Après huit années de crise de gestion et deux années de crise sanitaire, l’économie de l’Algérie a repris du poil de la bête en 2022. Comme le montrent plusieurs études et rapports, tous les indicateurs sont au vert… ou presque.
Hausse des prix du pétrole, position stratégique dans le marché du gaz, records des exportations hors hydrocarbures, relance de l’investissement et de l’automobile, poursuite et renforcement de la politique sociale de l’État… Dans un contexte mondial morose, voire inquiétant, l’année économique de l’Algérie a été plutôt bonne.
Cependant, il existe une ombre au tableau : le taux d’inflation élevé, notamment des produits de base. En 2022, les Algériens ont vu les prix des produits de large consommation s’envoler. Et cela a, en toute logique, fortement impacté leur pouvoir d’achat.
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Dans cette rétrospective, nous allons, dans un premier temps, revoir ensemble les faits, les événements et les décisions qui ont marqué l’économie algérienne durant l’année qui s’achève ; dans un second temps, nous essayerons de dresser la liste de ses objectifs pour l’année qui commence.
I. Économie de l’Algérie : quel bilan pour 2022 ?
Le fait économique le plus marquant de l’année 2022 est sans doute le rehaussement des prix des hydrocarbures après plusieurs années de recul. À l’origine de ce « bouleversement » se trouve le déclenchement en février du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Un événement qui a aussi provoqué une crise énergétique mondiale touchant notamment le gaz. Résultat, les recettes pétrolières de l’Algérie ont explosé pour culminer à 50 milliards de dollars et ses exportations de gaz naturel ont grimpé à un niveau historique jamais atteint auparavant. Les exportations hors hydrocarbures ont, elles aussi, enregistré le chiffre record de 6 milliards de dollars.
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Enfin des voitures à des prix « abordables » !
L’année 2022 a aussi été l’occasion pour les Algériens d’entrevoir le dénouement de la crise du marché automobile qui dure depuis 2017. Le 17 novembre dernier, le gouvernement, sur ordre du président Tebboune, a décidé de réautoriser l’importation de véhicules neufs et de voitures de moins de 3 ans. En outre, l’Algérie a affiché sa volonté de relancer l’industrie automobile sur le territoire national. Dans cette optique, le ministère de l’Industrie a signé à la mi-octobre un contrat avec le constructeur italien Stellantis-Fiat.
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Durant cette année qui vient de s’achever, l’État a confirmé son caractère social en décidant un certain nombre de mesures. La première d’entre elles fut l’instauration, au mois de mars et pour la première fois en Algérie, d’une allocation chômage. Initialement fixée à 13 000 DA, le président Tebboune a ordonné de l’élever à 15 000 DA en 2023. Les pensions de retraite et les salaires des fonctionnaires connaîtront également des réévaluations. Les seuils minimaux des pensions de retraite augmenteront de 5000 DA ; quant aux salaires, ils connaîtront une réévaluation allant de 4500 DA à 8500 DA pour 2,8 millions fonctionnaires.
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Le pouvoir d’achat – talon d’Achille de l’économie algérienne
Toutefois, le bilan économique de l’Algérie pour l’année 2022 présente deux faiblesses majeures : la baisse du pouvoir d’achat et les crises des produits de base (pain, lait, huile et sucre). En raison, entre autres, d’une inflation galopante et de l’action des spéculateurs, les prix des produits de large consommation (fruits, légumes, viandes, fournitures scolaires, électroménager…) ont atteint des seuils vertigineux. En conséquence, le pouvoir d’achat des Algériens s’est littéralement effondré.
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Pour tenter d’endiguer le phénomène, les pouvoirs publics ont entrepris une série de mesures. La plus importante d’entre elles a été l’enclenchement d’une lutte sans merci contre la spéculation illicite. Les services de sécurité ont arrêté des dizaines de spéculateurs que la justice a condamnés à de très lourdes peines de prison. Le gouvernement a aussi décidé de plafonner les prix de certaines denrées, comme la viande blanche, et reprendre l’importation de certaines autres (viande rouge, blé…). La bataille sera longue…
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II. Économie de l’Algérie : quels objectifs pour 2023 ?
Après l’évocation des principaux faits qui ont marqué l’année économique de l’Algérie, il est maintenant temps de passer aux objectifs de 2023.
