En effet, c’est le tour de l’Union générale des travailleurs algériens (Ugta), la plus importante organisation professionnelle en Algérie, qui signe là, une première dans son histoire. Par la voix de sa Fédération nationale des travailleurs du pétrole, du gaz et de la chimie, elle a dénoncé un « texte approuvé dans une certaine opacité » et qui « n’a pas été soumis à la concertation des partenaires sociaux conformément à la tradition lorsqu’il s’agit de textes fondamentaux et d’importance cruciale engageant l’intérêt national ».
S’opposant à la démarche du gouvernement, cette fédération précise – dans le communiqué qu’elle a rendu public – qu’elle « n’a pas été associée au processus d’élaboration du texte et n’en a pas été dûment informée », ce qui est un fait « inédit » et contraire « aux usages en vigueur depuis l’adoption de la loi sur les hydrocarbures de 1986 ». Et d’ajouter, « comme s’il y avait une volonté de ne pas discuter le contenu de l’avant-projet et d’en faire une loi du fait accompli. Une loi à adopter sans un des principaux partenaires sociaux qui se voit ainsi écarté, et en dehors de toute information de l’opinion publique nationale ».
En outre, la même fédération « se pose des questions à propos de l’empressement à voter une loi à forts enjeux stratégiques pour le pays, à quelques semaines seulement de l’élection d’un nouveau président de la République, élection qui sera suivie d’un nouveau scrutin législatif qui verra le renouvellement profond de la représentation politique nationale ».
La Fédération du secteur de l’énergie appelle donc, au report du traitement et de la promulgation de cette loi à l’après- élection présidentielle du 12 décembre 2019. « C’est le président de la République élu et doté de la légitimité populaire, qui aura, conformément à ses prérogatives constitutionnelles, et dans le cadre d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs et des partenaires concernés, le pouvoir légitime de faire voter une loi aussi essentielle pour l’avenir du pays que la loi sur les hydrocarbures », conclut le communiqué.
Pour encore plus de ton à cette position, le secrétaire général de la Centrale syndicale, Salim Labatacha, est sorti hier de sa réserve, en déclarant « soutenir avec force » la Fédération des travailleurs de ce secteur. Il s’agit là d’une « position conforme à l’esprit du congrès de renouvellement de l’Ugta de juin dernier », comme rapporté.
L’amendement de la loi sur les hydrocarbures avait déjà suscité des réactions hostiles au sein de la société civile, particulièrement la communauté estudiantine, ainsi que chez la classe politique. Plusieurs chefs de partis de différents courants politiques, dont des candidats à la présidentielle, ont exprimé leur rejet. C’est le cas, notamment de Abderrezzak Makri, Ali Benflis, Abdelaziz Belaïd, Abdelkader Bengrina et Azzedine Mihoubi.
A rappeler enfin, le projet de loi en question a été adopté par le Conseil du gouvernement puis par celui des ministres. Il devrait être soumis aux deux chambres du Parlement pour adoption, mais selon des informations émanant de celles-ci, le projet « serait reporté à l’après-élection présidentielle ». C’est dire que la contestation est aujourd’hui généralisée face à l’Exécutif de plus en plus isolé.
Lyes Ayoub