Plusieurs experts avertissent sur le coût social de la crise : Vers une dévaluation du dinar en fin d’année et une aggravation du chômage

Plusieurs experts avertissent sur le coût social de la crise : Vers une dévaluation du dinar en fin d’année et une aggravation du chômage

La situation économique du pays risque de se dégrader davantage d’ici la fin de l’année en contexte d’impasse politique, plusieurs mois après le déclenchement des marches populaires le 22 février dernier.

Plusieurs experts, qui sont intervenus récemment, en particulier au cours de la journée organisée par le centre de réflexion Care, sur la feuille de route économique de l’Algérie à court et moyen termes à la lumière de l’évolution politique actuelle, sont catégoriques : ce sont de plus sombres perspectives qui attendent les Algériens à court terme. Deux maîtres-mots qualifient la situation actuelle : récession et ralentissement de l’activité économique. Ce qui n’est pas sans conséquence sur le pouvoir d’achat du dinar. Rachid Sekak résume ainsi le contexte actuel : «Il y a une morosité économique qui s’est installée et qui va poser des problèmes très complexes dans les mois à venir. Il y aura une hausse du taux de change (de l’euro ou du dollar par rapport au dinar) en fin d’année, une poussée de l’inflation et une exacerbation des tensions.»

L’économiste prédit de ce fait que les «Algériens vont connaître une période à court terme très difficile». Mais à moyen terme, ajoute-t-il, «il est faux de dire que les perspectives resteront aussi sombres ou plus graves. L’Algérie a de bonnes perspectives économiques à moyen terme eu égard à ses atouts pour peu qu’elle change de gouvernance». Pour Souhil Meddahi, ajuster la valeur du dinar devient une nécessité. Il est surévalué depuis plusieurs années. Si ce scénario se produit, le coût social en un mot sera très cher. Ce sont les simples citoyens qui vont payer la facture. Selon l’économiste Mohamed Cherif Belmihoub, la perte de 300 000 emplois a déjà été enregistrée dans le BTPH, ces dernières années.

En fin de compte, à la crainte qui s’est installée chez les banques publiques et qui conduit au refus d’accorder de nouveaux crédits et d’ouvrir des crédits documentaires s’est ajoutée celle de l’administration à prendre des décisions, conséquence directe des arrestations et incarcérations d’hommes d’affaires, banquiers et hauts fonctionnaires. Se conjuguent à cela les grands retards dans le paiement des situations de travaux des entreprises du BTPH. Tous ces facteurs annoncent une panne de l’investissement et la fermeture de nombre d’entreprises locales. Tout cela dans le scénario où rien ne bouge au cours des prochains mois, côté gouvernance. Ce cercle d’experts s’est accordé à souligner que la solution à ces problèmes économiques est avant tout politique.

L’ouverture d’un dialogue pour une sortie de crise rapide. Car le retour à un pouvoir légitime, issu d’élections propres, aura pour effet de restaurer la confiance sans laquelle il est vain de s’attendre à une redynamisation de l’économie. Aujourd’hui, face à ce coût social très cher, nul n’a intérêt à une radicalisation de sa position, ni le mouvement citoyen, qui risque de faire le premier les frais d’une dévaluation du dinar ou d’une aggravation du chômage, ni le pouvoir provisoire en place qui devra gérer une situation plus complexe, très risquée au plan social.

En attendant l’ouverture d’un dialogue fécond, les économistes invitent les gouvernants à rassurer les gestionnaires et les opérateurs et à prendre les mesures à court terme pour que ne s’aggrave pas davantage l’inertie économique actuelle et que ne s’alourdisse le coût social de l’impasse politique actuelle.

KHALED REMOUCHE