Le témoin Soltani a détruit tous les arguments des directeurs de caisse et des présidents des conseils d’administration
Bouguerra Soltani précisera que durant la période s’étalant entre mai 2001 et mai 2002, il n’avait reçu aucune notification de dépôts de fonds à El Khalifa Bank.
Le procès d’El Khalifa Bank, prend une nouvelle tournure avec l’arrivée à la barre en tant que témoin de l’ex-ministre du Travail et de la Sécurité sociale, Bouguerra Soltani. Ce dernier explique d’emblée qu’il n’a été à la tête de ce secteur que pendant 17 mois. Il précisera que durant la période s’étalant entre mai 2001et mai 2002, il n’avait reçu aucune notification de dépôts de fonds. Et ce n’est ni de la part des directeurs des différentes caisses, ni de la part des présidents des conseils d’administration de ces caisses. Il indiquera qu’il en a eu connaissance qu’en 2003 après son départ du ministère.
Interrogé sur l’obligation des présidents des conseils de faire confirmer par le ministère de tutelle les résolutions avant leur application, l’ex-ministre précise que selon les dispositions de la loi, un délai de 30 jours doit être respecté avant de déposer les fonds, et ce après constat de non-réponse du ministère. Il dira clairement que la décision de déposer 2300 milliards de centimes à El Khalifa Bank, a été prise par les directeurs des différentes caisses et leurs présidents des conseils d’administrations, sans informer la tutelle.
Bouguerra Soltani souligne également que les caisses qui relevaient de son secteur (Cnas, Casnos, CNR, CAN, Carma), mis a part la CAN, devaient déposer leurs excédents au Trésor public. Du fait qu’elles n’étaient pas tenues de produire des profits, elles avaient en charge de maintenir l’équilibre social des salariés, et ce malgré leur statut d’Epic. Il précisera que même si il avait été consulté, il aurait refusé en se basant sur un principe religieux d’abord, puis sur un principe statutaire, du fait que les caisses ne sont pas des entreprises commerciales.
La tentation était grande
Il poursuivra toutefois et finira par avouer que devant les taux appliqués par El Khalifa Bank, la tentation était grande pour les gestionnaires, «je connais pas mal de personnalités qui ont ouvert des comptes à EL Khalifa Bank, pour bénéficier de ces taux».
À ce moment le juge Antar, l’interroge sur les circonstances qui l’ont amené à connaître Abdelmoumene El Khalifa. Il dira avec beaucoup de souplesse que cela s’est fait lors de la célébration par Khalifa Airways de l’obtention de son agrément, à l’hôtel Hilton. A ce stade de l’audition, Bouguerra Soltani prend la parole et se lance dans des éloges interminables en faveur de Khalifa Airways. Il explique qu’avant l’arrivée de cette dernière, le transport aérien intérieur souffrait de beaucoup d’insuffisances. Il insiste pour dire qu’il en a fait personnellement l’expérience. Prenant pour exemple la wilaya de Tébessa, pour dire que les lignes intérieures ont été multipliées à l’arrivée de Khalifa Airways. Questionné sur les bilans reçus par les directions, le témoin Soltani dira que ces derniers ne mentionnaient pas les placements effectués par les caisses.
Et ce en raison des cumuls des reports de soldes qui ne permettaient pas de se rendre compte d’un grand changement dans les postes du bilan. Sur un autre plan, il répondra au juge qu’il n’était pas également au courant de la participation dEl Khalifa Bank au financement des entreprises initiées par la Cnac, mais précise que cela était une bonne chose et qu’il salue toute initiative qui apportera une solution ou un changement au problème du chômage. En fin d’audition, Bouguerra Soltani demandera au juge de bien préciser les dates, notamment de son passage à la tête du ministère du Travail et d’un signe de la main, il saluera l’audience à la façon d’une fin de congrès, avant de rejoindre la salle des témoins. Dans la salle, l’exaltation est plus que vive, le témoin Soltani, vient de détruire tous les arguments des directeurs de caisse et des présidents des conseils d’administration, qui avaient soutenu avoir notifié leur tutelle. Dans l’assistance, on ne peut s’empêcher de penser que ce témoignage, n’était pas pour déplaire à la défense de Abdelmoumène.
