La fracture n’est certainement pas résorbée et la «guerre des mots» entre les leaders promet des épisodes très intenses.
Les deux partis au pouvoir ont fait bloc lors du vote de la loi de finances 2016. Devant une opposition survoltée, le FLN et le RND ont tenu bon et tenté de défendre le projet du gouvernement avec plus ou moins de réussite dans le discours, mais une «volonté de fer», lorsqu’il s’est agi de dire «oui» à la mouture présentée par l’Exécutif. Pourtant, quelques heures avant le vote, les couloirs de l’APN bruissaient de rumeurs sur une probable volte-face du FLN sur certains aspects de la loi de finances, concernant l’aspect social. Les députés du vieux parti ne pouvaient pas garder leur «sang-froid» devant les hausses des taxes de produits énergétiques.
Une «révolte» sourde au sein du groupe parlementaire et quelques chuchotements confiés à des confrères du PT et du FNA ont suffi à faire naître dans les rangs de l’opposition un «petit» espoir de changement d’attitude des parlementaires du parti majoritaire. Il n’en était rien et les mesures gouvernementales ont été votées, telles que préconisées par le Conseil des ministres. Mais, il est un fait qu’un petit courant d’air a effectivement soufflé sur l’institution législative, marquant une valse-hésitation des élus du FLN. Il n’est certes pas dit, pour autant, qu’une tempête politico-idéologique est aux portes, mais di-sons que le FLN ne semble pas très à l’aise avec le virage négocié par le gouvernement par rapport à la levée des subventions sur les produits de large consommation.
Au contraire du vieux parti, son allié au pouvoir, le RND a pleinement assumé son vote et les cadres du RND ont fait montre d’une discipline «exemplaire» au moment du vote de la loi de finances et lors des débats à la plénière, apportant une note discordante à celle des députés FLN qui s’en étaient pris, pour certains, au gouvernement.
L’autre divergence entre le RND et le FLN sur la question de la politique sociale, tient aux déclarations de leurs leaders respectifs. Ainsi, autant Amar Saâdani évacue le sujet dans ses discours, lui préférant d’autres thèmes, autant Ahmed Ouyahia assume pleinement l’orientation de l’Exécutif et va même plus loin que la loi de finances en ouvrant le dossier des subventions. Il préconise un ciblage des catégories sociales devant bénéficier d’une aide directe ou indirecte de l’Etat. Cette différence d’appréciation illustre une fracture nette entre les deux formations au pouvoir qui s’exprimera sans doute plus clairement à l’occasion de la prochaine campagne électorale pour les législatives.
Ce «souci» qui risque de créer des grincements entre les deux partis vient confirmer une autre fracture plus visible. Il s’agit de la place des binationaux dans la Constitution.
Le coup de feu, émanant de Saâdani, a tonné dans le ciel de la majorité présidentielle, lorsqu’au lendemain de l’annonce de la révision de la Constitution, le secrétaire général du FLN dénonce l’article 51 du projet de la Loi fondamentale qui stipule en substance que les binationaux sont exclus des postes de la haute administration du pays. Il n’en fallait pas plus pour que les deux hommes s’écharpent par médias interposés. Le patron du RND défend bec et ongles cette disposition de la nouvelle Constitution, au moment où Saâdani la critique vertement, se promettant d’en revoir l’application à la rentrée sociale. Entre-temps, les deux chambres réunies en congrès adoptent la Constitution telle que présentée par le Conseil des ministres. Les députés du FLN s’étaient-ils fait violence comme pour le vote de la loi de finances 2016? Il serait hasardeux de répondre par le positif, tellement les cadres du FLN se font discrets sur le sujet, laissant à leur chef, le soin de revendiquer la suppression de la mesure antibinationaux.
Les deux questions, la gestion des subventions et celle des binationaux vont rebondir à la prochaine rentrée parlementaire. L’arrivée du projet de loi en plénière de l’APN à la prochaine session parlementaire après son adoption, dernièrement en Conseil des ministres et le débat sur la loi de finances 2017, constitueront les temps forts de la «bataille des alliés», au niveau de l’hémicycle, mais également au niveau des commissions.
C’est dire que la fracture n’est certainement pas résorbée et la «guerre des mots» entre les leaders, promet des épisodes très intenses. Un autre dossier est venu très récemment accentuer les différends des frères ennemis. Il s’agit de la peine de mort contre les agresseurs d’enfants réclamée par une partie des Algériens.
L’affaire Nihal qui a secoué la société s’est imposée à la classe politique et c’est sans tarder que le RND a pris position sur le sujet, affichant son approbation au retour de la peine capitale contre ce genre de criminels. En face, le FLN hésite à s’exprimer officiellement sur le sujet.
Bien que la question ne soit pas censée constituer un différend entre les deux formations, elle reste pendante, tant que le vieux parti ne s’est pas positionné..