Dans son édition du mercredi 6 j u i n , l e Canard Enchaîné affirme que les services secrets français sont au courant du financement des terroristes du Sahel par le Qatar.
«Le tout nouveau ministre de la Défense, Jean Yves Le Drian, n’ignore aucune des mauvaises nouvelles arrivées d’Afrique subsaharienne», écrit le journal qui affirme que Le Drian n’ignore rien non plus «de l’implication de ‘‘notre ami du Qatar’’, formule d’un officier de l’étatmajor dans la ‘‘capture’’ du Nord- Mali par plusieurs groupes djihadistes».
Le Canard Enchaîné rappelle qu’il avait déjà cité le 26 mars dernier les accusations des services secrets contre le Qatar qui aurait financé les groupes terroristes activant dans le Sahel. Le journal français, qui revient sur les inquiétudes des responsables français quant aux développements de la situation sécuritaire au Sahel, affirme que le Qatar qui a déjà fourni armes et argents aux révolutionnaires Tunisiens, Egyptiens et Libyens, a aidé financièrement le Mnla, Ansar Eddine et le Mujao.
« Selon les renseignements recueillis par le DRM (Direction du renseignement militaire français. Ndlr), les insurgés touareg du Mnla (indépendantiste et laïcs), les mouvements Ansar Eddine, Aqmi (Al Qaïda au Maghreb Islamique) et Mujao (Mouvement de l’unicité et du Djihad en Afrique de l’Ouest), ont reçu une aide en dollars du Qatar.» Ce qui était un soupçon se confirme.
Le Qatar veut déstabiliser toute la région d’Afrique du Nord et du Machreq sans se soucier des conséquences politiques et sécuritaires qui en découlent. Aujourd’hui, la Libye est livrée à elle-même, l’Egypte ne connaîtra pas la stabilité de sitôt et la Tunisie tente difficilement de faire taire ses démons. Quant au Mali, il risque l’implosion et une guerre civile le menace tout autant que la Syrie. Jeudi dernier, un accrochage entre rebelles touareg et islamistes d’Ansar Eddine a eu lieu près de Kidal, une ville du nord du Mali. Les combats se sont arrêtés hier matin.
«Les quelques drapeaux du Mnla qui flottaient dans la ville ont été enlevés, on ne voit plus qu’Ansar Eddine en ville», a ajouté cet habitant, a rapporté l’AFP. Interrogé par téléphone satellitaire dans la nuit, Mohamed Ag Mamoud, un combattant d’Ansar Eddine, avait expliqué cet accrochage par le fait que «toute cette semaine, le Mnla a manipulé à Kidal des civils qui ont manifesté» contre le mouvement islamiste.
Les 5 et 6 juin, des habitants de cette ville, surtout des femmes et des jeunes, avaient manifesté contre la présence des islamistes et dit leur soutien au Mnla. La première manifestation avait été violemment dispersée. Cependant, dans les deux camps on s’est employé hier à minimiser l’incident de la nuit dernière.
«Il n’y a rien eu de grave», simplement «quelques coups de feu», a affirmé un haut responsable du groupe islamiste à Kidal. Mossa Ag Attaher, porte-parole du Mnla basé à Paris, a carrément démenti tout «échange de tirs». Par ailleurs, un nouveau groupe armé, le Mouvement des patriotes pour la résistance et la libération de Tombouctou (Mprlt), a annoncé jeudi dernier sa création en vue de «chasser les islamistes» de cette cité historique du nord du Mali.
Dans ce contexte, l’UA va saisir l’ONU pour obtenir son «appui» à une intervention militaire dans le Nord malien, ont annoncé jeudi soir à Abidjan des responsables des Nations unies, de l’UA et de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), réunis dans le «groupe de soutien et de suivi sur la situation au Mali». Les participants ont promis un appui, notamment «financier» et «logistique», pour aider l’Etat malien à reprendre cette région «dans les plus brefs délais possibles».
A l’issue d’une réunion de chefs d’Etat, mercredi dernier à Lomé, la Cédéao avait «réaffirmé » sa décision d’envoyer des troupes au Mali et décidé d’une saisine du Conseil de sécurité de l’ONU. Cette idée avait été lancée le 30 mai par le chef de l’Etat béninois et président en exercice de l’UA, Thomas Boni Yayi. Mais les contours, les composantes et le mandat exact d’une éventuelle opération militaire dans le Nord malien ne sont toujours pas déterminés.
L’ONU, l’UA et la Cédéao ont aussi «exigé» que l’ex-junte militaire, installée après le putsch du 22 mars à Bamako, «soit immédiatement dissoute et se retire complètement de la gestion de la transition». Les putschistes se sont officiellement retirés en vertu d’un accord conclu le 20 mai avec la Cédéao, mais ils restent très présents face au président intérimaire, Dioncounda Traoré, et au gouvernement, en place pour une transition d’un an et dont l’un des défis majeurs est la reconquête du Nord.
A. G.