Pharmacie: réformer la gouvernance du secteur pour accroître la production locale de médicaments

Pharmacie: réformer la gouvernance du secteur pour accroître la production locale de médicaments

ALGER- L’Union nationale des opérateurs de la pharmacie (UNOP) a exprimé vendredi à Alger son adhésion au Plan d’action du Gouvernement pour ce qui est de l’objectif d’augmenter la production locale de médicaments, en estimant que la réalisation d’un tel résultat est tout de même tributaire d’une large réforme du mode de gouvernance du secteur.

« Dans la conjoncture financière extrêmement tendue que traverse notre économie, le plan d’action de l’actuel gouvernement a retenu explicitement l’objectif des 70% de couverture par la production locale des besoins du marché national médicament en 2019 (…) Notre association a donc toutes les raisons de se réjouir de cet engagement officiel et nous nous considérons comme totalement mobilisés à cet effet », a souligné le président de l’Union, Abdelouahed Kerrar à l’ouverture des 1ères journées de l’Industrie pharmaceutique algériennes de l’UNOP (JIPA 2017).

« Mais nous tenons à dire que si l’objectif de passer de 50% à 70% de couverture des besoins en médicaments est, à nos yeux, parfaitement réalisable, il demeure que celui-ci est tributaire de réponses préalables à apporter aux nombreux problèmes d’organisation de notre filière et de transformation du système de gouvernance à travers lequel elle est régulée ».

Pour le président de l’UNOP, qui s’exprimait devant les différents acteurs intervenant dans le marché des médicaments, ce n’est plus l’investissement dans les capacités de production qui pose problème aujourd’hui, ces capacités étant même « très largement supérieures aux demandes du marché interne », selon lui.

En revanche, la vraie entrave face au développement de l’industrie pharmaceutique est en lien avec les prix des médicaments qui devraient être augmentés au profit des producteurs, suggère-t-il, ajoutant que :

« Le développement de cette industrie ne peut s’envisager sans des prix vraiment rémunérateurs pour les investisseurs et les producteurs concernés ».

« On a vu comment, dans certains pays en développement, la contrainte du prix a conduit à réduire l’investissement des entreprises dans la qualité des produits, ce qui, en bout de course, rabaisse les standards pharmaceutiques et finit inévitablement par discréditer les fabricants et engendrer un recul de la production », a-t-il argué.

Dans la mesure où le prix des médicaments est déterminé réglementairement et qu’il ne peut pas être ajusté, comme cela se passe dans la grande majorité des activités, regrette-t-il, ce sont les marges de bénéfices des producteurs « qui sont laminées progressivement et la viabilité de notre production qui est en conséquence menacée », a-t-il averti.

Rappelant que la demande de l’UNOP de réévaluer les prix des médicaments datait de deux ans, il a regretté le fait que les autorités concernées « n’ont toujours pas répondu favorablement à nos doléances ce qui a conduit à l’abandon de certains produits ».

Ensuite, il faudrait, soutient-il encore en évoquant les réformes escomptées, mettre à niveau l’organisation du cadre réglementaire en commençant par la modernisation du système d’enregistrement qui « devrait surmonter rapidement les obstacles de moyens dans lesquels il a été enfermé jusque-là, pour se transformer en un instrument d’appui au développement de la production nationale ».

Il a, dans le même contexte, plaidé pour une meilleure coordination entre les services publics de Santé et ceux de la Sécurité sociale, pour l’adaptation du système de formation des personnels techniques spécialisés, pour l’appui à la recherche-développement.

==Le marché des médicaments devrait croitre de 7% en 2021==

De son côté Dr. Hocine Mahdi, Directeur général de l’Industry Medical Service (IMS Health Algeria)-qui est une entreprises d’études et de conseil pour les industries du médicament et les acteurs de la santé- a mis l’accent sur l’évolution du marché algérien des médicaments durant ces dernières années en soulignant que ce marché est passé de 2,1 milliards de dollars (mds usd) en 2012 à 2,4 mds usd en 2013 puis à 2,7 mds usd en 2014 et 2015 pour atteindre 2,9 mds usd en 2016.

Ce marché devrait croitre encore pour atteindre 3,1 mds usd à la fin de l’année en cours, puis 3,3 mds usd en 2018, 3,5 mds usd en 2018, 3,8 mds usd en 2019 et 4 mds en 2020.

La croissance annuelle moyenne de ce marché a été de 13,8% entre 2012 et 2013 avant de baisser à 3% entre 2014 et 2016 à cause d’une « correction commerciale », c’est à dire à des baisses dans les prix et non pas dans les volumes. Mais à l’horizon 2021, cette croissance serait portée à 7%, selon les prévisions d’IMS Health.

Selon l’UNOP, la production nationale de médicaments est en passe d’atteindre quasiment la moitié de la valeur des médicaments commercialisés sur le marché interne et près de 60% en quantités.

La part de la production locale est passée de 25% à 47% entre les années 2008 et 2016. En valeurs, cette production a progressé de 473 millions usd à 1,77 mds usd.

La consommation nationale de médicaments aura enregistré un taux de croissance annuel moyen de 9,3% au cours des dix dernières années, ce qui peut être regardé comme « une grande performance pour la santé publique algérienne », selon le président de l’UNOP.

Entre 2006 et 2015, la filière pharmaceutique algérienne enregistrait en effet des taux de croissance oscillant entre 10% et 17,5% alors que la demande en médicaments augmentait annuellement à 12% en moyenne. Cette filière constitue ainsi l’une des rares industries locales ayant gagné des parts de marché importantes face aux importations, la couverture locale étant passée de 12% en 2004 à 50% à la fin de 2016, selon les détails fournis par l’Union.

Au cours de la séance d’ouverture des journées, les participants ont appelé les autorités à accélérer la mise en œuvre effective de l’Agence Nationale des Produits pharmaceutiques, créée en 2008 et installée formellement en 2016, car cette agence devrait « apporter des réponses concrètes aux préoccupations du secteur, selon eux.

Samedi, les représentants des établissements pharmaceutiques, les distributeurs de médicaments, du corps médical, des pharmaciens d’officine ainsi que les représentants des autorités publiques, vont échanger autour des principales contraintes qui affectent l’exercice de leurs activités au quotidien et discuter des propositions de solutions pour les traiter.

L’UNOP, créée en 1999, regroupe les entreprises de fabrication, de conditionnement ou d’importation de médicaments à usage humain.

L’association, représentant, avec ses adhérents, plus des deux tiers du chiffre d’affaires du marché national de médicaments, s’est fixée pour objectif principal la promotion de la fabrication locale de médicaments répondant aux standards internationaux en matière de qualité.