Parmi tous les indicateurs économiques, le pouvoir d’achat est sans doute celui qui préoccupe le plus les Algériens tant il a un impact direct sur le niveau de vie de tout un chacun.
Or, malgré le récent regain de forme de l’économie nationale grâce notamment à l’augmentation des recettes d’exportation des hydrocarbures, le taux d’inflation demeure toujours élevé (le dernier rapport du FMI l’estime à 9,4 % en 2022). Et cela ne manque pas de susciter l’inquiétude, car l’augmentation des prix n’épargne pas les produits de large consommation, loin s’en faut…
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Face à cette situation, le gouvernement algérien, à sa tête le chef de l’État Abdelmadjid Tebboune, a fait du maintien du pouvoir d’achat du citoyen son cheval de bataille. À ce titre, la force publique livre une guerre sans merci aux spéculateurs sur les produits alimentaires ; les procès et les condamnations pleuvent, et celles-ci vont jusqu’à la perpétuité.
En outre, le projet de loi de finances pour l’année 2023 prévoit des augmentations tous azimuts ; salaires, pensions de retraite, allocation chômage… Ils connaîtront tous des revalorisations. Cependant, cette mesure sera-t-elle suffisante pour enrayer l’inflation ou, au contraire, et comme nous l’avons souvent constaté, elle ne fera qu’engendrer une hausse mécanique des prix ?
Face à la cherté de la vie, les Algériens serrent la ceinture
Sur étals des marchands de fruits et légumes, les prix affichés ont de quoi refroidir les ménagères et les pères de famille venus remplir leurs couffins. La pomme de terre et l’oignon, légumes de base des foyers algériens, coûtent désormais 100 Da/kg ; la tomate se vend à pas moins de 70 Da. Les fruits, même de saison, sont carrément hors de portée. Ainsi le prix de la mandarine varie entre 250 et 350 Da, et celui des pommes atteint 400 Da. Dans l’incapacité de s’offrir de la viande rouge, certains de nos concitoyens sont réduits, pour ajouter un zeste de saveur aux plats de lentilles et de haricots, à s’arrache les carcasses de poulet.
Avec l’inflation galopante, surtout après la crise sanitaire du covid-19, les Algériens ont appris, à leur corps défendant, à se passer de beaucoup de plaisirs de la vie : plus de confiseries pour les enfants, plus de vacances en bord de mer, plus de voitures neuves… Cette détérioration générale du pouvoir d’achat impacte aussi les commerçants qui ont de plus en plus de mal à garnir leurs étales et à écouler leurs marchandises.
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« Face à des situations de forte inflation, la première réaction et d’ajuster sa consommation et de se procurer d’autres sources de revenus en pratiquant un supplément d’activités rémunérées. C’est ainsi qu’on a vu se développer les travaux à domicile pour la gent féminine et des activités de service à domicile », explique l’économiste Mohamed Yaziz Boumghar au magazine Jeune Afrique.
Sauvegarde du pouvoir d’achat : les mesures du gouvernement seront-elles efficaces ?
Pour d’atténuer l’effet de l’inflation sur le pouvoir d’achat des ménages, le gouvernement a pris ces dernières années une série de mesures. Parmi les plus phares d’entre elles, citons : une augmentation de 14 % à 16 % des salaires ; une revalorisation de 2 % à 10 % des pensions de retraite ; l’instauration d’une allocation chômage de 13,000 Da/mois pour les primo-demandeurs d’emploi ; la révision, en avril 2021, du salaire minimum (SNMG) à 20,000 Da (au lieu de 18,000 Da), avec effet rétroactif à compter du 1er juin 2020.
En outre, l’exécutif a décidé d’exonérer les salaires inférieurs à 30,000 Da de l’IRG, ce qui a permis un gain net allant de 800 à 3,600 Da. Ensuite, une nouvelle grille de salaires pour la fonction publique a été appliquée. Selon le ministère des Finances, la revalorisation représenterait entre 5,600 et 10,000 Da.
Ces mesures n’ont toutefois pas réussi, jusqu’à présent, à absorber la flambée des prix des produits de large consommation. De ce fait, l’on doit donc se demander si les augmentations de revenus pour les différentes catégories sociales que prévoit le PLF 2023 suffiraient pour rehausser le pouvoir d’achat des Algériens et leur assurer un niveau de vie décent.
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À noter qu’en 2014, le SNAPAP avait estimé à 60,000 Da le salaire minimum nécessaire pour couvrir les besoins essentiels d’une famille de cinq personnes. Du reste, une étude du Syndicat des travailleurs de l’éducation et de la formation (SATEF) montre qu’en vingt-cinq ans, le pouvoir d’achat des Algériens a baissé de 60 %.