Un mois de novembre très doux, sans pluie : la sécheresse inquiète le monde agricole, même si la cote d’alerte n’a pas encore été atteinte. Une sévère sécheresse sévit sur la plupart des régions nord de l’Algérie, suscitant l’inquiétude des fellahs qui commencent à être envahis par le doute. Le manque de pluie est accompagné d’une remarquable douceur, avec des températures très élevées pour la saison, faisant de ce mois de novembre un des plus doux dont se rappellent les opérateurs du secteur agricole.
A la mi-novembre, certaines régions du pays, notamment dans l’est et les Hauts Plateaux, avaient enregistré deux ou trois journées de pluie, mais dans d’autres régions, comme la plaine du Chéliff, il n’y a pas eu une seule journée de pluie, en ce début de saison. « Il n’y a pas eu de pluie significative depuis avril dernier », rappelle un fellah de Chlef. Cela fait donc près de sept mois qu’il n’a pas plu, une période exceptionnellement longue. La situation n’est pas inédite, mais elle révèle une évolution inquiétante du climat, avec une absence quasi-totale des pluies d’automne.
A l’heure actuelle, la situation n’est, toutefois, pas alarmante, bien que les premiers effets de la sécheresse commencent à être ressentis à la marge. Les réserves demeurent consistantes, et devraient permettre d’atteindre l’hiver, sans difficultés particulières. Selon l’Agence Nationale des Barrages, le taux de remplissage est de 70%.
Grâce à la multiplication des barrages et la mobilisation de ressources, aucune région n’est menacée de véritable pénurie. Les bassins d’irrigation n’ont pas encore été touchés. De manière générale, les grands périmètres irrigués n’ont pas trop souffert.
DOUTES
Ceci ne signifie pas que des difficultés ne vont pas apparaître pour l’agriculture. Car l’absence de pluie s’est fait sentir au niveau des nappes, dont le niveau a sérieusement baissé. Le débit des puits traditionnels, fortement sollicités pour l’agriculture, a fortement diminué. Spécialisé dans le curage des puits, un opérateur traditionnel affirme que « le niveau de l’eau n’a jamais été aussi bas ». La preuve, dit-il dans un grand rire, « c’est que je suis fortement sollicité depuis un mois ».
Dans la plaine du Chéliff, on commence à parler de restrictions dans les lâchers d’eau au profit de l’agriculture. Rien d’officiel n’a été annoncé, mais les rumeurs ont installé le doute. D’ores et déjà, des fellahs hésitent à lancer certains projets, et des terres risquent de rester en friche, non à cause du manque d’eau, mais simplement à cause du doute qui s’installe.
Avec l’approche de l’hiver, les besoins pour l’irrigation ont tendance à diminuer, mais dans la plaine du Chéliff, jamais les systèmes d’irrigation n’ont été autant sollicités, pour un mois de novembre. D’habitude, les champs de pomme de terre ont besoin d’être irrigués « une à deux fois entre la mi-octobre et la récolte », en décembre. Cette année, « on continue d’irriguer à un rythme proche de celui de septembre », selon un fellah.
LES PATURAGES DU SUD SAUVES
Pour le bétail, par contre, la situation est plus contrastée.
Dans le nord du pays, où domine l’élevage intensif, la botte de paille a atteint le prix record de 500 dinars, celle de foin frôle les 1.000 dinars. Son, orge et maïs atteignent également les sommets.
Par contre, dans les régions d’élevage extensif, hauts plateaux et steppe, il a suffi de quelques rares pluies pour que les pâturages se régénèrent. Du côté de Aïn Ouessara, le bétail trouve de quoi se nourrir, ce qui allège, considérablement les frais, affirme un éleveur. Selon lui, la différence est nette entre les besoins de l’élevage et celui de la céréaliculture.
Les champs de blé, ensemencés depuis un mois déjà, commencent à souffrir de la sécheresse, alors que le bétail trouve son compte.
Tout le monde s’accorde, toutefois, à dire que la situation est au bord de la rupture. « Tout peut basculer dans les quinze prochains jours », selon un technicien de l’Agriculture. Quelques journées de pluie d’ici la fin du mois peuvent changer la donne, et préparer une bonne année, dit-il.
A l’inverse, si le mois de novembre se termine sans pluie, les déficits accumulés deviendront inquiétants, et il sera difficile de les rattraper, même avec des pluies abondantes, en décembre-janvier.