– Pionnières ou héritières de traditions ancestrales, militantes de première heure ou activistes dans les années 2000, autodidactes ou formées à l’école des Beaux-arts : c’est un florilège de onze artistes algériennes que Djamila Flici Guendil a choisies pour composer « Féminin pictural », un livre d’art paru récemment aux éditions Casbah.
A travers des textes illustrés de reproductions d’oeuvres, l’auteure raconte le parcours artistique et personnel de plasticiennes et de sculpteuses ayant marqué de leur empreinte, autant par leur engagement dans l’art que par le combat pour leur émancipation, le paysage culturel algérien avant et après l’indépendance.
De la première génération d’artistes, celle de Baya Mahieddine ou de Aïcha Haddad jusqu’aux plus jeunes comme Meriem Aït El Hara, en passant par Djahida Houadef et Habiba Bensekhar, Djamila Flici Guendil tente d’inscrire « l’épopée de ces conteuses du beau » dans la lignée des « aïeules réputées depuis des siècles pour leurs oeuvres d’artisanat traditionnel », écrit-elle en se référant aux peintures rupestres du Tassili N’Ajjer (Illizi), en particulier.
Elle notera à juste titre, d’ailleurs, que la prédominance des thèmes liés au patrimoine chez les artistes est « un legs culturel, riche et ancien, qui leur permettra de reprendre le flambeau des mains de leurs mères et de poursuivre le chemin parfois semé d’embûches, de la créativité et de la connaissance ».
L’auteure met, ainsi, en évidence les entraves sociales et familiales que les plus anciennes ont rencontré durant leur carrière, du fait du milieu conservateur chez Souhila Belbahar ou des dures conditions de vie durant la colonisation chez Djamila Bent Mohammed, emprisonnée par l’armée française pour cause d’engagement politique.
Malgré de « meilleures conditions de vie », note Djamila Flici Guendil, les plus jeunes doivent cependant composer avec l’indigence des espaces consacrés à la création et un public peu familiarisé avec l’art contemporain, une réalité qui contraint ces artistes à d’autres activités lucratives, même si celles-ci demeurent liées à l’art.
Le livre met aussi l’accent sur « la quête spirituelle » propre à chaque artiste et revient sur les moments de doute et de solitude qu’elles ont dû vivre au plus fort des années de violence terroriste.
Dans ce chapitre, l’auteure s’appuie sur l’exemple de Meriem Aït El Hara, « Une aventurière de l’art pur et dur » qui s’investit dans les installations artistiques, signant parfois des oeuvres déroutantes et « provocatrices », après avoir interrompu ses études suite à l’assassinat, en 1994, du directeur de l’Ecole des Beaux-arts, Ahmed Asselah, et de son fils Rabah, étudiant dans le même établissement.
« Féminin pictural » renferme également un grand nombre de reproductions d’oeuvres (peintures, sculptures, installations), réalisées par les onze artistes ainsi que des photos de vernissage d’expositions