Les services de police ont mis la main sur 72 bouteilles de cocktail Molotov, prêtes à fonctionner. 39 individus qui devaient s’en servir ont été arrêtés.
Au troisième jour de ce qu’il convient de qualifier de tentative visant la déstabilisation du pays, les preuves de la machination et le déroulé du scénario se mettent en évidence. Le complot a été imaginé jusqu’à ses moindres détails. Il était même articulé en plusieurs phases pour lui garantir un maximum de succès. Le 2 janvier devait être le jour «J», mais le plan a commencé à être mis en oeuvre quelques jours avant le début des vacances d’hiver. Les lycéens avaient été «chauffés» contre la décision de réduction des jours de vacances. Par l’intermédiaire des réseaux sociaux, un mouvement de contestation anarchique a vu le jour, dimanche 17 janvier. La wilaya de Béjaïa a été le «porte-flambeau» de la protestation lycéenne, et plusieurs centaines d’élèves avaient séché les cours. L’on évoquait, à l’époque déjà, une menace d’embrasement de la rue. Le scénario imaginé par les tenants du complot était que les pouvoirs publics fassent un calcul simple. Quelques milliers de lycéens ne pouvaient pas imposer leur calendrier à toute la famille de l’éducation. Une fermeté du gouvernement sur le sujet, aurait abouti à un début des vacances dans un climat délétère.
Cela c’était la première phase du plan. La seconde phase devait consister à faire coïncider la reprise des cours prévue initialement le 2 janvier avec la grève anarchique des commerçants. Celle-ci avait eu une préparation «professionnelle». Seuls les jeunes en parlaient. L’usage des réseaux sociaux pour faire passer la pilule a été d’une «finesse» remarquable. Les adultes n’avaient rien vu venir. Au soir du premier janvier, les premiers troubles étaient annoncés ici et là. La trame du complot était de s’appuyer sur la wilaya de Béjaïa, à partir de laquelle devaient démarrer des émeutes qui devaient s’étendre aux quatre coins du pays. La colère des lycéens, frustrés par des vacances raccourcies aurait été le carburant d’une révolte, sans direction précise et avec des mots d’ordre incohérents.
Les comploteurs avaient imaginé une amplification de l’écho des violences en usant des médias audiovisuels et les réseaux sociaux comme autant de relais. La force des images aidant, la révolte s’en trouverait décuplée, surtout que des groupes formés et rémunérés devaient allumer la mèche à Alger et ailleurs. La tension devant être entretenue et alimentée sur le modèle des «révolutions» du printemps noir.
La réunion des cinq patrons de presse
Au troisième jour, les émeutes devaient concerner l’ensemble des villes et villages du pays. On imaginait même une sorte de concurrence entre les régions, à celle qui provoquerait un maximum de casse. En tout cas, les cibles étaient déjà identifiées: les commissariats, les brigades de gendarmerie, les sièges des administrations fiscales et des wilayas. Les casseurs de la wilaya de Béjaïa ayant montré la voie, au second jour, on avait vu le même scénario réédité dans la wilaya de Bouira et Tiaret.
Pour alimenter la révolte, des troubles nocturnes à Alger principalement, mais aussi dans d’autres villes du pays étaient programmés. Il était question de donner l’impression d’un pays en état de siège, en s’aidant d’amplificateurs idéaux que sont le Net et les médias audiovisuels.
Ce plan sur ses trois phases devait être déroulé en moins d’une semaine. Le résultat aurait été: des citoyens complètement terrorisés, des forces de l’ordre sur les dents et très fatiguées, une situation sécuritaire générale hors de contrôle et l’espace public aux mains de marginaux dictant leur loi et provoquant une paralysie quasi totale de tous les services publics. Le coup de grâce devait être une mégamanifestation initiée par Internet pour débouler sur Alger-Centre. Sur leur passage les jeunes saccageraient tout. Et face aux policiers, plusieurs coups de feu partiraient. La spirale de la violence n’aurait pas de fin. Au 8 janvier, le chaos se serait installé en Algérie.
