Dans le sillage de la fermeture des escaliers de la Grande-Poste, place emblématique de la révolution en cours contre le système politique, des appels ont été lancés sur les réseaux sociaux pour trouver un autre endroit symbolique pour les rassemblements « vendrediens ».
Karim Aimeur – Alger (Le Soir) – Deux lieux ont été proposés. Les marches de la rue Dr Saâdane, devant le palais du Gouvernement, plus vastes et plus solides que celles de la Grande-Poste.
Ce lieu a été proposé suite à la répression des étudiants qui s’y est déroulée mardi, lors de leur marche hebdomadaire. Ces marches ont aussi une charge symbolique et historique. C’est sur cette place, appelée à l’époque française «place du Forum», que la foule s’est rassemblée le 4 juin 1958 pour écouter le discours de Charles de Gaulle où il avait lancé le fameux «je vous ai compris».
Ce lieu est hautement protégé par le pouvoir pour empêcher les manifestants de l’atteindre.
Le deuxième endroit proposé est la place des Martyrs. Une place qui symbolise, de par le nom qu’elle porte, les sacrifices des Algériens durant la guerre de Libération nationale.
Ce vendredi 24 mai, pour l’acte 14 de la mobilisation nationale enclenchée le 22 février, d’abord contre le cinquième mandat, puis contre l’ensemble du système politique, des dizaines de milliers de manifestants ont choisi de se diriger vers la place des Martyrs, la Grande-Poste étant quadrillée par les forces de l’ordre et les rues du centre de la capitale étant pleines comme un œuf.
Très spacieuse et ouverte sur la mer, cette place est chargée d’histoire. En 1990, lorsque les conditions de la guerre civile étaient en train d’être réunies, les démocrates s’organisaient pour sauver la République et la démocratie.
Le 10 mai, sous un ciel pluvieux, des milliers de démocrates ont marché sur Alger et ont choisi cette place comme point de chute.
Il n’est pas exclu que, pour les prochains vendredis, elle soit un autre centre de la révolution contre le système politique qui a provoqué des dégâts inestimables au pays.
A l’époque coloniale, elle était dénommée «place du Gouvernement». Après l’occupation d’Alger en 1830, cette place sera le premier site aménagé à Alger par l’armée française. L’héritage ottoman sera presque anéanti. Des centaines de maisons seront détruites. Des rues, des commerces, un palais et une mosquée subiront le même sort pour permettre à la place du Gouvernement de voir le jour.
La statue équestre en bronze du duc d’Orléans, œuvre de Marchetti, haute de 5 m et pesant 8 tonnes, y sera installée le 28 octobre 1845, pour remplacer un petit carré ombragé par un figuier nommé à l’époque des Turcs, la place des Caravanes.
La place devient alors le centre de la ville où tout le monde se rencontre. Les banquets et les défilés y étaient organisés.
En 1962, au lendemain de l’indépendance de l’Algérie, la place sera nommée place des Martyrs. La statue du duc d’Orléans démontée et rapatriée en France.
Tout récemment, les travaux de réalisation d’une station du Métro d’Alger ont révélé un trésor archéologique. Des vestiges datant du Ve siècle, pour les plus anciens, y ont été découverts.
Les marches et rassemblements organisés sur ce lieu à l’occasion des événements historiques que vit l’Algérie actuellement vont enrichir la charge aussi symbolique qu’historique de cette place.
K. A.