La France, frappée au cœur par Daech, passera-t-elle à la République sécuritaire, comme le sous-entendait l’intervention, hier, de François Hollande devant le congrès parlementaire, réuni hier à Versailles ? Le discours, déclamé durant trois quarts d’heure, a épousé le ton de la solennité et la gravité que recommande la situation, après les attentats terroristes particulièrement meurtriers de vendredi dernier à Paris.
Par moments, il fut martial. Comme lorsque le président de la République annonce la révision de la Constitution pour permettre aux pouvoirs publics “d’agir contre le terrorisme de guerre”. Mais immédiatement, François Hollande a annoncé une riposte intérieure très forte, laquelle se décline en une série de mesures draconiennes, notamment des restrictions à la circulation et des perquisitions administratives. En effet, François Hollande, qui déclarait, dans sa première réaction aux attentats, que la France était en guerre contre Daech, était venu devant les parlementaires français demander la prolongation à trois mois du délai de vigueur de l’état d’urgence instauré dès vendredi. Le président français a indiqué que le Parlement sera “saisi dès mercredi (demain, ndlr) d’un projet de loi prolongeant l’état d’urgence pour trois mois et adoptant son contenu à l’évolution des technologies et des menaces”. Le président français a annoncé, en outre, l’expulsion des étrangers qui représenteraient une menace particulièrement grave, souhaitant également que la déchéance de nationalité puisse être étendue aux binationaux “nés français” en cas de terrorisme.
François Hollande a, par ailleurs, affirmé que les effectifs de la police, de la gendarmerie et de la justice seront renforcés. Il a parlé de la création de 8 500 nouveaux postes pour la sécurité et la justice : 5 000 emplois pour la police et la gendarmerie, 2 500 pour les agents pénitentiaires et 1 000 pour les douanes. Le président Hollande, acculé, il faut le dire, par la droite qui est montée au créneau pour demander le durcissement des mesures de riposte, a soutenu que, désormais, il ne s’agit pas pour la France de “contenir” Daech mais de le traquer et de le détruire. Aussi a-t-il annoncé une intensification des opérations en Syrie. “Il n’y aura ni trêve ni répit”, a-t-il indiqué. Cela étant, pendant ce temps-là, les enquêteurs français et belges ont réussi à identifier cinq des sept kamikazes qui ont perpétré les attentats de Paris vendredi soir.
Quatre d’entre eux sont français et auraient séjourné en Syrie, selon les premiers éléments de l’enquête. Ils sont âgés de 20 à 31 ans. Omar Ismaïl Mostefai et Samy Amimour, qui seraient tous deux passés par la Syrie, sont morts au Bataclan. Bilal Hadfi, un Français, et un autre kamikaze auprès de qui un passeport syrien au nom d’Ahmad al-Mohammad a été retrouvé, font partie des trois hommes qui se sont fait exploser près du Stade de France, a rapporté l’AFP. Quant au cinquième kamikaze identifié, il s’appelle Brahim Abdeslam et il s’est fait exploser devant un café. Son frère Salah, considéré comme le suspect clé, est toujours introuvable, ayant réussi à fuir à bord d’une Seat noire, bourrée d’armes. Le véhicule a été retrouvé à Montreuil. Hier, une opération de la police belge dans le quartier de Molenbeek à Bruxelles n’a donné aucun résultat, selon les autorités belges. “L’opération est terminée et le résultat est négatif (…) Personne n’a été arrêté”, a déclaré le porte-parole du parquet, Eric Van Der Sypt, cité par le quotidien belge Le Soir.
En revanche, deux suspects ont été inculpés pour “attentat terroriste” et “participation aux activités d’un groupe terroriste” a annoncé la justice belge. Les deux individus ont été appréhendés alors qu’ils étaient à bord de leur voiture qui venait de Paris. Elle a été contrôlée samedi matin à Cambrai, dans le nord de la France avant d’être interceptée à Molenbeek à Bruxelles, cette petite commune qui semble être un “nid” pour les terroristes affiliés à l’organisation autoproclamée État islamique en Irak et en Syrie.
Un des deux inculpés, répondant au nom de Mohamed Amri, a avoué être allé chercher Salah Abdeslam à bord de sa voiture Golf 3, a rapporté Sudpresse, citant des sources judiciaires belges. Mais l’inculpé a dit ignorer que Salah Abdeslam était impliqué dans les attentats de Paris. Lors de son audition, Mohamed Amri a affirmé avoir subi plusieurs contrôles routiers sur le chemin du retour, a rapporté le quotidien bruxellois La Capitale, dans sa version en ligne.
Hier, dans son discours, François Hollande a affirmé que les attentats de Paris “ont été décidés, planifiés en Syrie”, “préparés et organisés en Belgique” et “perpétrés sur notre sol avec des complicités françaises”. De leur côté, les enquêteurs belges sont sur la piste d’Abdelhamid Abaaoud, âgé de 29 ans et originaire de Molenbeek. Condamné par défaut, en juillet dernier, à 20 ans de prison, par la justice belge qui le considère comme un des chefs de la “filière syrienne”, il est soupçonné d’être le cerveau des attaques de Paris.
S. A. I./L. M.