C’est sous l’égide de l’Association nationale des commerçants et artisans que les boulangers sont intervenus pour dénoncer « le gaspillage et la qualité douteuse du pain». Les Algériens consomment 4 millions de baguettes par jour, l’équivalent de 50 millions de dinars/jour, ce qui dépasse largement la norme, ce qui fait dire aux experts que la consommation des Algériens dépasse largement leurs besoins. D’autant plus que la FAO et l’OMS considèrent l’Algérie comme deuxième importateur mondial de blé.
Abdelhalim Benyellès – Alger (Le Soir) – Le président de l’Association nationale des commerçants et artisans (ANCA), Tahar Boulenouar, dénonçant le gaspillage du pain, dira d’emblée : «Nous achetons le pain pour le manger et non pour le jeter !» Ceci pour dire que le dossier du pain suscite un grand débat en Algérie et interpelle les autorités publiques. Alors que Omar Amer, président de la Commission nationale des boulangers, déclare que ce dossier nécessite un traitement particulier, considérant qu’il a pris des proportions politiques. « Ce n’est pas le pain qui est subventionné par l’Etat mais c’est la farine », une affirmation qui met en valeur les charges qui pèsent sur la rentabilité du boulanger sous le poids des prestations des ouvriers, les redevances de l’eau, l’électricité, le gaz ainsi que les consommations en huile, levure et sel. «L’augmentation du prix du produit est négative officiellement, mais face au problème de la rentabilité de ce commerce, beaucoup de solutions sont envisageables», rassure-t-il. Dans ce même contexte, Tahar Boulenouar a annoncé que parmi les 21 000 boulangeries existantes par le passé, il n’en reste que 7 000 à 8 000 au niveau national, avertissant que «dans 5 années, il n’y aura plus de pain».
Face à ce gaspillage constaté aussi bien chez les citoyens mais d’une façon alarmante au niveau des casernes, entreprises, hôpitaux, restos universitaires et cantines scolaires, il n’hésite pas à soulever le problème de la corruption qui gangrène ce marché.
«Le gaspillage du pain constaté au niveau des restos universitaires donne à réfléchir», tonne-t-il, avant de dénoncer l’absence de contrôle. Chiffres à l’appui, il dira qu’«entre 4 millions et 10 millions de baguettes/jour sont consommées par les Algériens». Et de conclure qu’ « un grand travail de sensibilisation nous attend».
Ceci pour avertir aussi sur la qualité du pain que consomment les Algériens en raison de la qualité de la farine qui entre dans sa composition. Boubernou Mejdoub, chargé de la formation au niveau de la Commission nationale des boulangers, dira à ce sujet que la farine blanche est synonyme de sucre, ce qui est nocif pour la santé. En d’autres termes, «cette farine blanche est l’équivalent de 70% du taux de composition du pain».
Pis encore, il enfonce le clou en dénonçant certains boulangers qui rajoutent le sucre à la pâte en guise d’améliorant, transformant la baguette de 250 grammes à 250 grammes de sucre. Selon lui, un «gros» travail de sensibilisation s’impose dans le but de convaincre les Algériens de consommer le pain complet. C’est une alternative qui s’avère payante contre le gaspillage et pour une consommation saine. «Un pain lourd fait de son et d’orge sans produit chimique remplacera l’améliorant», a-t-il fait savoir, avant de préciser qu’«un seul pain noir peut remplacer quatre baguettes».
Pour cela, l’intervenant préconise l’introduction d’une nouvelle industrie de boulangerie par l’introduction du four à dalle qui prend la place du four rotatif existant, mais pourvu que cette politique soit encouragée par l’Etat, interjecte-t-il.
Parmi les bienfaits de cette alternative de «pain varié et de qualité», le chargé de la formation cite l’économie d’énergie chez les ouvriers, la rentabilité du boulanger ainsi que la santé du consommateur. Avant de rassurer que le matériel fabriqué localement est disponible.
Enfin, parlant de l’introduction du sac en papier, le président de l’Association nationale des commerçants et artisans dira que la question évoquée il y a quelque temps relève de la «pure démagogie», ceci pour dire qu’elle est irréalisable dans les conditions actuelles. Plus explicitement, il dira que cela relève de la volonté des pouvoirs publics dans l’introduction du sac à papier car le grand perdant dans l’opération est le boulanger.
A.B