Traitement de l’insuffisance rénale : Seulement 500 greffes ont été réalisées depuis 1986

Traitement de l’insuffisance rénale : Seulement 500 greffes ont été réalisées depuis 1986

Pas plus de 500 greffes rénales ont été réalisées depuis 1986, dont quatre ont été faites à partir de cadavres. C’est ce qu’a déclaré le professeur Si Ahmed El Mehdi, chef du service de chirurgie interne et de greffe au Chu Frantz Fanon de Blida

, lors d’une conférence animée hier au siège de l’APN par la commission de la santé, des affaires sociales, du travail et de la formation, ainsi que par la fédération nationale des insuffisants rénaux. Et ce, dans le cadre d’une journée parlementaire portant sur les traitements de l’insuffisance rénale assistée par des professeurs, des docteurs et des néphrologues.

Le président de la fédération nationale des insuffisants rénaux, ainsi qu’un membre du bureau fédéral de la FNIR, sont également intervenus lors de la conférence en question.

Ces spécialistes ont revendiqué l’amélioration du traitement de l’insuffisance rénale, particulièrement la greffe, qui reste une procédure compliquée en Algérie.

«Nous enregistrons 3500 IRCT (insuffisance rénale chronique terminale) par an et le nombre d’insuffisants rénaux enregistré en 2009 est de 12 000 malades contre 13 000 en 2008, (dont cent enfants) et 7000 en 2007», a déclaré le professeur Si Ahmed El Mehdi, insistant sur l’importance de la sensibilisation en matière de don d’organes, particulièrement le don de rein, affirmant qu’à ce rythme, on pourrait arriver à 60 000 IRCT par an en 2020.

M. Si Ahmed a exposé, de ce fait, la maquette d’un centre de greffe doté de moyens technologiques qui pourraient un jour éviter le calvaire que vivent les malades, ainsi que le parcours d’une opération de greffe, soulignant l’aspect législatif.

La législation protège le donneur

L’un des points les plus importants de cette journée parlementaire est l’aspect législatif. Les intervenants ont mis l’accent sur la loi concernant le déroulement du don d’organe dans le souci d’une sensibilisation de la population en Algérie. La loi interdit de révéler l’identité du donneur au receveur et vice- versa, mais permet de donner les résultats de la greffe au donneur ou à sa famille.

S’il s’agit d’un don cadavérique, la famille du défunt doit être consentante et ne doit en aucun cas réclamer un dû, car il s’agit d’un don et non d’une transaction financière (elle a le droit à un repas funéraire d’une valeur de 100 000 Da).

C’est ce qu’il a été dit dans les lois 85-05 du 17 février 1985 et 90-17 du 31 juillet 1990 qui ont dicté l’article 161 concernant le prélèvement d’organes ou de tissus.

Toujours dans le cadre législatif, Boukhors Mohamed, membre du bureau fédéral de la FNIR, a évoqué l’indisponibilité de la présence de deux témoins directs de l’établissement sanitaire et du chef de service. Un point mentionné dans l’article 162 qui interdit le don de mineur et qui permet le désistement du donneur.

«Il ne suffit pas, cependant, que la loi soit dictée uniquement lors d’occasions telles que celles-ci. Il faudrait les prendre en considération et les mettre en application», a-t-il déclaré, sous-entendant par là que la loi concernant la greffe vaut la peine d’être exploitée et connue par tous.

«Car ses grandes lignes pourraient ouvrir la porte à la greffe.» «L’Algérie est le seul pays arabe qui ne fait pas de dissection», a-t-il ajouté, précisant que 116 greffes ont été réalisées cette année, alors que la demande dépasse les 1000.

Il citera comme exemple le Pakistan qui a enregistré 2500 dons de reins en 2007 et l’Iran, où le nombre a atteint 21 000, dont 1546 dons cadavériques, entre 1982 et 2006.

Il a déclaré par ailleurs que la possibilité de don de vivants est de 10% en Algérie, ce qui reste insuffisant pour améliorer la vie des malades.

Pris à part, le président de la Fédération des insuffisants rénaux, Mustapha Boukheloua, a insisté sur la sensibilisation des familles algériennes dans le but d’élargir le champ des dons.

C’est d’ailleurs l’objectif premier des spécialistes en la matière, selon le professeur Si Ahmed qui souhaiterait que les organes (en général) et les reins (en particulier) ne soient pas donnés seulement par les parents, les frères ou les enfants, mais aussi par le conjoint, le cousin ou par un membre de la belle famille.

«Ce n’est pas seulement grâce aux liens du sang qu’on pourrait sauver des vies, mais aussi grâce aux liens émotionnels», a-t-il estimé, précisant que seulement 1% des morts en réanimation à l’hôpital sont donneurs.

Même le recours aux soins à l’étranger n’est pas une solution, quand on voit que l’offre d’organe à un individu étranger est de 0%. Hormis le fait que chaque individu préfère garder les organes pour son concitoyen, les pays développés sont eux-mêmes touchés par le manque de dons d’organes. Les listes de receveurs potentiels sont interminables, selon le professeur.

La solution pour M. Boukeloua est la collaboration de tous les spécialistes pour créer un cadre spécifique à la greffe rénale.

Les 263 centres (publics et privés) réservés à cette maladie ne suffisent pas pour améliorer la vie des insuffisants rénaux.

«Il est vrai que l’Etat a mis le paquet pour la prise en charge des malades. Mais il y a un problème de coordination, dans le sens où les ambitions dépassent l’acte en lui-même. Et ce, en dépit du fait qu’il manque l’épicentre sur le plan législatif», a-t-il conclu.

Ce sont presque les mêmes propos qui ont été repris par l’ancien ministre de la santé, M. Aberkane, qui est intervenu lors de la conférence en tant que médecin, estimant que les organisations sanitaires doivent s’adapter aux textes législatifs et s’associer pour une amélioration dans le domaine de la greffe.

Il a mis, par ailleurs, l’accent sur «le retard qui relève de l’ignorance», évoquant la première greffe faite en 1970. La conférence s’est achevée par une lecture de recommandations et la clôture de la journée parlementaire.