Les réévaluations et les avenants aux marchés octroyés pour la plupart de gré à gré, pour la réalisation de projets d’infrastructures et autres équipements publics, engendrent des surcoûts exorbitants pour le Trésor public.
La Cour des comptes, qui s’est intéressée de près à ce sujet, affirme, dans un rapport, que des projets ont été réévalués avec le triple de leur inscription initiale. Aucun secteur d’activité n’est épargné. L’étude de cet organe de contrôle révèle des dysfonctionnements dans la gestion des budgets de l’État et souligne les réévaluations des projets, dont certains ont atteint plus de 500% des dotations initiales. Toutes ces anomalies sont dues, selon la Cour des comptes, essentiellement aux dysfonctionnements dans la gestion des budgets d’équipement, à savoir les retards considérables dans l’exécution des programmes d’équipement, l’accumulation des reliquats et des réévaluations systématiques auxquelles ont recours l’ensemble des départements ministériels. La Cour des comptes fait ressortir l’écart existant entre les gros moyens financiers engagés par les pouvoirs publics dans l’espoir de relancer l’économie nationale et le retard flagrant pris pour la concrétisation des programmes d’équipement, atteignant parfois une dizaine d’années. L’on évoque le cas des réévaluations répétitives, pour lesquelles la loi sur le règlement budgétaire 2013 enregistre un montant de 555 milliards de dinars. L’on recourt souvent à la réévaluation à cause du retard dans les travaux.
À cela, l’on additionne aussi le changement dans les cours des devises et celui des matières premières utilisées. Les contraintes bureaucratiques provoquent également des réévaluations. “Mais la plus grande source de ces réévaluations n’est autre que l’immaturation ou la mauvaise maturation des projets”, estime l’économiste Ferhat Aït-Ali. Les études (des projets) se font après la projection, constate l’expert. Des lacunes persistent en effet, particulièrement en matière de préparation et d’exécution des projets, ce qui se traduit de façon systématique par l’allongement des délais et la réévaluation des coûts. “Pourquoi dans les pays voisins, les projets avancent à une cadence acceptable et arrivent à terme, pendant que chez nous les projets connaissent des situations de blocage engendrées par le non-paiement des entreprises réalisatrices et autres problèmes administratifs ?”, s’interroge Abdelhamid Boudaoud, président du Collège national des experts architectes. Dans certains cas, l’octroi des marchés obéit à d’autres considérations liées à la corruption et au clientélisme et remet en cause les procédures d’attribution des marchés publics. Des sociétés obtiennent, ainsi, des marchés de travaux publics ou de bâtiment et contractent des crédits colossaux avec même l’entame des travaux, déplore l’architecte. L’on assiste en outre à l’octroi de prêts de paiement supérieurs aux autorisations de programme. Le coût des réévaluations des programmes publics est dû, affirment des experts, à 60% aux procédures d’appels d’offres, 30% aux redimensionnements des projets et 10% aux problèmes d’évaluation des projets.