De son côté Benaouda Mohamed, membre du conseil d’administration de la Cnas, affirme qu’il n’était pas au courant de la décision de dépôts de fonds à El Khalifa Bank, il précise qu’il a eu cette information par la presse. Pour répondre à la question du juge Menouar, il confirme que le président du conseil d’administration durant cette période n’était autre que Abdelmajid Sidi Said. Lui succédant à la barre, Laichi Taieb, membre également du conseil d’administration, confirme la même information, et déclare avion été absent a la réunion du conseil. Pour sa part, Benacer abdelmajid, directeur général de la Cnas de 1996 à 2005, confirme l’existence d’une résolution émanant du conseil d’administration présidé par Abdelmajid Sidi Said. Il a précisé qu’il avait obtenu la résolution en question pour le dépôt de 10 milliards de dinars à El Khalifa Bank. Il indiquera que cette dernière avait été co-signée avec le directeur financier. En outre, le témoin informe que sur le montant déposé, seuls 3 millions de dinars ont été récupèrés. Contrairement aux témoignages précédents, ceux d’Aouimeur Said, directeur financier de la filiale construction et architecture de Sonatrach, et de son P-dg Tarzat Akli. Ils font état d’une décision claire du conseil administration qui stipule d’éviter de verser des fonds à El Khalifa Bank.
«Mauvaise gestion»
Au tour du liquidateur de la Khalifa Location de voitures de se présenter à la barre. Tignourine Brahim, déclare 54 millions de dinars de déficit d’entreprise et 218 millions de dettes au début de la liquidation. Il précisera que cela était dû essentiellement à la mauvaise gestion. Il indique que pour son premier exercice, elle affichait déjà 19 millions de déficit. Concernant Khalifa Construction, dont il était également le liquidateur, le témoin parlera d’un déficit de 5,693 milliards de dinars de déficit. Il précisera que ce montant a été généré par la seule transaction d’importation de cinq centrales de dessalement par Khalifa Construction. Il précisera que trois de ces centrales n’ont jamais été réceptionnées, tandis que pour les deux centrales arrivées à bon port, elles se sont avérées obsolètes et sans aucune valeur marchande.
A ce stade du procès arrive à la barre le témoin le plus étrange de la journée, au point où le juge Menouar avait failli perdre patience. Il s’agit du directeur adjoint de l’agence Khalifa d’El Harrach, Segni Mahieddine. Mis a part le fait d’avoir démarché quelques entreprises pour les rallier à l’agence, le témoin niera tout en bloc. Il avance n’être au courant ni de la convention signée avec le centre de thalassothérapie de Sidi Fredj, ni des retraits effectués par les membres de la direction générale. Il dit ne pas se rappeler de la liste des 39 cartes distribuées par l’agence d’El Harrach, il ira jusqu’à dire que sa tâche au sein de l’agence se limitait a recevoir les clients, et traiter les dossiers en cours. Devant cet état de fait, excédé, le procureur général l’interroge sur la facture de la réception qui a été donnée à l’occasion du changement du siège de l’agence et pour laquelle un méchoui était servi. Il répondra naturellement qu’il avait assisté a cette fête, mais ne savait rien sur la facture. En fin de journée et devant l’évidence que Abdelmadjid Sidi Saïd ne se présenterait pas, le juge Menouar a procédé à la lecture du procès-verbal établi par le juge d’instruction en 2004. Ce dernier stipule qu’en date du 28 février 2004 le témoin Abdelmajid Sidi said, secrétaire général de l’Ugta a confirmé qu’il a été nommé président du conseil d’administration de la Cnas, de 1998 à 2002.
Il a déclare que la Cnas avait déposé ses fonds le 21 avril 2001 sur la base d’une décision du conseil d’administration, et assuré, que le conseil avait procédé à la notification de cela au ministère. Il ajoutera que la deuxième opération de dépôt avait fait l’objet d’une réunion du conseil d’administration le 12 février 2002, dont une copie de la résolution avait été adressée au ministère en date du 16 février 2002. Il informera que la même procédure avait été observée pour l’opération de dépôt de fonds à El Khalifa Bank, le 26 septembre 2002. Par ailleurs, le témoin avait précisé dans ce procès-verbal, qu’il n’avait bénéficié d’aucun avantage de la part d’El Khalifa Bank.