Le département de M. Djellab, qui croyait s’être bien préparé pour rasséréner le citoyen durant le mois de jeûne, a vite été rattrapé par la réalité du marché.
La stratégie conçue pour le secteur du commerce depuis au moins les deux dernières décennies n’a pas eu les résultats escomptés. Le constat établi depuis les années 1990 est toujours d’actualité. D’année en année, la scène commerciale du pays vit toujours les mêmes irrégularités et problématiques que tous les ministres qui se sont succédé n’ont pu résoudre. Pis encore, un fait nouveau attire l’attention de tous les observateurs pour le Ramadhan 2019. Il est l’œuvre des agents de contrôle qui ont enclenché un mouvement de grève dans plusieurs wilayas. Les inspecteurs et les contrôleurs commerciaux ont organisé des sit-in de protestation devant les divers sièges des Directions du commerce à travers le pays notamment à Alger, Chlef, Mostaganem, Laghouat et M’sila.
Ces fonctionnaires refusent de travailler dans les conditions inappropriées qui prévalent actuellement au sein des différentes structures. Ils ne veulent plus descendre sur le terrain dans la conjoncture sensible que traverse le pays afin de protéger leur santé physique et morale. Alors qu’ils devaient concrétiser des sorties d’inspection en ce début du mois sacré, les agents de contrôle ont préféré tenir mardi, dans la matinée, un rassemblement devant le ministère du Commerce pour contester les conditions de travail et exiger leur protection dans l’exercice de leur mission. Les grossistes du marché des fruits et légumes des Eucalyptus ont emboîté le pas à leurs contrôleurs et ont, eux-aussi, entamé un débrayage pour dénoncer la “mauvaise gestion” de leur administration. Cette contestation inhabituelle et inattendue des contrôleurs et des commerçants illustre parfaitement le malaise qui ronge le secteur depuis des années. Le département de M. Djellab, qui croyait s’être bien préparé pour rasséréner le citoyen durant le mois de jeûne, a été aussitôt rattrapé par la réalité du… marché. Il a tout faux car aucune des mesures prises au préalable n’a pu atténuer les perturbations classiques qu’enregistre le marché pendant le Ramadhan. Force est de constater que le ministère n’a pas réussi à éviter l’inexorable flambée des prix à la veille du rite religieux. La mercuriale s’est, en effet, enflammée dès le premier jour du mois sacré, et ce, malgré les tarifs de référence imposés par le ministère.
La hausse des prix des fruits et légumes et d’autres produits alimentaires a franchi le seuil du tolérable puisqu’elle a été estimée à 20, voire 30 DA de plus. L’autre défi de la tutelle — et qu’elle n’a pu relever — a trait à l’installation de 530 marchés de proximité dans le but de transcender les méfaits de la spéculation. Effectivement, rares sont les communes qui ont appliqué cette décision et mis en place ces marchés, dits parisiens. Où sont également les 1 000 marchés de proximité, les 800 marchés de détail et les 30 marchés de gros promis dans le cadre du programme présidentiel 2010-2014 ? Cette contre-performance a, cependant, aggravé les conséquences de l’informel. Voilà un autre mal dont l’Algérie n’arrive plus à se guérir. Quant aux quelques infrastructures édifiées, elles le sont dans des endroits inadaptés, souvent isolés, donc abandonnés par les commerçants.
Le marché continue, en outre, à faire face à de récurrentes pénuries de nombreux produits à longueur d’année notamment le lait, la pomme de terre… Par ailleurs, le ministre du Commerce s’est engagé à faire de 2019 l’année des exportations hors hydrocarbures (EHH). Or, en pratique, la situation qui prévaut dans ce secteur n’est guère favorable pour atteindre un tel objectif. Tous les paramètres plaident au contraire pour un montant insignifiant qui avoisinerait les 2 milliards de dollars d’EHH pour l’exercice 2019.
B. K.