Rentrée sociale : Un automne chaud pour le gouvernement

Rentrée sociale : Un automne chaud pour le gouvernement

Après le choléra, des grèves annoncées dans l’éducation et la santé, une colère sociale palpable et une échéance présidentielle en perspective… la rentrée ne sera pas de tout repos !

C’est la rentrée sociale ! Aujourd’hui, les députés et sénateurs reprendront du service après deux mois de congé et ce mercredi, les élèves rejoindront les bancs des classes à travers tous les établissements du pays. Mais, ce n’est pas tout. La rentrée sociale de 2018 est particulière et diffère des précédentes. Le gouvernement doit faire face à des défis sur les plans politique, économique et social. Une rentrée qui d’ores et déjà s’annonce chaude comme l’étaient d’ailleurs ces derniers jours.

En effet, l’épidémie de choléra qui a fait deux victimes depuis son apparition, le 7 août dernier, a mis l’Exécutif d’Ahmed Ouyahia en alerte maximale. Plusieurs départements ministériels sont concernés par la lutte contre la maladie. Cependant, la gestion de ce dossier a démontré toutes les failles d’une équipe gouvernementale, accentuant la panique au sein de la société. Les déclarations contradictoires de ministres et d’institutions ont été une tache noire dans cette « crise sanitaire », ajoutez que jusqu’à présent, les autorités n’ont pas pu démontrer avec exactitude l’origine de l’épidémie. Tel est donc le contexte dans lequel intervient la rentrée sociale.

Au choléra, le gouvernement devra aussi vite faire face à la colère du front social. La fièvre des travailleurs monte à mesure que des grèves sont annoncées ici et là, particulièrement, dans les secteurs à vocation revendicative. Dans l’éducation et la santé, différentes catégories montent au créneau pour réclamer la prise en charge de leurs doléances, alors que l’Intersyndicale, qui regroupe une quinzaine d’organisations autonomes, devrait se réunir le 8 courant pour décider d’un plan de bataille.

Si Mme Nouria Benghebrit a tout fait pour que la rentrée scolaire de ce mercredi 5 septembre soit une réussite, elle devra aussi affronter le spectre de la grève. En effet, les intendants affiliés à l’Union nationale des personnels de l’éducation et de la formation (Unpef) annoncent une grève d’une semaine du 9 au 13 septembre, pour protester contre ce qu’ils qualifient de « marginalisation » dont ils sont victimes. Des sit-in de protestations seront organisés, ce mardi, devant les sièges des directions de l’éducation à travers les wilayas. Les intendants dénoncent leur « exclusion » de la dernière grille des salaires des travailleurs du secteur.

L’éducation et la santé renouent avec la protesta

Pour ce qui est de la santé, le Pr Mokhtar

Hasbellaoui, ministre de tutelle qui se trouve au centre des critiques avec le dossier du choléra et toute la cacophonie en termes de communications et déclarations contradictoires qui en découlent, est rattrapé par « le feuilleton » des médecins résidents. Le Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra), annonce la couleur. Il revient à la charge pour réclamer l’application des points contenus dans les P-V communs. Les résidents ont déjà organisé un rassemblement devant le siège du ministère pour protester contre « le mutisme et les promesses non tenues » des ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur. « Nous avons été ébranlés par le silence et le mépris par lesquels a été accueillie notre initiative », regrette le Camra dans un communiqué, rappelant qu’il avait mené une grève de huit mois, avant de la suspendre après les promesses de dialogue du Pr Hasbellaoui. Les médecins résidents réclament à présent la réouverture du dialogue pour « l’application » des points accordés dans le P-V de la réunion du 10 avril 2018 et du nouveau zoning, proposé par le ministère de la Santé en date du 18 avril dernier, pour la nouvelle promotion d’assistants de juillet 2018. Le Camra veut aussi, entre autres, « une session de rattrapage pour les candidats ajournés au DEMS, la réintégration des résidents exclus, le remboursement des ponctions et gel anarchiques sur salaires ».

Présidentielle 2019 : comment réunir les bonnes conditions ?

C’est dire que le gouvernement d’Ouyahia est d’ores et déjà dans l’œil du cyclone avec une montée au front qui s’ajoute à une colère sociale palpable suite à la détérioration du pouvoir d’achat des Algériens, conséquence de la crise économique. Malgré la reprise des cours du pétrole, rien n’indique que la situation va en s’améliorant. Les derniers chiffres de la Caisse nationale des retraites (CNR), qui évoque un déficit de 580 milliards de dinars, donnent froid dans le dos. La planche à billets, seule solution du gouvernement, est critiquée par tous. Ses conséquences ne vont pas tarder à se sentir, selon les spécialistes. Tous ces éléments donnent de la matière aux députés de l’opposition qui retrouveront, ce matin, l’Hémicycle de l’APN. Grèves, contestations sociales, absence de solutions pérennes à la crise et mauvaise gestion des crises, notamment de la santé, sont autant de questions sur lesquelles l’Exécutif sera acculé. Difficile de s’enfuir. Encore plus difficile lorsque la rentrée de cette année intervient à quelques mois seulement d’une échéance électorale importante, qu’est la présidentielle de 2019. Le rôle du gouvernement dans cette étape avant-élection est surtout de garantir les bonnes conditions pour réussir l’évènement en maintenant coûte que coûte « la paix sociale ». Ce fameux slogan nécessite pourtant des sacrifices, entre autres, pour les autorités de mettre la main dans la poche pour calmer la fièvre des travailleurs. Or, en temps de crise financière, on ne peut rien donner car tout simplement on n’a rien à offrir ! Un dilemme. Comment le Premier ministre Ahmed Ouyahia et son équipe vont-ils s’y prendre ?

Écrit par Houria Moula