À fin mars 2018, le montant des reprises de liquidités s’élevait à 567 milliards de dinars.
La Banque d’Algérie doit désormais faire face au défi majeur de mener une nouvelle politique monétaire qui soutient la croissance, en phase avec sa principale mission de stabilisation des prix. La Banque d’Algérie le dit clairement dans sa note sur la conduite de la politique monétaire. “Le principal défi est désormais de continuer à assurer la stabilité des prix dans un environnement de surplus de liquidités substantielles et persistantes”, a-t-elle souligné, indiquant qu’elle dispose, à cette fin, “des instruments adéquats pour la gestion de la liquidité et est prête à les utiliser dans la mesure nécessaire”.
Depuis janvier 2018, la Banque d’Algérie a décidé de resserrer sa politique monétaire après les mesures d’assouplissement prises en 2017. En effet, le 8 janvier 2018, les opérations de reprise de liquidité ont débuté. Ces opérations s’effectuent sous forme de dépôts à terme à 7 jours. À fin mars 2018, le montant de ces reprises s’élève à 567 milliards de dinars. De plus, le 15 janvier 2018, au début de la première période de constitution de la réserve obligatoire, la Banque d’Algérie a augmenté le taux de cette dernière de 4% à 8%. Le Comité des opérations de politique monétaire, à travers des données actualisées du marché monétaire et des indicateurs macroéconomiques, a décidé, le 22 mai dernier, d’une augmentation du taux de la réserve obligatoire de 200 points de base, le portant de 8 à 10%, et d’une opération de “cantonnement” partiel de la liquidité, par le biais d’action bilatérale, afin d’éponger une partie des liquidités injectées au moyen du financement monétaire. C’est la seconde fois, donc, que l’Autorité monétaire décide d’une hausse du taux de la réserve obligatoire depuis de début de l’année.
La Banque d’Algérie semble reprendre d’une main ce qu’elle a donné de l’autre. L’utilisation appropriée de ces instruments devrait permettre de stériliser l’excédent de liquidité induit par le programme de financement monétaire. Au 1er trimestre 2018, la liquidité globale des banques s’établit à 1 461,1 milliards de dinars contre 1 380,6 milliards de dinars à fin décembre 2017, et 511,8 milliards de dinars à fin septembre 2017, soit un accroissement de 185,5%. Cette forte croissance a été entamée, dès novembre 2017, après la mise en œuvre du financement non conventionnel. Le financement non conventionnel du Trésor par la Banque d’Algérie a atteint un montant de 3 585 milliards de dinars à fin mars 2018 (2 185 milliards de dinars au 4e trimestre 2017 et 1 400 milliards de dinars au 1er trimestre 2018), contre 2 185 milliards de dinars à fin décembre 2017, soit une hausse du financement de 64,1%. Pour rappel, en contexte de crise financière et d’assèchement des ressources financières des banques, la Banque d’Algérie avait, dès l’été 2016, suspendu l’instrument de l’absorption de la liquidité (reprise de liquidité) et avait supprimé la rémunération de la facilité de dépôt. Le guichet du réescompte de la Banque d’Algérie a été réactivé au mois d’août 2016. Le Comité des opérations de politique monétaire de la Banque d’Algérie avait décidé, en août 2017, de ramener le taux de la réserve obligatoire de 8% à 4% (après une baisse, en mai 2016, de 12% à 8%). Au cours des prochains mois, la Banque d’Algérie annonce qu’elle continuera à suivre de près tous les développements macroéconomiques et monétaires, et ajustera, si nécessaire, les paramètres de l’ensemble des instruments à sa disposition pour assurer la stabilité des prix.
Mais le FMI, faute de stérilisation adéquate, l’augmentation de la liquidité relèverait la richesse nominale, perçue ou réelle, et stimulerait la demande, ce qui se traduirait par une hausse des prix à court terme en raison de l’insuffisance de l’offre intérieure et des possibilités d’épargne. Par ailleurs, si les autorités demandent de façon répétée des injections de liquidités, la capacité de la Banque d’Algérie à maîtriser les conditions monétaires et à assurer la stabilité des prix s’en trouvera compromise et son bilan en sera affaibli. Cette situation, combinée au nouveau rôle de suivi des réformes structurelles qui vient d’être confié à la Banque centrale, mettrait encore plus à mal son indépendance de fait.
Meziane Rabh