Une réduction d’une telle ampleur modifierait certainement la tendance du marché, car elle éliminerait l’essentiel des excédents des stocks prévus pour 2019.
Le consensus autour d’une baisse de l’offre pétrolière de l’Opep et de ses alliés non Opep se précise après que la Russie et l’Arabie saoudite se sont entendues le week-end dernier pour prolonger leur coopération jusqu’en 2019. Bien que les deux producteurs n’aient pas encore officiellement confirmé de nouvelles réductions de leur production, la décision de prolonger leur pacte de coopération, conclu en décembre 2016, jette les bases d’un accord qui serait quasi acquis, à deux jours d’une réunion de l’Opep à Vienne.
Selon certains délégués de l’Opep, cités par Bloomberg, le comité consultatif de l’Organisation a proposé une réduction de
1,3 million de barils par jour par rapport aux niveaux d’octobre dernier. Les négociations autour de cette offre ont, d’ores et déjà, commencé en coulisses et devraient se poursuivre le 6 et 7 du mois en cours à l’occasion de la tenue des réunions Opep-non Opep. Si la proposition du comité consultatif de l’Opep venait à être validée par l’ensemble des producteurs signataires du pacte de coopération de décembre 2016, une réduction d’une telle ampleur modifierait certainement la tendance du marché, car elle éliminerait l’essentiel des excédents des stocks prévus pour 2019. Dans son dernier rapport mensuel pour octobre, l’Opep était en tout cas formelle sur le risque d’une importante hausse des stocks mondiaux si la production garde sa dynamique actuelle. Les termes du rapport plaidaient déjà ouvertement en faveur d’une réduction de la production, avant que les deux poids lourds du marché, l’Arabie saoudite et la Russie, confirment, depuis Buenos Aires, en marge du dernier Sommet du G20, leur volonté de coopérer au-delà de 2018 aux fins de rééquilibrer le marché. Un consensus commence ainsi à se dessiner autour d’une réduction substantielle de l’offre, afin de tenter de maîtriser une surabondance d’or noir qui rappelle les vieux démons d’avant-juin 2014. Les producteurs semblent être en tout cas conscients que sortir de Vienne, un engagement clair en faveur d’une réduction de la production, aggraverait la déroute des cours de ces dernières semaines.
Ils sont tenus de formuler une déclaration sans confusion faisant référence à un engagement ferme pour que le marché ne soit trop approvisionné. Or, une telle approche pourrait provoquer les foudres du propriétaire de la Maison-Blanche qui disait compter sur son allié saoudien pour la baisse des prix du brut. Le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohamed Ben Salmane, peut difficilement se permettre de défier ouvertement le président américain. Après l’indignation internationale qu’a suscitée l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi dans le consulat d’Arabie saoudite à Istanbul,
Mohamed Ben Salmane a besoin de la protection de son allié à la Maison-Blanche. Cela pourrait amener les Saoudiens à opter pour un engagement moins explicite en faveur de la réduction de l’offre pétrolière lors de la prochaine réunion de l’Opep, prévue jeudi à Vienne, en Autriche.
Le risque d’une telle approche est double. Le marché pourrait déraper à nouveau en l’absence d’un engagement ferme en faveur de la réduction de l’offre, alors que des pays comme la Russie et l’Irak, qui étaient jusqu’ici les plus mauvais élèves en matière de conformité aux précédents accords, risquent de ne pas adhérer fidèlement aux engagements si ceux-ci sont formulés de manière vague. Quoi qu’il en soit, la situation du marché, qui risque de renouer avec les excédents de l’offre, à l’heure où la demande mondiale semble être pour le moins capricieuse, plaide pour l’impératif d’une action commune à même de tenter un rééquilibrage.
Ali Titouche