Le magistrat en charge du dossier des 701 kg de cocaïne, saisis en 2018 au port d’Oran, est appelé à comparaître de nouveau aujourd’hui devant le procureur de la Cour suprême dans le cadre d’une enquête ciblant les réseaux mis en place par Tayeb Louh.
Abla ChĂ©rif – Alger (Le Soir) – Samaoun Sid Ahmed, ce juge chargĂ© de mener la très sensible enquĂŞte judiciaire autour de ce dossier explosif, a dĂ©jĂ comparu ce samedi devant cette haute instance de justice pour rĂ©pondre Ă des questions ayant trait aux mĂ©thodes pratiquĂ©es par l’ancien garde des Sceaux pour influencer le traitement de certaines enquĂŞtes. En clair, il a Ă©tĂ© auditionnĂ©, nous dit-on, pour savoir si Tayeb Louh lui avait adressĂ© des directives prĂ©cises pour un traitement particulier de l’affaire.
Le contenu de l’audition reste naturellement indisponible à ce stade de l’enquête, mais l’on sait, en revanche, que le juge en question ne fait l’objet d’aucune poursuite, qu’aucune charge ne pèse à son encontre, mais qu’il demeure, toutefois, à la disposition du procureur de la Cour suprême qui l’a donc convoqué une seconde fois pour la journée d’aujourd’hui. Il s’agit, dit-on encore, d’une suite de l’audition durant laquelle des précisions lui seront demandées.
Les réponses que fournira ce dernier permettront, sans nul doute, une avancée notable de l’enquête déclenchée depuis un moment pour mettre à nu les réseaux mis en place par Tayeb Louh, actuellement incarcéré et poursuivi, entre autres, pour trafic d’influence auprès des fonctionnaires de la justice. Même après avoir été écarté du gouvernement, il s’est avéré que Louh avait tenté de continuer à peser sur le fonctionnement de l’institution en effectuant des pressions sur les hommes qu’il avait lui-même mis en place et auxquels il accordait donc toute sa confiance.
Les nouvelles instances judiciaires s’en sont très vite rendu compte, des rapports détaillés ont été transmis aux plus hautes autorités qui ont procédé à de très nombreux changements, annoncés d’ailleurs. Lors de l’un de ces derniers changements, deux hommes-clés du groupe agissant sous les ordres de l’ancien ministre de la Justice ont été relevés de leurs fonctions en même temps. Il s’agit de l’ancien procureur de Sidi-M’hamed, El-Bey Khaled, et de l’ex-inspecteur général du ministère de la Justice. Ils sont tous deux poursuivis dans un dossier très lourd impliquant Tayeb Louh et établi par les enquêteurs chargés de faire la lumière sur les agissements de l’ancien garde des Sceaux. Les faits remontent à quelques mois et précèdent les évènements qui ont éclaté dans le pays après le 22 février. Des informations émanant de sources sûres indiquent que Louh avait été contacté, quelques semaines avant sa mise à l’écart, par un homme d’affaires important, un importateur oranais poursuivi par la justice et frappé d’ISTN (interdiction de sortie du territoire national). Ce dernier avait demandé à l’ancien ministre d’agir en sa faveur et de l’aider à quitter le pays promettant, en contrepartie, de payer fort en échange de cet arrangement. Louh, l’ancien procureur de Sidi M’hamed et l’ex-inspecteur général du ministère de la Justice agissent comme convenu et permettent à l’importateur de quitter le pays sans être inquiété. Un «service» qui avait été monnayé au prix fort.
Les enquêtes déclenchées peu de temps avant l’arrestation de Tayeb Louh mettent à jour la terrible affaire. Le procureur et l’inspecteur du ministère de la Justice sont relevés de leurs fonctions et interdits de quitter le territoire national. Leurs documents de voyage leur sont également retirés. Hier, apprenions-nous de bonne source, cet inspecteur général a été entendu par le procureur de la Cour suprême sur le sujet. Il a été inculpé et placé sous mandat de dépôt en milieu d’après-midi. L’audition de l’ancien procureur général de Sidi-M’hamed est également programmée durant les jours à venir.
A. C.