La réduction de 50% décidée par le ministère de tutelle sur la connexion est appliquée par les providers en direction de leurs clients sans réciprocité de la part du fournisseur.
Une situation des plus kafkaïennes décrites par Nouar Harzallah, P-DG de l’Eepad, lors de la conférence de presse, tenue hier au siège de son entreprise. Tantôt expliquant, tantôt dénonçant, l’orateur ne mâchera pas ses mots pour présenter le conflit qui l’oppose à AT. « Algérie Télécom a décidé de me couper la connexion pour non-paiement, mais c’est loin d’être une simple histoire de factures non honorées », dira-t-il, devant une forte assistance de journalistes. « Souvenez-vous. Le 22 avril 2008, le ministre des PTIC annonçait la décision de réduire à 50% l’accès à Internet fourni par tous les providers aussi bien publics que privés », expliquera-t-il en promettant, en guise de rappel, le passage de Haïchour au JT de 20 heures pour rendre publique cette décision. Non seulement la réduction s’est opérée au détriment de la qualité, mais a causé la perte de Djaweb, provider public, filiale d’AT qui a fermé boutique quelques mois après l’application de la dite décision, même si les responsables ont expliqué cet échec autrement. Les autres ISP privés ont continué à végéter, comptant sur d’autres produits à valeur ajoutée comme c’est le cas de l’Eepad. « La situation était devenue intenable et nous a causé des pertes considérables. Elle a d’ailleurs causé la faillite de plusieurs autres ISP », reconnaîtra M. Harzallah, indiquant que l’ARPT a été saisie à deux reprises, en décembre dernier, pour répondre récemment et attester de la recevabilité des deux saisines concernant justement le volet de la réduction des 50%, et celui de la tarification.
Un document qui ne constitue pas une décision en soi, mais a pesé de tout son poids dans l’échiquier du conflit qui oppose désormais de manière ouverte AT et l’Eepad. M. Harzallah a reconnu en AT le partenaire privilégié, omettant de voir en lui le simple concurrent. Tous les ISP sont contraints de recourir aux services d’AT qui détient l’infrastructure nécessaire, mais aussi les autorisations pour ce type de technologie. Une situation de monopole qu’AT manipule à sa guise et pas toujours en faveur de l’émergence d’un partenariat public-privé, comme estimé par M. Harzallah qui ne semble pas être en mesure d’expliquer les véritables motivations d’AT de recourir à ce type de décisions radicales au lieu de favoriser le dialogue. « En 2004, 2005 et 2006, tout se passait normalement et nous avons payé plus de un milliard de DA et 630 autres millions en 2007, et de poursuivre en 2008 pour arriver au règlement d’environ 80% de nos créances. Notre dernier versement remonte à peine à mars dernier », indiquera M. Harzallah pour dire que c’est une personne solvable et non un mauvais payeur comme voudrait le faire passer AT. « L’Eepad n’a pas voulu payer ses factures ? C’est faux ! » martèlera le P-DG de l’Eepad, rappelant à l’occasion que sa société compte 1 200 postes d’emploi, une usine de montage active pour enrichir le contenu local et contribuer dans la construction de la e-Algérie 2013.
Aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 87 000 (avec pas mal de grands comptes) abonnés et 23 000 élèves en préparation des examens de fin de cycle (bac et BEM) dans le cadre de Tarbiatic qui sont privés de connexion depuis mercredi dernier. L’Eepad a introduit un recours auprès du ministère, mais la tutelle aura-t-elle les pleins pouvoirs pour régler ce conflit ? La question reste posée à plus forte raison que c’est aussi une annonce ministérielle qui est à l’origine de cet imbroglio. Un accord a été conclu entre AT et l’Eepad pour établir un échéancier de paiement, selon les déclarations de M. Harzallah lui-même, mais qui a fini par capoter, attestant des zones d’ombre qui entourent ces créances que cumule AT et dont le montant s’élève à plus de 80 milliards de DA. L’Eepad, pour sa part, a remboursé 111 milliards de centimes sur les 200, selon M. Harzallah, qui réclame encore son droit à la réduction de 50% mais pas seulement. « Si je dois appliquer la convention qui me lie à AT à la lettre, l’article 6 me confère le droit de réclamer des réparations lorsque la coupure dépasse les 3 heures. Une étude, transmise à AT, atteste qu’il s’agit de 9 600 heures cumulées jusqu’à 2008, l’équivalent de un milliard de DA que je suis en droit de revendiquer », dira M. Harzallah, tranchant de manière catégorique. « Si l’on me pousse à travers ces pressions à ouvrir mon capital, ils ont bien tort car je ne suis pas à vendre », a-t-il déclaré, assurant de recourir à toutes les voies que lui confère la loi.