À moins de deux semaines du premier tour des élections présidentielles en France, quels candidats ont les faveurs des Français issus de l’immigration maghrébine ?
Pour savoir comment les électeurs français d’origine maghrébine ou subsaharienne se positionnent dans la prochaine élection, et comment ils réagissent aux discours provocateurs des deux candidats d’extrême droite, Éric Zemmour et Marine Le Pen — une enquête IFOP-Jeune Afrique a été menée auprès d’un échantillon de 1 108 électeurs ayant un parent ou un grand-parent de nationalité africaine, et représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.
Voici une lecture des résultats concernant les intentions de vote de la population maghrébine : Maroc, Algérie, Tunisie.
Mélenchon devant Macron, le PS et les Républicains largués
Traditionnellement, les Français issus de l’immigration nord-africaine votent en majorité pour les parties de gauche, le Parti socialiste surtout. Et le présent sondage confirme cette tendance : le chef des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon, arrive largement en tête des intentions de vote de cette population (38 %), devant le président sortant, Emmanuel Macron (25 %).
Aucun des autres prétendants ne franchit la barre des 10 %. Les candidates des Républicains et du Parti socialiste, Valérie Pécresse et Anne Hidalgo, sont créditées respectivement des chiffres ridicules de 5 % et de 3 %. Un véritable affront pour les, désormais, ex deux plus grands partis de France.
Fait singulier, les représentants de l’extrême droite française, Éric Zemmour et Marine Le Pen, réalisent des scores qui dépassent les prévisions. En effet, 7 % des sondés déclarent qu’ils voteront pour Reconquête ! Et 10 % pour le Rassemblement national (ex-Front national).
Derrière, l’écologiste Yannick Jadot échoue à tirer son épingle du jeu (seulement 4 % des intentions de vote), tandis que le communiste Fabien Roussel (3 %), le trotskiste Philippe Poutou (2 %), et le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan (1 %) enregistrent des scores insignifiants.
Le spectre de l’abstention
L’enquête a aussi mesuré le potentiel taux d’abstention chez les populations d’origines africaines et les réponses des sondés ont été cinglantes ! Près de la moitié (45 %) des électeurs pensent qu’ils ne se déplaceront pas aux bureaux de vote le 10 avril ; un chiffre deux fois plus élevé que celui enregistré lors des présidentielles de 2017.
Au-delà du désintérêt pour la chose politique, notamment chez les jeunes, ce chiffre décrit sans doute « un sentiment de malaise par rapport à une campagne électorale polluée par des débats nauséabonds et une insatisfaction face à l’offre proposée qu’illustre ce chiffre inquiétant », analyse le magazine Jeune Afrique.
Le poids des électeurs d’origine nord-africaine
Les démographes assurent que 8,5 millions de personnes vivant en France (12,7 % de la population) sont nées à l’étranger, et que 7,5 millions d’autres ont au moins un parent immigré. Les trois pays du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) fournissent les plus gros contingents de ces descendants d’immigrés. En 2020, 37,8 % des personnes ayant obtenu la nationalité française étaient issues des trois pays de l’Afrique du Nord.
Se basant sur ces données, les démographes estiment qu’une personne résidant en France sur dix possède une ascendance africaine ; les Maghrébins constituent les deux tiers de ce total. Ces éléments permettent d’évaluer le nombre de Français d’origine africaine à environ 3 millions d’individus. On ignore combien sont en âge de voter, mais ils devraient représenter entre 5 et 6 % du corps électoral (qui s’établissait en 2021 à 47,9 millions de suffragants).