Rapport de l’OIT sur les salaires : Très faible progression en Algérie

Rapport de l’OIT sur les salaires : Très faible progression en Algérie
Écrit par Hakim Ould Mohamed

L’Organisation mondiale du travail (OIT) a publié, lundi soir, son rapport annuel 2018-2019 sur les salaires. L’Organisation note une croissance faible des revenus dans le monde, alors que le chômage et la croissance se sont améliorés sur le dernier exercice. Les Algériens ne sont pas non plus bien lotis en termes de revenus ; la croissance et la productivité ne suivent pas, alors que le chômage risque de rebondir sous l’effet de la baisse des budgets dédiés à l’investissement.

En termes réels, c’est-à-dire corrigée par l’inflation, la croissance salariale en Algérie a ralenti de 1,0% 2015 et de 4,4% en 2016. Sur la période 2017-2018, elle a bondi de 1,7%, meilleure performance en Afrique du Nord, mais loin derrière la performance constatée en Egypte, où les salaires ont progressé de 3,3% sur la même période. Au Maroc, la progression du salaire réel nominal était de 1,6% en glissement annuel 2017-2018, alors qu’en Tunisie, pays ravagé par le chômage, l’évolution était d’à peine 1,4%. Dans ces pays, la croissance réelle des salaires était très faible, selon l’OIT.

Dans notre pays, il s’agit néanmoins d’un retour au vert après deux exercices difficiles où les salaires réels sont passés carrément dans le rouge, soit à un niveau au-dessous de 0%. Ce recul constaté durant les deux années 2015 et 2016 s’explique en partie par l’aggravation des signaux de crise née de la dépression du marché pétrolier dès le second semestre de 2014. Le moral des investisseurs décrochait, la productivité était presque nulle, l’investissement accusait le coup avec, au tableau des budgets, une contraction importante des dépenses d’équipements dès 2016.

Cette faible évolution des salaires dans le pays, classé dans la catégorie des Etats à revenus intermédiaires, tient à la faible progression du PIB sur les années 2015-2016-2017 et 2018, alors que le chômage évoluait en dents de scie sur la même période avec, comme perspective, une hausse attendue pour 2019 sous l’effet du retour à la politique des coupes budgétaires dans l’investissement. Le ralentissement de la productivité sur la période 2015 à 2018, qui tient aux difficultés constatées dans de nombreux secteurs d’activité, affectés par les restrictions à l’importation, était en partie à l’origine de cette faible progression des salaires. Au plan des négociations salariales, l’Organisation internationale du travail dit constater un affaiblissement au niveau mondial du pouvoir de négociation des salariés.

Au plan national, toujours, la question ne figure même plus dans les différentes rencontres gouvernement-partenaires sociaux ; la dernière augmentation du Salaire national minimum garanti (SNMG) en date a été acquise lors de la tripartite de 2011. Depuis, elle n’a plus figuré dans le menu des différentes tripartites organisées les années suivantes. Pis, le gouvernement a décidé même de geler les recrutements et l’évolution des carrières dans la fonction publique sur la période 2017-2019 ; une décision contenu dans sa codification budgétaire des années 2017, 2018 et 2019. La situation n’a pas évolué d’un iota au plan des finances publiques et la décision pourrait être reconduite dès 2020. D’autant plus que, dans son dernier rapport pour la région Moanap (Moyen-Orient, Afrique du Nord, Afghanistan et Pakistan), présenté récemment à Dubaï, le Fonds monétaire international (FMI) prévoit un « retour à un rééquilibrage budgétaire rigoureux prévu à partir de 2019 », ce qui signifie que le gouvernement pourrait recourir davantage à des mesures d’austérité.

Dans le même rapport, les experts du « Fonds» estiment que « la contraction budgétaire prévue pour les années à venir va probablement se traduire par un ralentissement marqué de la croissance non pétrolière sur le moyen terme », ce qui se traduirait par l’aggravation du coût social de la crise avec, comme éléments palpables, la hausse du chômage, la baisse des embauches et la stagnation des salaires.