Rencontre organisée à l’Espace Ahed-Tamimi : Hommage appuyé à l’engagement anticolonialiste du martyr Maurice Audin

Rencontre organisée à l’Espace Ahed-Tamimi : Hommage appuyé à l’engagement anticolonialiste du martyr Maurice Audin
Écrit par Nadir Kadi

Symbole de «fidélité à ses principes d’engagement total» contre le colonialisme français et son combat pour l’indépendance de l’Algérie, le parcours et le combat du martyr de la guerre de Libération nationale Maurice Audin était au cœur de la rencontre organisée, samedi dernier, à «l’Espace Ahed Tamimi »

situé au siège du Parti socialiste des travailleurs (PST) à l’occasion du Forum organisé en marge de la célébration du 1er Novembre. Lors de cette rencontre, animée par l’historien Mohamed Rebah et le journaliste et écrivain Hocine Belalloufi, la thématique aura principalement porté sur les raisons expliquant l’«engagement total» du mathématicien et militant communiste, alors âgé de seulement 25 ans, mais, également, sur la signification actuelle de son combat. Revenant ainsi sur l’aspect historique, Mohamed Rebah, auteur et historien ayant personnellement connu Maurice Audin, explique, en reprenant la déclaration de Josette Audin, que l’engagement de Maurice Audin « fut avant tout une fidélité à ses convictions, nourries par la lecture de penseurs et philosophes Voltaire, Victor Hugo ou Karl Marx». L’historien ajoute, par ailleurs, que la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat français était une avancée notable, bien que deux questions se posent toujours : «Qui a commis l’assassinat ? Et où se trouve le corps de Maurice Audin ?». Pour rappel, il fallut attendre, plus de 60 ans après les faits, pour que l’Etat français reconnaisse officiellement, par la voix du président Emmanuel Macron, que Maurice Audin est «mort sous la torture du fait du système institué alors en Algérie par la France», une déclaration solennelle faite le 13 septembre dernier, depuis le domicile de la veuve de Maurice Audin. A propos de la question des auteurs de ce crime et de l’endroit où se trouverait le corps du martyr Maurice Audin, l’historienne Sylvie Thenault nous précise, en marge de cette rencontre, que l’ouverture des archives n’apporte pas forcément de réponses. «En fait, dans les archives de l’Etat, on trouve des documents qui reprennent le mensonge de l’évasion de Maurice Audin, notamment un compte-rendu d’évasion, ou un autre portant sur la punition d’un militaire qui aurait était tenu pour responsable. Ce qui fait que dans les archives de l’Etat français, on retrouve toujours ce mensonge de l’évasion qui se répète». L’historienne, auteure de plusieurs ouvrages sur la «guerre d’Algérie», notamment sur la question des camps d’internement, Sylvie Thenault, ajoute que la vérité sur la disparition et la mort de Maurice Audin dépend davantage de la libération de la parole des derniers témoins. Elle explique à ce sujet que «le silence des témoins a été encouragé pas le silence de l’Etat. C’est pour cela que la reconnaissance officielle est importante, les témoins sont aujourd’hui et d’une certaine façon autorisés à parler». En réponse à notre question sur la nécessité d’une collaboration entre historiens français et algériens, elle répliquera que l’ouverture totale des archives des deux côtés devra nécessairement être accompagnée d’une volonté politique réelle. «Je crois que ce type d’enquêtes dépasse les compétences des historiens. A titre d’exemple, la famille Audin a déjà reçu des témoignages de personnes qui prétendaient connaître où se trouvait le corps de Maurice Audin. Et dans ce genre de cas, les historiens ne peuvent rien, il faut des commissions rogatoires, l’implication d’autorités politiques, judiciaires, policières. Le travail des historiens a des limites», a-t-elle estimé. La rencontre-débat a été suivie par plus d’une cinquantaine de personnes, accueillies par un espace lié au PST. Le choix des organisateurs aura également été de traiter la question de l’identité algérienne. La présentation de la rencontre ayant d’emblée réfuté le qualificatif «d’ami de l’Algérie», qui est parfois accolé à Maurice Audin ainsi qu’à d’autre résistants d’origine française ou européenne. Hocine Belalloufi notant en ce sens que l’action de Maurice Audin était, à elle seule, la preuve que «cette identité nationale algérienne n’était – du moins en 1957, ni ethnique ni religieuse ».