Dimanche, on vote en France pour le deuxième tour des élections régionales. Plus de 50% des inscrits ne se sont pas déplacés dans les bureaux de vote au premier tour. Qu’en sera-t-il aujourd’hui ?
« Ceux qui n’ont pas voté n’auront pas à se plaindre à la proclamation des résultats ce soir à 20h », glisse un caricaturistes d’un quotidien régional français. Tout l’enjeu en effet est dans la participation. Un scénario incertain préside au second tour des élections régionales où le Front national, malgré des sondages défavorables dans le Sud et le Nord, espère poursuivre sur sa dynamique face à une gauche et une droite anxieuses de sauver la face.
Quelque 44,6 millions d’électeurs sont de nouveau appelés aux urnes dimanche dans treize régions métropolitaines, y compris la collectivité territoriale de Corse et, outre-mer, en Guadeloupe, à La Réunion, en Guyane et en Martinique.
Le premier tour, le 6 décembre, a été marqué par un taux d’abstention de 50,09%. Dans les régions métropolitaines, les listes encore en lice s’affronteront dans deux duels (Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Provence-Alpes-Côte d’Azur), dix triangulaires, et une quadrangulaire en Corse.
Le FN est arrivé en tête dans six régions (Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire, Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, PACA), la droite et ses alliés centristes dans quatre (Auvergne-Rhône-Alpes, Ile-de-France, Normandie et Pays de la Loire) et la gauche dans deux (Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, Bretagne) ainsi qu’en Corse.
La gauche peut espérer conserver la Guadeloupe et la Martinique, la droite est bien placée à La Réunion et en Guyane. Face à la montée du FN, le Parti socialiste, sous l’impulsion de François Hollande et Manuel Valls, a réactivé un « front républicain » écorné en demandant à ses candidats de se retirer dans deux régions, laissant les seuls candidats de la droite affronter le FN. Il s’agit du Nord-Pas-de-Calais Picardie où Marine Le Pen (40,64% au premier tour) est donnée perdante par plusieurs sondages face à Xavier Bertrand, qui accusait un retard de 15 points sur son adversaire au soir du premier tour. Et de Provence-Alpes-Côte d’Azur, où le duel entre Marion Maréchal-Le Pen (40,55%) et Christian Estrosi, à près de 14 points derrière, s’annonce plus serré.
Le maire de Nice, un proche de Nicolas Sarkozy qui incarne l’aile droite des Républicains, s’est mué en candidat du rassemblement, en « résistant » gaulliste, pour attirer les voix des électeurs de gauche et des abstentionnistes.
Dans le Nord, Xavier Bertrand, qui a pris ses distances avec Nicolas Sarkozy, a assuré que la primaire à droite pour la présidentielle de 2017 n’était plus sa priorité et qu’il se consacrerait à la région s’il était élu.
En Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, le chef de file socialiste, Jean-Pierre Masseret, arrivé en troisième position, a refusé de se soumettre à la consigne du bureau national du PS et se présente sans étiquette PS au risque de favoriser le FN.
La triangulaire place le candidat FN Florian Philippot en position très favorable face au chef de file de la droite Philippe Richert, président sortant (LR) de l’Alsace.
« J’appelle tous les électeurs à dépasser le clivage droite-gauche qui n’a plus de sens. Nous mettrons en oeuvre une alternance apaisée. Il n’y aura pas dans les régions de chasse aux sorcières », a déclaré Marine Le Pen jeudi soir.
Le Premier ministre, Manuel Valls, qui estime que le FN peut conduire à « la guerre civile », a appelé les électeurs de gauche à voter, en les nommant, pour Xavier Bertrand, Christian Estrosi et Philippe Richert.
SARKOZY CONTESTÉ
Très en retrait depuis le coup de semonce du premier tour, où la gauche est arrivée en troisième position, François Hollande est intervenu mercredi en conseil des ministres pour exhorter « tous les responsables politiques » à la « clarté ».
Une déclaration interprétée à la fois comme un appel à faire barrage au FN et une critique à l’endroit de Nicolas Sarkozy, qui prône la doctrine du « ni ni » (ni fusion avec les listes PS, ni retrait face au FN) malgré des contestations internes.
L’ancien chef de l’Etat a estimé en outre mardi que voter FN n’était « pas immoral », dans l’espoir d’un report des voix de ses quelque six millions d’électeurs.
Dans les régions où, selon Jean-Christophe Cambadélis, « le total gauche permet de l’emporter », socialistes, écologistes et/ou Front de gauche ont fusionné leurs listes, à l’exception de la Bretagne où le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, bien placé pour l’emporter, a refusé une alliance avec EELV.
« Il y a neuf régions sur douze dans l’Hexagone, quatre régions dans les Outre-Mer, plus la Corse, où la gauche rassemblée et unie peut l’emporter. On n’en parle pas assez », a déclaré vendredi Manuel Valls sur France Inter.
En Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, la socialiste Carole Delga est donnée largement gagnante par les sondages. En Normandie et en Ile-de-France, droite et gauche sont au coude à coude. En Ile-de-France, la campagne s’est achevée dans l’acrimonie, le socialiste Claude Bartolone accusant son adversaire de droite Valérie Pécresse d’être l’avocate de « la race blanche ».
Une victoire en Ile-de-France permettrait à la droite de gommer la contre-performance du premier tour, qui a sonné l’heure des explications dans l’ex-UMP où Nicolas Sarkozy est de plus en plus contesté en vue de la présidentielle de 2017.
Avec Reuters