Propagande du pouvoir : La mosquée mise à contribution

Propagande du pouvoir : La mosquée mise à contribution

Pour faire la propagande au profit du chef de l’État et de l’armée, le pouvoir ne s’interdit désormais plus rien.

Après avoir monopolisé les médias publics, utilisé les artistes et profité de la moindre activité pour promouvoir l’idée de la présidence à vie, les autorités recourent désormais à la mosquée pour mettre en avant les “mérites” d’Abdelaziz Bouteflika.

Lors de la prière de l’Aïd, accomplie mardi matin à la grande mosquée de la place des Martyrs, en présence de hauts responsables de l’État, l’imam, qui a prononcé le prêche de circonstance, a consacré une partie de son laïus au chef de l’État. Évoquant la paix entre les hommes, le fonctionnaire de l’État a fait un clin d’œil à celui qui “est à l’origine du retour de la paix en Algérie” que “Dieu le couvre de santé”.

Le chef de l’État a “parié sur le retour de la paix (….) en mettant en place des bases, à commencer par la loi sur la réconciliation nationale”, ajoutera l’imam qui pense, comme les représentants du régime, que cette “réconciliation nationale” est “devenue un exemple pour beaucoup de pays dépourvus de paix”. Comme il est de mode chez les promoteurs du système, rendre hommage à Abdelaziz Bouteflika doit être accompagné d’un discours aussi dithyrambique envers l’armée, grâce à qui “nous voyageons dans ce pays” et “nous découvrons” sa “beauté”. Avant ce discours, les autorités ont déjà exploité les mosquées pour répandre la propagande officielle. À l’occasion de la célébration de l’anniversaire de l’application de la “Charte pour la paix et la réconciliation nationale”, le ministère des Affaires religieuses avait demandé aux imams de consacrer le discours de la grande prière de vendredi à ce sujet.

Cet événement religieux a été souvent utilisé pour faire passer des messages de propagande.

Pourtant, les autorités répètent à l’envi que les discours politiques doivent être bannis des mosquées. “L’imam doit être neutre”, a répété, encore récemment, Mohamed Aïssa, ministre des Affaires religieuses et des Waqfs. Mais comme pour beaucoup d’autres secteurs, le pouvoir est mis devant ses contradictions. Il interdit aux autres ce qu’il fait lui-même.

C’est le cas de l’université où les interdictions de faire de “la politique” ne sont valables que pour les partis politiques et organisations issus de l’opposition. Les organisations proches du pouvoir s’activent dans l’enceinte universitaire.

Pis encore, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique mêle souvent son institution dans des actions en faveur du pouvoir. Mais des conférences données par des figures de l’opposition sont interdites.

C’est le cas du sociologue Nacer Djabi dont la conférence a été interdite l’an dernier au sein de l’Université d’Alger.

La polémique, qui a suivi cette interdiction, a poussé les autorités à limoger un responsable de la Faculté des sciences politiques. Mais l’objectif des autorités a été atteint : Nacer Djabi n’a pas présenté sa communication.

La tendance de tous les espaces publics pour faire la propagande de la “continuité” pour le chef de l’État va certainement se poursuivre au fur et à mesure qu’on s’approche de l’élection présidentielle d’avril 2019.

Ali Boukhlef