Sahara Occidental La mise à nu

Sahara Occidental La mise à nu

Pour ceux qui en doutaient encore, la sortie tonitruante des membres du comité spécial de décolonisation des Nations unies a levé le voile sur le recours au chantage exercé par le Maroc coupable de « pratiques immorales, irrespectueuses et discourtoises ».

Devant la commission des questions politiques spéciales, le rapporteur du séminaire régional, organisé par le comité spécial en mai 2015, a révélé la démarche entreprise par les représentants marocains pour faire changer par la menace les termes du rapport final adopté en bonne et due forme.

« J’ai moi-même lu tout le rapport procédural devant tous les participants au séminaire, préalablement à son approbation », a-t-il confirmé. Par delà le harcèlement subi, aux prix de multiples tentatives exercées sur sa personne pour influer sur le contenu d’un document officiel, il s’agit fondamentalement du respect du fonctionnement et de la décision souveraine d’une instance onusienne foulée aux pieds par l’occupant marocain qui n’en est pas à sa première bravade.

La défiance marocaine, largement exprimée par le reniement des engagements internationaux conclus sous l’égide de l’ONU, s’inscrit dans le déni de la légalité internationale. Elle prend la forme de dérives immorales, inscrites à la base dans le rejet du référendum d’autodétermination que la Maroc de Hassan II a pourtant prescrit dans les accords de paix de septembre 1991. Aujourd’hui, l’étau se resserre sur Rabat accusé de toutes parts de pratiques mafieuses.

A son tour, le représentant équatorien, présidant à plusieurs reprises les sessions de comité spécial de décolonisation, a fermement condamné les tentatives marocaines pour imposer ses positions politiques majoritairement rejetées.

« Nous ne sommes pas de ceux qui cèdent à la pression, a-t-il déclaré. De James Baker, récusé pour sa méthode jugée « déséquilibrée et partiale », à l’actuel envoyé spécial de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, soumis au même traitement incongru, le diktat marocain chemine le processus de décolonisation inachevée et oblitérée par le jeu d’influence de certaines puissances, membres du conseil de sécurité, tentées par les parts de marché illégalement acquis.

Le cas suédois est éloquent. Face à l’éventualité d’une reconnaissance de République arabe sahraouie démocratique (RASD), l’arme du boycott a été brandie par le Maroc bloquant, par voie de justice, l’ouverture d’un magasin Ikea dans la banlieue de Casablanca, et menaçant de sévir contre les produits et la vingtaine de sociétés suédoises établies dans le pays, en particulier dans les secteurs des télécommunications et du transport.

Le temps est désormais compté pour l’occupant appelé par le représentant sahraoui auprès de l’ONU, Mohamed Boukhari, à faire le choix du référendum « avant qu’il ne soit trop tard » et surpris par la frilosité marocaine, inexplicable du reste, par les certitudes de la prétendue « marocanité ».

A juste titre, il s’est donc interrogé sur les raisons de « la peur du référendum accepté auparavant ». C’est ce « droit fondamental », codifié par la charte des Nations unies et concrétisé sous l’égide de l’ONU et de l’OUA, qui a été défendu par le représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations unies, Sabri Boukadoum.

Tout en rappelant, dans son intervention, lors du débat de la commission des questions politiques spéciales et de décolonisation de l’ONU, que la question sahraouie est aussi une « question africaine », il a mis en avant la volonté de coopération de l’Algérie qui sera « la première à se féliciter lorsque le peuple sahraoui aura décidé de son sort ».

Dans la bataille de la crédibilité, il est impératif de veiller au respect des « règles fixées par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité » et à une intervention de l’ONU tenue dès lors d’« assumer ses responsabilités et à veiller à la protection des droits de l’homme et à la préservation des ressources naturelles de ce territoire ».

Il est parfaitement admis que le dossier sahraoui, « du ressort exclusif des Nations unies », comme vient de le souligner la Haute représentante de l’UE et vice-présidente de la Commission européenne, Federica Mogherini, en réponse à une question de l’eurodéputé espagnol, Josu Juaristi Abaunz, invitant l’UE à désigner un expert pour « surveiller les droits de l’homme » au Sahara occidental et à « mener des actions auprès de l’ONU » pour élargir le mandat de la Minurso (Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental), suscite la légitime inquiétude de la communauté internationale en matière de la quête de la paix et de la stabilité dans la région.

Larbi Chaabouni