Le régime syrien ne contrôle quasiment plus ses frontières terrestres. Sur les 19 postes-frontières officiels qu’il a avec le Liban, la Jordanie, l’Irak et la Turquie, il n’en contrôle que 7, dont 5 avec le Liban et 2 avec la Turquie mais fermés par Ankara.
Des médias européens et anglo-saxons, citant des diplomates et des experts des sites spécialisés, laissent entendre que la dynamique de la chute du régime syrien est engagée. Certains médias du Golfe affirment même qu’il est temps de reconsidérer la vie après Assad. Certains analystes se demandent si la rapidité avec laquelle Daech, le Front al Nosra et la kyrielle des groupuscules armés ont conquis des villes et 50% de la surface du pays, en quelques jours n’est pas due à « une intervention extérieure très appuyée » des principales puissances qui sponsorisent les anti-Assad et à un changement de stratégie de ses alliés russe et surtout iranien. Outre les postes frontaliers, Damas a perdu des champs gaziers importants et… Palmyre, un site archéologique exceptionnel qui ouvre la voie vers Damas et Homs et la « célèbre » prison de Tadmor. En attendant, Daech et consorts progressent en Syrie. Affaibli sans doute par quatre ans de guerre, le régime semble se résoudre à la défense de la « Syrie utile » en se concentrant sur l’axe Damas-Homs-Alep. « Il est tout à fait compréhensible que l’armée syrienne se replie pour protéger les grandes agglomérations où se trouve une grande partie de la population, dont une partie a fui Daech et le Front Al-Nosra », la branche syrienne d’Al-Qaïda, explique à l’AFP Waddah Abed Rabbo, directeur d’al-Watan, quotidien proche du pouvoir. Pour lui, « ce n’est plus à l’armée syrienne de lutter seule contre le terrorisme. Il faut que le monde réfléchisse si l’établissement d’un ou deux États terroristes est en sa faveur ou pas ». Fabrice Balanche, un géographe français, estime que 10 à 15% de la population vit sur les territoires contrôlés par Daech, 20 à 25% sur ceux entre les mains du Front Al-Nosra et ses alliés, 5 à 10% sous l’autorité des milices kurdes et 50 à 60% dans des régions gérées par le régime. Ces « occupations » configureraient-elles d’une nouvelle carte de la Syrie ? « Nous allons vers une partition informelle avec des lignes de front qui peuvent encore bouger », indique Fabrice Balanche.
L’opposition prépare l’après-Assad
« Le Caire accueillera les 8 et 9 juin une conférence élargie des forces de l’opposition syrienne dont l’objectif est de définir une vision représentant le spectre le plus large possible de l’opposition syrienne (…) pour œuvrer à la fin de la crise en Syrie », annonce un communiqué du ministère des Affaires étrangères égyptien. Cette alternative à la Coalition de l’opposition réunira selon, selon Haytham Manaâ, un opposant syrien, plus de 200 personnalités (civiles et militaires), élira un comité politique, adoptera une feuille de route et une charte politique et prendra le nom d’« opposition nationale syrienne ». « Nous sommes prêts à négocier avec une délégation du gouvernement syrien sur la base du communiqué de Genève, c’est-à-dire sur la base du transfert de tous les pouvoirs militaires et civils sans exception à un gouvernement transitoire », dit-il. Avec le départ du président Assad, l’armée syrienne serait réduite à néant et le pays tomberait sous le contrôle des terroristes, avertit Alexeï Pouchkov, le président de la commission des affaires internationales de la Douma russe. « En Syrie, le choix est simple : soit Assad, soit Daech. L’opposition dite modérée n’a aucune force militaire. Le départ d’Assad entraînerait une désintégration de l’armée et l’occupation du pays par des terroristes », dit-il.
Djamel Boukrine