Surveillance renforcée face aux conditions favorables d’une invasion acridienne

Surveillance renforcée face aux conditions favorables d’une invasion acridienne

dix pays de la région occidentale de l’Afrique, dont l’Algérie, ont renforcé leur dispositif de surveillance et d’intervention face à une éventuelle invasion acridienne, les conditions étant favorables à la multiplication du criquet pèlerin.

« Actuellement la situation est calme, mais il y a des conditions qui nous exigent d’être vigilants et de suivre de plus près l’évolution des circonstances », a avisé le secrétaire exécutif de la Commission de lutte contre le criquet pèlerin dans la région occidentale (Clcpro), Mohamed Lemine Hamouny, lors d’une rencontre avec la presse maghrébine organisée récemment à Tunis par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’Agriculture (FAO).

Les pluies exceptionnelles enregistrées cette année au nord-ouest de l’Afrique et même en Corne de l’Afrique et au Yémen ont créé des conditions favorables à la multiplication du criquet.

De vastes zones du nord de la Mauritanie et des zones adjacentes de l’ouest de l’Algérie, du Sahara occidental, du sud-ouest de la Libye et du sud du Maroc, ont reçu des précipitations exceptionnelles en octobre.

Ces pays sont appelés à accroître leur vigilance entre janvier et mai 2016, recommande pour sa part la FAO.

Face à ces conditions propices à une invasion acridienne, les pays de la Clcpro vont multiplier leur dispositif de surveillance, d’alerte et d’intervention, alors que certains d’entre eux disposent de centres performants comme l’Algérie et la Mauritanie où les équipes de lutte anti-acridienne sont déjà prêtes à réagir, assure M. Hamouny.

L’Algérie a mobilisé quatre équipes supplémentaires basées au sud ouest du pays, tandis que la Mauritanie a multiplié ses effectifs au moins par trois en mobilisant 12 équipes.

Quant à la FAO, elle a mis en place un mécanisme pouvant offrir l’appui nécessaire au pays membres de la commission.

« La situation est très propice pour le développement de l’activité acridienne, mais la région est dotée de moyens plus importants par rapport à 2003 qui avait connu une importante invasion », selon ce fonctionnaire onusien.

La Clcpro, dont le siège est à Alger, a tenu récemment une réunion à Nouakchott pour étudier le plan de lutte antiacridienne de la Mauritanie qui connaît plusieurs saisons de reproduction alors que les pluies qu’elle a enregistrées durant la dernière saison ont favorisé des reproductions acridiennes

depuis plusieurs semaines.

En outre, ce pays n’est pas loin de pays sahéliens dont certaines zones présentent des risques sécuritaires et où les actions de lutte anti-acridienne sont, donc, impossibles, laissant les criquets prospérer.

Privilégier la lutte préventive

« Le risque d’invasion n’aura pas lieu d’ici à janvier. A partir de ce mois là, il se peut que la situation continue telle qu’elle est maintenant, comme nous pouvons avoir des surprises », prévient M. Hamouny.

Durant les six prochains mois (de janvier à mai 2016), une période pendant laquelle le criquet donnera naissance à trois générations d’essaims, les pays continueront la prospection, le traitement et procèderont à une évaluation bimensuelle de la situation.

La démarche des équipes de lutte antiacridienne consiste à traiter les foyers de grégarisation des criquets (vivant côte à côte en groupes nombreux) sur des superficies restreintes, afin d’éviter que ces insectes ne se développent.

C’est l’objectif de la lutte préventive que prône la FAO en partenariat avec les pays concernés par ce phénomène.

Suite aux invasions de 2003 et de 2005, la FAO et les pays de la région occidentale (Algérie,  Mauritanie, Maroc, Tunisie, Libye, Niger, Mali, Burkina Faso, Tchad et Sénégal) ont mis en place un programme de prévention basé sur l’alerte précoce, l’intervention rapide et la recherche appliquée tout en utilisant des quantités réduites de pesticides, sachant que 12 millions de litres de pesticides

avaient été utilisés durant ces deux années.

Lors de cette invasion, les pays du Sahel, notamment la Mauritanie et le Burkina Faso, ont perdu environ 90% de leurs récoltes, alors que ceux du Maghreb ont dû utiliser des quantités importantes de pesticides pour empêcher les essaims d’envahir les zones de cultures, ce qui a affecté durement l’environnement.

Le coût de l’inaction

En Mauritanie, un nombre de 1,3 million de personnes ont été touchées par l’invasion de 2003, contre un (1) million au Mali et 500.000 au Burkina Faso.

Outre les conséquences socio-économiques, l’invasion a aussi engendré des dépenses faramineuses en raison des lenteurs des bailleurs de fonds à mobiliser l’argent au moment opportun.

« Au début de 2003, la FAO a demandé un (1) million de dollars, mais la réponse tardive de ses partenaires a fait augmenter les dépenses jusqu’à 570 millions de dollars à la fin de la campagne de lutte en 2005 », déplore  M. Hamouny.

En plus de ces dépenses, les pays ont utilisé 12 millions de litres de pesticides sans compter l’impact économique et environnemental de cette invasion.

« Le criquet pèlerin est un ravageur vorace qui ne peut pas attendre que nous prenions des décisions. Il faut agir très vite en privilégiant la prévention », souligne cet expert onusien.

Un seul criquet peut consommer deux (2) grammes de végétation fraîche par jour et un essaim de criquets est capable de manger l’équivalent de ce que consomment 35.000 personnes/jour.