que le seul rôle salutaire que ces partis peuvent jouer pour le dénouement de la crise est de se retirer sans bruit de la scène politique pour laisser s’accomplir la construction de la nouvelle Algérie en rupture totale avec le système.
Karim Aimeur – Alger (Le Soir) – L’image des dirigeants des quatre partis de l’alliance présidentielle, annonçant officiellement et fièrement la candidature de Bouteflika pour un cinquième mandat, ne s’effacera pas de sitôt. A quelques jours du début de la mobilisation populaire d’envergure sans pareille, Ahmed Ouyahia, patron du RND, Moad Bouchareb, chef du FLN, Amara Benyounès, président de MPA, et Amar Ghoul, président de TAJ, ont offert aux Algériens une scène affligeante.
Main dans la main, sourire narquois et provocateur, ils annoncent leur choix, considéré comme une agression contre la dignité du peuple : Bouteflika, dans l’état de santé qui est le sien, est leur candidat.
A la veille du 22 février, Ouyahia a déclaré que « le peuple algérien est content suite à la candidature de Bouteflika ».
La suite est connue. Depuis le 22 février, les Algériens mobilisés par millions dans toutes les wilayas, scandent avec instance et chaque vendredi: «FLN dégage», «RND dégage».
Aujourd’hui, les chefs de ces partis et plusieurs de leurs cadres sont soit derrière les barreaux, soit poursuivis pour des affaires de corruption.
Ahmed Ouyahia et Amara Benyounès ont rejoint Ali Haddad, les frères Kouninef et Tahkout à la prison d’El Harrach.
Amar Ghoul va perdre son immunité parlementaire et répondra de ses actes devant les juges. Djamel Ould Abbès, ex-patron du FLN, défenseur zélé du 5e mandat, sera prochainement devant le juge.
Le RCD soutient que les auditions par la justice des membres des exécutifs successifs qui ont sévi sous le règne de Bouteflika et les charges graves qui pèsent sur la plupart d’entre eux «démontrent que le pays a été longtemps livré à une faune de prédateurs apatrides sans foi ni loi». Pendant cette période, le pays a été géré par le FLN et le RND qui contrôlent toutes les institutions.
Et pourtant. Au lieu de se retirer dignement, ces partis veulent jouer un rôle dans la sortie de crise.
Quel rôle ?
Pour Mustapha Hadni, coordinateur du PLD : «Aujourd’hui, plus que jamais, ces partis qui symbolisent et incarnent le népotisme, le régionalisme et la médiocrité politique sont appelés à s’effacer de la scène politique. Leur dissolution est une exigence et une nécessité historique.»
Il explique que ceux qui sont à l’origine de la crise profonde de notre pays ne peuvent en aucun cas prétendre jouer un rôle dans le dénouement de cette situation.
«Leur responsabilité est pleinement engagée dans la déliquescence de l’Etat», accuse-t-il.
Saïd Salhi, vice-président de la LADDH, souligne que les quatre partis de l’alliance bouteflikienne, une véritable alliance contre l’Algérie, ont été les piliers du système pendant des années, comme d’autres organisations de la société civile.
«Fidèle au mouvement populaire qui exige depuis le 22 février la rupture avec le système et tous ses symboles, nous ne voyons aucun rôle à ces partis et organisations. Ils doivent assumer leurs responsabilités et échec et surtout se soumettre au verdict de la rue. Nous refusons de nous mêler à eux. Dans notre feuille de route, nous l’avons réitéré de manière claire : rupture et amorce d’une période de transition démocratique pour aller vers la nouvelle République démocratique, sociale et civile», a-t-il affirmé, rappelant que dans le communiqué final adopté à la majorité lors de la conférence nationale de la société civile, la rupture et la transition ont été affirmées.
Naviguant à contre-courant de l’histoire, les membres de ces partis insistent sur le rôle central qu’ils doivent jouer dans la sortie de crise.
Abdelouahab Benzaim est sénateur du FLN. Il a rappelé, dans une réponse à notre question, que le FLN et le RND sont toujours majoritaires au niveau des Assemblées élues (APN, Sénat, APW et APC).
A ce titre, il estime que c’est «logique qu’ils aient un rôle important pour dénouer la crise surtout par le projet de la commission indépendante des élections qui va passer par l’APN ».
«Nos militants sont vigilants à tous les risques que traverse le pays. Nous restons disponibles pour travailler pour la République», a-t-il dit.
Malgré le rejet populaire massif ? «Seules les urnes et le peuple décideront qui va gouverner», a-t-il insisté.
Abderrahmane Belayat va dans le même sens.
«Je pense que le parti du FLN, en dépit de tous les avatars qu’a connus sa direction depuis quelques années, est fondé à prétendre avoir une place spécifique dans l’évolution actuelle des évènements.»
Pour lui, il n’y a pas de rejet populaire massif du FLN.
Beaucoup estiment que le seul rôle salutaire que ces partis peuvent jouer pour le dénouement de la crise est de se retirer sans bruit de la scène politique pour laisser s’accomplir la construction de la nouvelle Algérie en rupture totale avec le système.
K. A.