Ce scénario ne s’est pas traduit sur le terrain comme le souhaitaient ses initiateurs. Plusieurs raisons sont à l’origine de l’échec. Il faut croire que les services de sécurité avaient flairé le complot. Il y a d’abord eu l’attitude, à l’époque jugée étonnante, des lycéens sur le sujet des vacances. L’Etat n’a pas durci sa position et a été jusqu’à prolonger la durée du repos hivernal, au-delà du 2 janvier. A travers cette décision, le gouvernement a désarmé les comploteurs. Et pour cause, lorsque les émeutes ont éclaté à Béjaïa, la population des manifestants était isolée. Les lycéens n’étaient pas dans le lot. L’émeute s’était retrouvée sans «carburant». Mais la machine ayant été lancée, les animateurs «professionnels» ont fait «leur travail» en poussant les jeunes à tout casser. Des individus avaient été rémunérés pour haranguer les foules. Des vidéos postées sur le Net, notamment celle du bus incendié, montraient clairement que beaucoup d’actions violentes avaient été sciemment provoquées dans le but de créer le chaos. L’absence de lycéens a mis à nu les desseins des conspirateurs.
A cette mesure préventive des pouvoirs publics qui a prouvé son efficacité, il y a eu la réaction immédiate de patrons de médias audiovisuels et de la presse écrite, qui ne voulaient pas servir de relais aux milieux hostiles à l’Algérie. Ainsi, cinq directeurs de télévisions et de journaux ont convenu d’un commun accord d’une gestion intelligente de ces émeutes. La réunion des cinq a conclu qu’il n’était pas question de donner de l’eau au moulin des conspirateurs.
Qui est derrière?
Aucune image n’est venue soutenir les manifestations. Les commentaires des journaux ont été orientés vers la condamnation des actes de vandalisme. Ainsi, les relais médiatiques n’ont pas fonctionné comme l’avaient souhaité les initiateurs des troubles. Les chaînes de télévision n’ont pas diffusé d’images. De fait, la contagion n’a pas eu lieu.
Les internautes ont répercuté les informations via les réseaux sociaux, mais tous les commentaires, sans exception aucune, allaient dans le sens de la condamnation des violences. De fait, les images qui ont circulé et qui ont été produites, dans leur majorité, par les conspirateurs n’ont pas servi la cause des manifestants, bien au contraire.
Malgré l’échec constaté de la tentative de déstabilisation, à son premier jour, la machine a continué à fonctionner, telle une poupée désarticulée. Des tentatives de créer des situations de chaos ont été signalées dans plusieurs quartiers d’Alger et dans d’autres villes du pays. Ces petits incidents étaient initialement destinés à alimenter le moteur de la révolte, mais comme il n’y a pas eu l’effet escompté, cela s’est transformé en incidents isolés, apparemment sans objectifs cohérents. Mais l’intention de nuire a bel et bien été établie. Pour cause, les services de police ont mis la main dans un magasin, dans la commune de Aïn Naâdja, d’un arsenal devant servir à alimenter l’émeute. 72 bouteilles de cocktail Molotov, prêtes à fonctionner ont été saisies. Le réseau de casseurs, composé de 39 individus qui ont été arrêtés, a été démantelé.
Il s’agirait dans leur majorité de repris de justice et d’individus écartés des programmes de relogement.
Au troisième jour de la tentative de déstabilisation, il convient de noter que l’opération a totalement échoué. La machine s’est éteinte d’elle-même. On retiendra dans cette bataille, un sens élevé de patriotisme des Algériens, une approche intelligente des médias et un comportement exemplaire des citoyens sur les réseaux sociaux. Ce sont les armes déployées par la société algérienne contre les conspirateurs. Qui sont-ils? On devine l’origine du coup, mais mettrons-nous un jour des noms sur ces comploteurs?