Il faut dire que pour l’année qui vient, les ambitions économiques de l’Algérie sont grandes ! Lors du mois de décembre 2022, les élus de l’Assemblée nationale ont voté le plus gros budget de l’État depuis l’indépendance du pays ; celui-ci avoisine les 100 milliards de dollars. Les objectifs économiques de l’Algérie seront soutenus par des recettes pétrolières de 55 MDS USD, des exportations hors hydrocarbures de 6 MDS USD, des réserves de change de 60 MDS USD et une position d’exportateur de gaz incontournable.
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Les priorités – doubler les exportations de gaz et adhérer aux BRICS
À propos de gaz justement, le président Tebboune a affirmé que l’Algérie ambitionne pour l’année 2023 de doubler ses exportations pour atteindre le volume de 100 milliards de m3. En sachant que le niveau de production actuel s’élève à 102 milliards de m3, dont la moitié est destinée à la consommation domestique, il faudra augmenter ce chiffre à environ 150 milliards de m3. Un objectif largement à la portée de notre pays compte tenu de ses 2400 milliards de m3 de réserves de gaz prouvées (10e mondial). En 2023, l’Algérie aspire également à exporter son excédent de production d’électricité vers l’Europe via un câble sous-marin de 270 km qui va jusqu’en Italie.
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L’autre priorité de l’Algérie pour l’année 2023 est l’adhésion au groupe des BRICS. Abdelmadjid Tebboune a exprimé l’intention de notre pays de rejoindre ce bloc économique une première fois, au mois de juillet dernier, et il l’a renouvelée en ce mois de décembre expliquant que la Russie, la Chine, l’Afrique du Sud et le Brésil étaient d’ores et déjà d’accord. Il s’agira donc pour l’Algérie, en 2023, de satisfaire aux conditions minimales d’admission aux BRICS, à savoir un PIB de 200 mds USD et un taux de croissance de 5 %. Notons à ce propos que le PIB de l’Algérie en 2022 devrait dépasser 190 mds USD et la Loi de finances 2023 prévoit une croissance de 4,1 % pour l’année en cours.
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Investissement, industrie, agriculture et commerce extérieur
En 2023, le gouvernement nourrit aussi l’objectif de poursuivre sa politique d’encouragement de l’investissement enclenchée en 2022 par la promulgation de la nouvelle loi sur l’investissement. Celle-ci est venue lever les obstacles bureaucratiques que bloquaient des centaines de projets. En juin dernier, un responsable du gouvernement a fait savoir que la mesure a déjà libéré près de 900 projets en suspens générant ainsi quelque 34 000 postes d’emploi.
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2023 se veut aussi l’année de la mise en place d’une véritable industrie locale avec des taux d’intégration d’au moins 40 %. L’implantation de l’usine automobile Stellantis-Fiat avec un objectif de produire 90 000 véhicules dès l’année prochaine pourrait faire office de projet pilote en la matière.
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Par ailleurs, le ministre du Commerce a déclaré que son département ambitionne d’augmenter les recettes des exportations hors hydrocarbures à 10 mds USD en 2023. Pour 2022, celles-ci se sont élevées à 6 mds USD, un record historique ! En ce qui concerne le volet critique de l’agriculture, l’objectif est de porter la production céréalière nationale à 9 millions de tonnes par an. Cela exige d’atteindre un rendement moyen de 30 quintaux par hectare sur les trois millions d’hectares ensemencés que compte l’Algérie.
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L’appréciation du dinar algérien, la quête ultime
La réalisation de ces objectifs, ou d’une partie d’entre eux à tout le moins, permettra de concrétiser un vœu cher aux Algériens : l’appréciation de la valeur du dinar. Car un dinar plus fort représente le seul réel gage d’un rehaussement du pouvoir d’achat et fera en sorte que les augmentations des salaires des pensions de retraite ne fondent pas comme neige au soleil face à l’inflation.
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Cependant, cette quête suppose l’éradication de l’informel qui gangrène l’économie nationale, la lutte contre la bureaucratie qui bloque les investissements et le rétablissement de la confiance des investisseurs nationaux et étrangers que les procès pour corruption et les changements fréquents de la réglementation ont fortement altérés. Un vaste chantier…