Le gouvernement revient aux restrictions des importations au moyen, cette fois-ci, d’une surtaxe dont le taux oscille entre 30 et 200%, instituée par la loi de finances complémentaire 2018. Pensez-vous que la parade fiscale à la hausse effrénée de la facture d’importation serait plus efficace que les dispositifs d’interdiction ?
Effectivement ! Nous pensons que la régulation par un dispositif fiscal est plus efficace que les deux précédents dispositifs qui privilégiaient le contingentement par les licences d’importation et l’interdiction pure et simple à l’importation de centaines de biens et consommables. Cette taxe, appelée le droit additionnel provisoire de sauvegarde, nous l’avons nous mêmes réclamée car nous pensions que le dispositif des licences et celui de l’interdiction à l’importation des produits ne pouvaient atteindre les objectifs fixés. Cette taxe est de nature aussi à encourager la production nationale, même si, telle qu’elle a été présentée, elle ne peut permettre d’atteindre les objectifs, étant donné qu’elle ne peut être une alternative durable. Elle est plutôt conjoncturelle. Pour qu’elle puisse jouer pleinement son rôle, cette taxe doit être accompagnée par des mesures qualitatives à travers l’instauration de barrières et la mise en place d’une politique portée sur l’aspect qualitatif au-delà des mesures quantitatives. Il s’agit aussi de mettre en place des laboratoires de contrôle qualité accrédités au niveau des différents postes frontaliers. Ces barrières qualitatives sont en mesure de dissuader certains importateurs et, par la même protéger, la production nationale. Il s’agit par-dessus tout d’une approche tout à fait tolérée par les accords internationaux en matière d’échanges commerciaux.
Quel retour sur investissement peut-on espérer par l’institution du droit additionnel provisoire de sauvegarde ? Des économies sont-elles enfin possibles sur la balance commerciale ?
Logiquement, le droit additionnel provisoire de sauvegarde va réduire les importations en termes de quantité, renflouer davantage les caisses du Trésor public et donner, par la même, une marge de manœuvre à la production nationale pour qu’elle puisse évoluer aussi bien qualitativement que quantitativement. Il s’agit donc d’un apport appréciable pour l’économie du pays. Les deux premiers dispositifs ont, en revanche, bloqué notre économie et affecté nombre d’entreprises qui se sont retrouvées à court de matières premières et dont plusieurs d’entre elles n’ont pas hésité à déposer le bilan sous le coup d’une situation asphyxiante. Le droit additionnel provisoire de sauvegarde entraînerait probablement un renchérissement des prix à l’importation, mais les entreprises pourraient s’organiser en groupements d’achats, une formule qui permettrait de mieux négocier avec les fournisseurs et de mieux appréhender la hausse des prix à l’importation des intrants.
Pensez-vous que la régulation du commerce extérieur concourrait au retour à l’équilibre tant espéré des finances publiques ?
Je ne le pense pas ! Car ces dispositifs, s’ils ne sont pas accompagnés par une ouverture de l’économie nationale, par un soutien à la production locale et par un accompagnement et des facilitations à l’investissement aussi bien local qu’étranger, leur impact sur la trésorerie publique ne sera que marginal. Il faut comprendre au final que construire une économie nationale dynamique et compétitive est la seule clé de voûte. Et à défaut de cet impératif, ces dispositifs de régulation du commerce extérieur, qui ne sont d’ailleurs que conjoncturels, ne peuvent être d’aucun impact significatif sur les positions financières internes et externes.