Prix de revient des produits agricoles, La face cachée des flambées successives

Prix de revient des produits agricoles, La face cachée des flambées successives

Relevé maintes fois, le secteur agricole subit des mutations géographiques capitales depuis l’avènement des années 2000. Si, jusqu’à il y a quelques années, les régions du sud devaient leur réputation à la culture de palmier-dattier dont elles ont toujours été la terre de prédilection, elles jouent un rôle capital dans le système de sécurité alimentaire et l’approvisionnement du marché en produits agricoles depuis au moins 10 ans.

Le bilan de mise en œuvre du premier programme quinquennal de la politique de Renouveau agricole, élaboré en mars dernier par le ministère de l’Agriculture et du développement rural, fait ressortir, en effet, qu’une douzaine de wilayas du sud assurent, à elles seules, plus de 30% des produits agricoles mis en vente sur le marché national. Dans le sillage de cette nouvelle configuration de la production agricole, des régions comme El Oued ou Biskra sont devenues des leaders dans la production de produits maraîchers, malgré leur aspect aride.

En conséquence, ces nouvelles transformations en matière de localisation des cultures de large consommation n’ont pas été sans conséquence sur la structure des prix des produits agricoles sur le marché et le degré de leur accessibilité aux ménages à modestes revenus. Lequel constat se confirme en se penchant sur l’évolution des prix qu’observe le marché ces derniers mois. Malgré l’abondance des rendements, les prix moyens des légumes frais, (pomme de terre, carotte, poivron, courgette, concombre, piment ou tomate), oscillent en permanence dans l’intervalle des 50 – 100 DA/kg.

Pour de nombreux chercheurs, la délocalisation d’une grande partie de la production agricole vers les régions du sud a induit des coûts supplémentaires importants. Les périmètres agricoles dans ces régions, connues pour leur aridité, sont développés exclusivement en irrigué, ce qui entraîne en conséquence, des charges supplémentaires, accentuées par les coûts des produits de traitement phytosanitaire et autres pesticides indispensables pour la lutte contre les maladies et autres bactéries nuisibles diverses qui y pullulent dans lesdites régions. Cette structure contribue en conséquence étroitement à la hausse des prix des produits de large consommation sur le marché de détail.

Outre la spéculation qui règne d’une manière quasi permanente sur le marché des produits de large consommation durant les périodes de forte de demande, l’apparition de nouveaux coûts, à la charge des agriculteurs, est à l’origine de la hausse des prix sur le marché qui ne fléchissent pas malgré toutes les mesures d’allégement mises en œuvre par les pouvoirs publics, notamment dans le cadre du Syrpalac. Cette tendance a été clairement observée au début de l’année avec la pomme de terre dont le prix n’a pas baissé d’une manière significative au-dessous de la barre des 100 DA/kg malgré les rendements conséquents des récoltes de saison. En plus des charges supplémentaires que supportent les agriculteurs, l’éloignement des zones de production contribue, lui aussi, à cette tendance haussière, compte tenu des moyens de transport et de logistique de stockage que nécessite l’approvisionnement du marché. Avec une telle donne, les spécialistes du marché sont unanimes quant à la persistance de cette tendance haussière, estimant que l’époque des légumes frais à 20-30 DA/kg est désormais révolue.

A titre indicatif, la wilaya d’El Oued a assuré plus de 20% des 47 millions de quintaux de pomme de terre produits durant la saison 2014. A cet égard, les équipements d’irrigation, produits phytosanitaires et moyens de transport que nécessite un tel essor de la filière, enregistrent dans cette wilaya du sud du pays engendrant des financements supplémentaires engagés par les producteurs mais qui doivent être amortis en aval à travers la hausse du prix du produit.

Mourad Allal (L’Eco n°113 / du 1er au 15 juin 2015)