Depuis 2018, le gouvernement a renfloué la CNR à hauteur de 500 milliards de dinars, soit 40% des besoins immédiats de la Caisse. Le même montant a été renouvelé en 2019. Le déficit est proche des 700 milliards de dinars.
Contrairement au mythe de pays de jeunes, bien entretenu, l’Algérie vieillit. Depuis les années 90, le pays est entré dans une phase de transition démographique caractérisée par une baisse du taux d’accroissement démographique inférieur à 2%, une baisse du taux de fécondité estimée à 3,5% en 1998 et un allongement continu de l’espérance de vie, passée de 54 ans en moyenne à l’indépendance à 76 ans en 2006.
En 2020, l’espérance de vie atteindra 80 ans, selon les estimations de l’ONS. En parallèle, le marché du travail, qui se caractérise par le rétrécissement de l’emploi dans les divers secteurs d’activité de la sphère formelle, et le recours aux formules de retraite anticipée, entre autres, ont plongé la Caisse nationale des retraites (CNR) dans la tourmente avec un déficit sans précédent, jusqu’à remettre en cause sa pérennité. Raison pour laquelle, le gouvernement en place planche sur un nouveau projet de réforme des retraites du régime des salariés. Le projet en question a été évoqué par le directeur général de la CNR lors d’une réunion, tenue la semaine dernière, en prévision des Assises nationales sur la Sécurité sociale prévues pour fin novembre prochain. Véhiculée dans la presse la semaine dernière, l’information n’a pas échappé aux animateurs des réseaux sociaux qui s’en sont vite emparés, ne provoquant que davantage de colère et moult interrogations en ces temps troubles que vit le pays. L’intervention publique en catastrophe via le ministre en charge du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale indiquant que “la réforme n’est pas pour l’immédiat” n’a rassuré personne et la question continue à faire débat.
Afin d’absorber le déficit abyssal de cet organisme, un déficit comblé depuis 2018 par l’argent public, les cotisations des assurés sociaux n’étant plus suffisantes, le DG de la CNR a, alors, proposé les changements suivants : repousser l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 65 ans ; revoir à la baisse le taux plein des pensions, le faisant passer de 80 à 60% ; calculer le montant des pensions sur la moyenne des salaires des 10 dernières années de la carrière du salarié et non plus sur les 5 dernières années comme c’est le cas actuellement ; et enfin, supprimer la revalorisation annuelle des pensions, revalorisation inscrite dans la loi relative à la retraite. “Le système de retraite des travailleurs salariés gérés par la CNR connaît une crise de financement sans précédent depuis au moins 2014, année des premiers soubresauts annonçant un bilan où les cotisations perçues ne suffisaient plus à payer les pensions”, nous a déclaré Djilali Hadjadj sollicité pour nous éclairer sur le sujet en sa qualité d’expert en droit de la Sécurité sociale.
Il poursuit : “Pris de panique, le gouvernement a fait appel aux autres caisses de Sécurité sociale, la Cnas principalement, pour permettre à la CNR d’honorer le paiement des pensions, au nom de ce qu’il a appelé la solidarité inter-caisses, notion qui n’a aucune assise législative ou réglementaire. Cette ‘solidarité’ a prévalu jusqu’en 2017, mettant en péril l’équilibre financier de la Cnas.” Et c’est à partir de 2018 que le gouvernement a renfloué la CNR à hauteur de 500 milliards de dinars, soit 40% des besoins immédiats de la CNR. Ce même montant a été renouvelé en 2019.
Le déficit, quant à lui, est proche des 700 milliards de dinars.
Nabila Saïdoun