Soufiane Djilali, le président du parti Jil Jadid, fondé en mars 2012, était, ce mercredi, l’invité du forum du quotidien El Wassat. Face à la presse, il s’est livré à l’analyse de la situation politique en rapport avec le questionnement sur les voies et moyens de sortie de crise induite par le mouvement populaire, Hirak, né au lendemain du 22 février dernier, ses acquis et la problématique de la recherche des solutions idoines devant être trouvées.
C’est le substrat des questions des journalistes auxquelles il a tenté de proposer des éléments de réponses estimant que «nous sommes dans une situation de rapport de force» et qu’il faut «revenir à la véritable démocratie». Il récusera l’idée de l’homme providentiel capable de faire l’unanimité et de fédérer toutes les tendances de l’opposition, citant, tour à tour pour cela, l’ancien président Liamine Zeroual, un homme fini qui appartient au passé ; Taleb Ibrahimi du régime de Boumediène et du parti unique, Saïd Sadi également décrié au même titre que les autres, en dépit de son engagement pour la démocratie.
Soufiane Djilali avoue ainsi qu’il est pour l’heure impossible de demander à l’opposition de dégager une position commune voire un programme commun. Il nous faut sortir de cette logique, dira-t-il. Relevant que tout fonctionne en dehors de la Constitution qui ne régit plus la réalité politique, on est de fait dans une situation de transition. Pour lui, la solution est dans l’élection présidentielle selon un processus crédible et transparent. Il faut bien un président de la République afin que les choses rentrent dans l’ordre pour ce qui fait la vie d’un pays à plusieurs niveaux : politique, économique et sociale. Il s’agit par la suite de mettre en place une charte à laquelle se joindront toutes les forces de l’opposition, afin d’entamer un débat en vue d’une Constitution.
Cette dernière, insistera-t-il, doit tirer sa légitimité de la volonté populaire et ne pas subir les visées et sautes d’humeur du président élu, comme par le passé, ajoutant que pour cela, il faut que soient limitées ses prérogatives.
Soufiane Djilali poursuivra ses explications en pédagogue quant aux structures de l’ensemble gouvernemental indiquant qu’il faut revoir le mode de désignation du gouvernement, le droit des députés d’interpeler les membres de l’exécutif sur tel ou tel dossier, revoir en précisant le contenu de l’immunité parlementaire qui ne doit concerner que le terrain politique.
Le président de Jil Jadid rappellera, pêle-mêle dans ce cadre, un certain nombre de revendications dont une Cour constitutionnelle indépendante de l’exécutif et, pour être dans l’air du temps, la prise en compte des mesures d’apaisement dont la libération des détenus d’opinion et du Hirak, la levée des barrages à l’entrée de la capitale les vendredis, la fin de mesures d’intimidation et de répression contre la liberté de la presse, voire libérer l’accès pour l’opposition aux médias lourds. Mais, soulignera-t-il, ces mesures sont devenues un tabou pour l’institution militaire. Il se désole de l’atmosphère de suspicion qui entoure les relations de l’état-major de l’armée avec l’opposition. « Le pouvoir a perdu la boussole » dit-il.
Dans la foulée, il reprendra la revendication du départ de toutes les figures du système dont le président de l’Etat Bensalah et le Premier ministre Bédoui, relativisant toutefois que le départ de ces deux derniers n’est pas une fin en soi parce qu’on ne peut pas livrer le pays aux quatre vents. C’est l’occasion pour lui de s’attarder sur le Hirak, sa portée, sa durée. Le mouvement populaire doit durer mais ne peut pas s’éterniser au risque d’aller vers la lassitude.»Il faut s’éloigner des chimères et donner un contenu politique au slogan «yetnahaou ga3». Pour lui, «nous sommes en pleine surenchère et cela me fait peur».
A propos de la désobéissance civile, Soufiane Djilali n’y croit pas et qu’elle peut même se retourner sur le quotidien du citoyen. Il met beaucoup d’espoir dans l’émergence d’une nouvelle réalité portée par le Hirak et les idées et valeurs qu’expriment les générations d’aujourd’hui. « J’y fonde beaucoup d’espoirs ». Il fait le constat que nous sommes hors du cadre de la Constitution même si ce n’est pas officiellement reconnu, et de ce fait, aussi dans la transition politique.
Soufiane Djilali interviendra aussi sur la question sensible du rôle de l’institution militaire qui a fait intrusion ouvertement dans la gestion politique, affirmant que le chef de l’Etat ne décide de rien et qu’il exécute les consignes de l’état-major de l’armée.
Il reste que l’institution militaire est une donnée incontournable dans l’édification de l’Etat algérien moderne et je ne vais pas ici reprendre la controverse de la primauté du civil sur le militaire, point de discorde apparu, rappellera-t-il dès 1956, en pleine guerre d’indépendance. Le chef de Jil Jadid soulignera néanmoins que la politique doit être l’apanage du personnel politique et aux militaires l’armée.
Concernant la réunion prochaine de l’Alternance démocratique, le 31 août, Soufiane Djilali dit vouloir y participer « si on est invité ».
B. T